Alors que le Maroc intensifie ses efforts pour réformer en profondeur son système éducatif, un rapport élaboré par le ministère de l'Education nationale, en partenariat avec l'UNESCO, réaffirme le rôle stratégique des directeurs d'établissements scolaires. Bien au-delà de la simple gestion administrative, ces leaders sont appelés à devenir les moteurs d'un renouveau pédagogique, garants de la qualité des apprentissages fondamentaux et relais décisifs des politiques éducatives sur le terrain. Un rapport conjoint du ministère de l'Education nationale et de l'UNESCO braque les projecteurs sur un levier souvent sous-estimé mais crucial de la réforme de l'école publique marocaine. Il s'agit du rôle stratégique des directeurs d'établissements scolaires. Loin d'être de simples gestionnaires, ces derniers sont désormais appelés à incarner un leadership pédagogique fort pour impulser l'amélioration des apprentissages fondamentaux et garantir l'ancrage territorial des réformes. Dans une école publique marocaine en quête de transformation qualitative, le rôle du directeur d'établissement connaît une redéfinition profonde. C'est ce que souligne le rapport présenté à Rabat sous le titre «Pleins feux sur l'achèvement de l'éducation de base et les apprentissages fondamentaux au Maroc», fruit d'une collaboration entre le ministère de l'Education nationale, du Préscolaire et des Sports, et le Global Education Monitoring Report (GEM) de l'UNESCO. En plaçant les directeurs d'établissement au cœur de la dynamique éducative, ce rapport s'inscrit dans la nouvelle vision stratégique de l'école marocaine, fondée sur un pilotage local fort, une responsabilisation accrue des acteurs et une ouverture sur la communauté éducative. Du gestionnaire à l'animateur pédagogique Le rapport insiste sur la nécessité de considérer le directeur non plus comme un simple administrateur de l'établissement, mais comme un leader pédagogique. Il propose en ce sens de définir clairement les responsabilités pédagogiques des directeurs, tout en les déchargeant des tâches purement logistiques par l'affectation d'assistants administratifs, notamment en milieu rural. L'objectif est de libérer du temps et de l'énergie pour le suivi pédagogique des équipes, l'animation de projets d'établissement et la coordination des acteurs éducatifs. Pour cela, le document recommande un accompagnement structuré par les inspecteurs et les directions provinciales, afin d'offrir un appui pédagogique équilibré, tout en réduisant les disparités entre zones rurales et urbaines. Les visites d'inspection, dans cette optique, devraient se concentrer davantage sur les apprentissages fondamentaux que sur les seuls aspects administratifs. Une étude ancrée dans le terrain La crédibilité du rapport repose sur une recherche de terrain approfondie, conduite dans les régions de Casablanca-Settat, Souss-Massa, Béni Mellal-Khénifra et l'Oriental. Ce travail a permis de visiter 60 écoles primaires publiques, d'analyser de multiples questionnaires et de conduire des entretiens qualitatifs avec des directeurs, enseignants, inspecteurs et responsables régionaux. Ce matériau empirique riche a permis de dégager des tendances fortes. Si de nombreux directeurs sont investis et engagés, ils sont encore souvent freinés par un manque de clarté sur leur mission pédagogique, des responsabilités administratives écrasantes, ou encore une absence d'outils de pilotage. Le rapport préconise une montée en compétences à plusieurs niveaux. Il recommande la formation des directeurs, des inspecteurs et des cadres régionaux au coaching pédagogique, ainsi qu'au développement d'une culture de confiance et de partage des responsabilités entre les différents niveaux hiérarchiques. Il insiste aussi sur la nécessité de renforcer les capacités des directeurs en communication, en mobilisation communautaire et en stratégie d'ancrage local. Pour cela, les établissements devraient institutionnaliser des espaces de dialogue régulier avec les familles et la société civile, comme les Journées Portes ouvertes, et intégrer des indicateurs d'implication communautaire dans l'évaluation des écoles. Vers une gouvernance éducative partagée Dans une déclaration à la presse, le directeur du bureau de l'UNESCO pour le Maghreb, Charaf Ahmimed, a souligné que les directeurs scolaires sont appelés à devenir de véritables «incitateurs du changement», capables d'orienter l'action éducative vers l'innovation, la performance, et l'ancrage territorial. Le leadership pédagogique n'est pas un luxe, mais une condition essentielle pour améliorer les résultats d'apprentissage, a-t-il affirmé. Pour sa part, le secrétaire général par intérim du ministère, Houssine Kodad, a rappelé que le Royaume accorde une importance centrale à la formation et à l'autonomisation des directeurs, considérés comme les chevilles ouvrières des réformes en cours. Ce rapport s'inscrit dans une dynamique plus large, qui vise à codifier les rôles et les pratiques des directeurs, à mieux comprendre leurs interactions avec les autorités pédagogiques et les communautés locales, et à identifier les leviers concrets pour améliorer l'efficacité des écoles. En mettant en avant la figure du directeur comme acteur central du changement, le rapport confirme un tournant dans la gouvernance éducative au Maroc. Le document présenté par le ministère et l'UNESCO constitue ainsi une feuille de route précieuse pour les années à venir. Il engage tous les acteurs à concevoir l'école comme un espace de leadership partagé, de professionnalisation continue et de coopération avec les familles et les territoires.