Les concertations autour de la nouvelle politique des prix des médicaments ne vont pas être une partie de plaisir pour l'ensemble des intervenants dans le très complexe circuit de commercialisation. L'étape casablancaise tenue mardi sous la supervision du ministre de la Santé, El Hossein El Ouardi, a montré que médecins, pharmaciens et grossistes répartiteurs chargés de la vente aux officines, ont intérêt à accorder leurs violons. «Je ne suis pas ici pour polémiquer. Les médicaments sont chers au Maroc et cette situation est injustifiable et inacceptable», a tranché le ministre qui a mis en garde contre les conflits d'intérêts entre les divers intervenants. Les questions relatives aux marges dégagées par les officines et le droit de substitution qui leur sera accordé pour la vente des génériques, ont été parmi les questions prioritaires pour les pharmaciens. Farid Farhat, vice-président du syndicat des pharmaciens, a critiqué le benchmarking opéré par le département de tutelle, pour pouvoir dégager un modèle pour la grille projetée des prix. «Nous avons été comparés au Brésil alors que ce marché n'est pas semblable au nôtre, explique-t-il. Les 12.000 officines du pays ont un réel problème de marge, mais aussi des problèmes d'accompagnement». Selon les chiffres du ministère, les officines reçoivent quotidiennement, 1 million de personnes, à la fois pour l'achat et le conseil, alors que le Prix Public Maroc (PPM) des 10 médicaments les plus vendus est inférieur à 20 DH. Pour leur part les médecins semblent être peu convaincus par les impacts attendus du nouveau décret sur la bioéquivalence. Révolté contre les génériques, Mohamed Naciri Bennani s'est carrément ditn «en possession d'études et de recherches démontrant l'effet nul des médicaments à bas prix». Une démarche qui montre l'important travail de sensibilisation devant encore être fourni par le département de tutelle et surtout le désaccord profond qui existe entre prescripteurs et vendeurs des médicaments. Autre obstacle majeur sur lequel butent les concertations amorcées, l'agonie des instances représentatives des médecins et surtout des pharmaciens, dont la présidence est exercée par intérim depuis 4 ans. El Ouardi a ouvertement plaidé pour un règlement urgent de cette question, afin que les deux ordres arrivent à jouer le rôle d'interlocuteur fiable pour la prochaine étape de la préparation des nouvelles lois du secteur. À l'inertie des instances de représentation, s'ajoutent les demandes pressantes des 40 laboratoires pharmaceutiques qualifiés de «fleuron national» par le ministre de la Santé. Les laboratoires semblent adhérer aux propositions de la tutelle concernant leur regroupement et la mise en place de mesures qui permettent d'éviter de court-circuiter leur rôle d'intermédiaire logistique. Le volume de plus en plus grandissant des impayés des officines ainsi que du contentieux qui en découle, restent parmi les zones d'ombre que les concertations actuelles ne peuvent régler d'un seul coup de baguette magique. Pour sa part, l'activation du RAMED va faire exploser le Budget du ministère consacré à l'achat des médicaments, pour le porter de 675 MDH en 2011 à 1,6 MMDH durant cette année. La rationalisation des dépenses médicales du ministère est, selon le ministre, chose faite, avec l'adoption de nouveaux critères qui vont présider aux choix des cocontractants de l'Etat. Les nouvelles mesures préconisées vont également s'attaquer à la composition des comités des médicaments que ce soit au niveau de l'approvisionnement ou au niveau des régions et provinces. Le lancement des unités d'urgence mobiles, ainsi que la création de pôles régionaux spécialisés, détermineront les nouvelles modalités de la commande publique qui devra se soucier surtout de la couverture territoriale équilibrée des soins. Le projet de décret d'application des nouvelles règles pour l'approvisionnement des hôpitaux publics a été déposé au SGG et détermine les documents constituant les dossiers devant accompagner la demande d'enregistrement et d'agrément. Point de vue Hossein El Ouardi, Ministre de la Santé. Il faut un débat sur les tenants et les aboutissants de la mise en place de la nouvelle politique des prix. Nous sommes encore en phase d'élaboration d'une stratégie. Plusieurs options sont à discuter, comme l'octroi d'honoraires aux pharmaciens, la mise en place d'un fonds pour les indemniser ou encore l'établissement d'une liste des médicaments qui ne sont pas substituables. Je suis pour le droit de substitution pour que les citoyens puissent s'assurer un accès aux soins, ce qui est une exigence fondamentale. Nous devons œuvrer pour que les citoyens acceptent le générique. Il est vrai que beaucoup de médecins doutent des génériques, c'est pourquoi le décret de la bioéquivalence a été adopté. Il faudra faire très attention lors de l'enregistrement des bio-similaires, au moment ou le ministère tiendra des recommandations internationales. Le calendrier proposé indique qu'à partir du 1er juillet, l'informatisation du processus d'enregistrement sera faite, alors que le 15 du mois prochain verra la réunion de la commission nationale des médicaments, alors que l'observatoire national sera fonctionnel à parti du 1er août.