Sahara marocain : Le Guatemala considère l'initiative d'autonomie comme "l'unique base sérieuse, crédible et réaliste pour la résolution du différend" régional    Réorganisation du Conseil national de la presse : Ce qu'il faut retenir du texte adopté par le gouvernement    MAE : nomination de 22 nouveaux Consuls Généraux    Assises de l'IA : Un premier pas, des attentes immenses    Jouahri : Les banques participatives ne représentent que 2 % des actifs du secteur bancaire marocain    «Aéroports 2030» : l'ONDA réorganise ses trois pôles majeurs    Football féminin : Une terre, un rêve, un sacre.. Le Maroc joue sa CAN    Les secteurs porteurs en Côte d'Ivoire : quelles opportunités pour une entreprise marocaine ?    Fouzi Lekjaa intronise Achraf Hakimi en Leader des Lions de l'Atlas    La Renaissance de Ziyech passera-t-elle par Florence ?    Coopération Maroc-Espagne-France : 15 tonnes de cannabis saisies    Rencontre entre le Directeur général de l'ICESCO et l'Ambassadeur de Chine au Maroc pour discuter des préparatifs de la participation à la réunion ministérielle sur le dialogue des civilisations à Pékin    Spain : Sumar pressures PSOE over coalition pact, avoids Western Sahara dispute    MRE : Le Maroc opère un vaste mouvement consulaire, 45% des postes aux femmes    L'ambassadeur de Chine au Maroc explore la mémoire de l'amitié historique à travers les Archives Royales    Conseil de gouvernement : Six nouvelles nominations à des fonctions supérieures    Elections partielles : Le PAM, RNI et Istiqlal remportent 64% des sièges    Solidarité à Khénifra : le ministère de la Santé prend en charge le traitement de Firdaws Bousarfan    CAF unveils new WAFCON trophy ahead of tournament in Morocco    Rougeole : Utrecht renforce la vaccination avant les départs au Maroc cet été    ISIDERM et ISDIN s'unissent pour promouvoir l'éducation sur la protection solaire au Maroc    Algérie : L'historien Amine Belghit condamné à 5 ans de prison    Casablanca : 4 personnalités décorées chevalières de l'Ordre des arts et des lettres par la France    Un homme interrompt le trafic du tramway à Casablanca en s'allongeant nu sur la voie    Six personnes interpellées à Fès après une rixe nocturne à l'arme blanche    Essaouira accueille la 2ème étape du Championnat du Maroc de Kitesurf Strapless    L'historien algérien Mohamed Lamine Belghit condamné à cinq ans de prison au terme d'un procès expéditif pour «atteinte à l'unité nationale»    Le syndrome du Maroc : une obsession médiatique algérienne révélée par la disparité de couverture entre les agences de presse des deux pays    Cinq chefs d'Etat africains à la Maison Blanche    Classement des hôtels : la SMIT engage la "guerre" aux étoiles    Biens culturels. La Côte d'Ivoire et la Suisse s'accordent    Tanger : Le caftan marocain brille lors de la Luxury Network Morocco    Rabat : L'OPM organise une semaine de concerts gratuits pour célébrer la musique classique    L'ADN d'un Egyptien de l'Ancien Empire révèle des origines marocaines et mésopotamiennes    Le ministère de la culture soutient 379 projets d'édition et du livre pour plus de onze millions de dirhams en 2025    L'attaquant portugais Diogo Jota et son frère meurent dans un accident de la route en Espagne    L'Atalanta et l'OM se disputent les faveurs de Nayef Aguerd    Le Maroc à l'épreuve d'un risque climatique devenu structurel    Real Madrid : En manque de temps de jeu, Brahim Diaz inquiète    Elodie Nakkach : Pas de pression inutile, juste l'envie d'aller loin    Energie propre : L'UE investit 3,66 milliards d'euros pour aider les Etats membres à faible revenu    Chicago : 4 morts et 14 blessés dans une fusillade de masse    Inwi lance la campagne #Lbess_touni pour soutenir les Lionnes de l'Atlas    Algérie : Le FMI alerte sur l'urgence d'un ajustement économique    Le président de la Fédération kabyle de football écrit : Quand une interview devient un chef d'accusation de terrorisme en Algérie    OCP Nutricrops renforce sa coopération stratégique avec le Bangladesh    La ville marocaine de Chefchaouen renaît en Chine : une réplique fidèle de la ville bleue au cœur de Harbin    La finale de la Coupe du monde des clubs pourrait se jouer à 9h du matin    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Relancer la recherche scientifique au Maroc : priorité au financement et à l'humain
Publié dans Les ECO le 03 - 07 - 2025

Ancien président de l'Université Sidi Mohamed Ben Abdellah de Fès et de l'Université Mohammed V Souissi de Rabat.
Pr. Brahim Akdim (**)
Professeur à l'UPF, ancien vice-président et professeur honoraire de l'Université Sidi Mohamed Ben Abdellah de Fès
Dans le paysage géoéconomique contemporain marqué par une compétition intellectuelle et technologique accrue, le Maroc se trouve confronté à un défi quasi existentiel : transformer son système de recherche et d'innovation pour assurer sa souveraineté et améliorer la qualité de vie de ses citoyens. Alors que les nations avancées consacrent en moyenne plus de 2% de leur PIB à la recherche scientifique et l'innovation, le Maroc peine à atteindre 0,8%, ce qui se traduit par une 66e place au Global innovation index 2024 – position respectable, mais qui masque son absence parmi les pôles d'excellence du «Global South».
Cette réalité met en lumière l'urgence d'agir pour combler rapidement cet écart. L'analyse comparative des expériences internationales révèle que les réussites les plus spectaculaires combinent toujours dans le domaine de la recherche scientifique et de l'innovation, cinq piliers clés : un financement à la fois massif et bien ciblé, une gestion agile des ressources humaine, une gouvernance claire et transparente, une ouverture internationale systématique et des liens organiques avec l'appareil productif. Il devient indispensable de dessiner pour notre pays une stratégie nouvelle, qui s'inspire de ces réussites globales tout en étant parfaitement adaptée aux spécificités du contexte national.
Le financement de la recherche : de la pénurie à l'abondance stratégique
Le sous-investissement chronique dans la recherche scientifique et l'innovation constitue le premier obstacle à surmonter. Aujourd'hui, le Maroc n'y consacre que 0,8% de son PIB, alors que des pays comme la Turquie, l'Espagne, la Malaisie ou l'Italie atteignent 1,5%. Cette asphyxie financière freine le développement de projets prometteurs et dilue le potentiel de nos chercheurs.
Cette situation appelle des mesures radicales. Pour inverser cette tendance, il faut d'abord définir une trajectoire budgétaire ambitieuse : viser 1% du PIB dès 2030, 1,2% vers 2035 et 1,5% en 2040. Cette hausse passera par une diversification des sources de financement, alliant crédits publics, partenariats public-privé, implication d'acteurs privés, fonds souverains et participation active aux grands programmes internationaux.
Avec un PIB estimé à 1.597 milliards de dirhams (MMDH) en 2024 (en hausse de 3,8% par rapport à 2023), le Maroc dispose de la marge de manœuvre nécessaire pour engager ces efforts. La mise en place d'un Fonds de recherche, d'innovation et de souveraineté technologique, doté de cinq MMDH sur cinq ans, enverra un signal fort de l'engagement de l'Etat marocain.
Afin d'éviter le piège de la dispersion, ce fonds ciblera des domaines stratégiques, où notre pays est en mesure de se distinguer, comme la gestion durable de l'eau et la désalinisation à faible empreinte carbone, l'agriculture high-tech pour zones arides, la valorisation biotechnologique de la pharmacopée traditionnelle, le développement des énergies renouvelables solaire et éolienne, ou encore l'intelligence artificielle adaptée aux enjeux locaux. En concentrant ainsi les ressources, le Maroc renforcera rapidement son expertise, maximisant les impacts socioéconomiques des projets tout en se positionnant en véritable laboratoire d'innovations pour les pays du Sud.
La révolution des ressources humaines : former, attirer et retenir les talents
Le deuxième frein majeur à la recherche et innovation au Maroc tient au manque criant de capital humain. Avec moins de 1.000 chercheurs pour un million d'habitants, loin de la moyenne mondiale de 1.500, notre pays souffre non seulement d'un déficit quantitatif, mais aussi de faiblesses qualitatives : des programmes doctoraux dépassés, une mobilité internationale réduite et des carrières scientifiques peu attractives.
Tout d'abord, il est indispensable de valoriser les conditions de travail des chercheurs et des enseignants-chercheurs afin de retenir les talents dont disposent déjà nos universités et centres de recherche. Il convient ensuite de refondre entièrement la formation doctorale au Maroc en y associant rigueur académique et immersion professionnelle.
Les directeurs de thèse ne devront pas accompagner plus de quatre doctorants à la fois, pour garantir un suivi personnalisé, tandis qu'un programme de 5.000 bourses doctorales sur dix ans, d'un montant minimum de 10.000 dirhams par mois, permettra de professionnaliser la formation doctorale. Il faudra également encourager le retour de 2.500 chercheurs marocains expatriés d'ici 2035, en leur proposant des contrats postdoctoraux ou des postes permanents avec des salaires alignés sur les standards internationaux et des budgets de recherche garantis. Une attention particulière sera portée aux jeunes chercheurs formés dans des universités de renommée mondiale.
Parallèlement, la création d'une centaine de chaires d'excellence dans nos universités permettra d'attirer des scientifiques internationaux de haut niveau. Ces chaires, dotées de budgets conséquents (5 à 10 millions DH sur cinq ans par chaire) et d'une réduction substantielle des charges d'enseignement, feraient office de locomotives scientifiques dans leurs domaines respectifs.
En parallèle, il est crucial d'accompagner la montée en compétences des personnels technique et administratif des laboratoires. Recruter et former des techniciens spécialisés dans les plateformes analytiques, le pilotage d'expériences ou la gestion de données doit devenir une priorité. Grâce à leur expertise en maintenance d'équipements de pointe, en respect des normes internationales de sécurité et en maîtrise des outils de traitement massif de données, nos laboratoires pourront atteindre les standards mondiaux et répondre efficacement aux appels d'offres internationaux.
Gouvernance, ouverture internationale et liens avec l'appareil productif : les autres piliers de l'écosystème marocain de la recherche scientifique et innovation
La réussite d'une politique scientifique ne se mesure pas seulement aux crédits accordés, mais aussi à la qualité des règles qui encadrent les universités et les organismes de recherche. Les pays ayant réussi leur transition scientifique ont généralement commencé par réformer la gouvernance. Le Maroc doit placer la réforme radicale de la gouvernance au cœur de sa stratégie, car sans une architecture décisionnelle claire, agile et responsabilisante, même les investissements financiers importants risquent d'être inefficaces.
La première mesure devrait être la création d'un Conseil national de la science et de l'innovation, placé sous l'autorité directe du chef du gouvernement. Il serait chargé de définir chaque année les priorités stratégiques, en concertation avec les ministères de l'Economie, de l'Enseignement supérieur, de l'Industrie, de la Transition numérique, de la Transition énergétique et Développement durable, de l'Agriculture et de la Santé. Ce Conseil aurait également pour mission de superviser la mise en place d'une Agence marocaine de la recherche et de l'innovation (AMRI), dotée d'un statut juridique et financier autonome.
L'AMRI remplacerait l'actuel Centre national de la recherche scientifique et technique (CNRST). L'isolement scientifique freine l'excellence, alors que l'internationalisation de nos laboratoires et de nos équipes devrait devenir un axe majeur de notre stratégie. Le Maroc doit faciliter la mobilité de ses chercheurs, encourager leur participation à des projets collaboratifs mondiaux et soutenir la publication de leurs travaux dans des revues de renom. En multipliant les partenariats et les échanges, nos scientifiques gagneront en visibilité et pourront accéder aux méthodes et aux équipements les plus avancés. Le pont entre le monde académique et le secteur économique doit devenir une autoroute.
Pour cela, l'Etat doit jouer un rôle catalyseur actif en offrant des incitations fiscales fortes aux entreprises qui investissent aux côtés des universités, en développant des parcs scientifiques intégrés aux campus et en simplifiant les procédures de transfert de technologie et de protection de la propriété intellectuelle. Ces trois piliers seront abordés dans le prochain article où nous proposerons une feuille de route pour la prochaine décennie. Il est de notre devoir de dire à voix haute que le moment est venu de faire de la science et de l'innovation des priorités nationales absolues.
Ce choix stratégique déterminera la place du Maroc dans le monde de demain – spectateur ou acteur des grandes mutations technologiques en cours. L'histoire nous a montré que les nations qui ont su investir massivement et intelligemment dans la recherche scientifique et l'innovation, ont toujours été récompensées par un développement économique et social durable.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.