Le mobile money s'est imposé comme un levier majeur de l'inclusion financière en Afrique. Pourtant, tous les pays n'avancent pas au même rythme. Le dernier rapport Afrobarometer, qui classe 35 pays africains selon la détention de comptes mobile money, met en évidence de forts contrastes régionaux. Alors que l'Afrique subsaharienne affiche des taux d'adoption élevés et des usages quotidiens bien ancrés, l'Afrique du Nord accuse un retard persistant. Le Maroc, avec seulement 12% de détenteurs d'un compte mobile money, occupe l'avant-dernière place du classement. Un positionnement qui interroge, au regard du potentiel du marché et des transformations financières en cours sur le continent. Le dernier rapport Afrobarometer classe 35 pays africains en matière de comptes «mobile money». Le Maroc occupe l'avant-dernière place de ce classement africain. Seuls 12% des Marocains possèdent un compte mobile money. Ce taux place le pays juste devant la Tunisie. La moyenne africaine atteint pourtant 60%. L'écart souligne un retard structurel du mobile money au Maroc. La situation contraste fortement avec l'Afrique subsaharienne. Ce classement révèle des disparités régionales marquées. Il met en lumière des freins réglementaires persistants. Le potentiel de croissance reste pourtant important et le marché demeure largement sous-exploité. Top 5 africain : le Kenya se démarque Cinq pays dominent clairement le classement africain du mobile money. Ils combinent adoption massive, usage quotidien et écosystèmes matures. Ces marchés affichent une forte pénétration mobile. Les services sont intégrés aux habitudes économiques. Les utilisateurs réalisent paiements et transferts régulièrement. Les volumes de transactions progressent chaque année. Le mobile money devient un outil financier central. Ces pays servent désormais de références continentales. Le Kenya demeure le pionnier du mobile money en Afrique, avec environ 92% d'adultes équipés. M-Pesa structure l'économie quotidienne depuis 2007 : paiements, salaires et aides sociales passent par le mobile. Dans ce pays, le mobile money remplace souvent le compte bancaire classique. Le Gabon suit de près, avec une adoption rapide et urbaine : près de 89% de comptes mobile money. La forte urbanisation facilite l'usage numérique. Les opérateurs mobiles dominent les paiements courants, alors que le cash recule progressivement dans les grandes villes. En 3e position, le Ghana bénéficie d'un écosystème digital complet et atteint environ 88% de taux d'adoption. Le mobile money y soutient le commerce informel et formel. Les transferts domestiques sont rapides et peu coûteux. Même l'Etat utilise le mobile money pour certains paiements. Le Sénégal, où le mobile money est utilisé comme outil d'inclusion financière, arrive 4e, avec un peu plus de 80% de comptes mobile money. Les services touchent zones rurales et populations non bancarisées. Orange Money joue un rôle central dans cet écosystème. Dans ce pays, le mobile facilite l'épargne et les petits paiements. L'Eswatini ferme le top 5 de ce classement, avec un taux supérieur à 80%, indique le rapport. Son secret : un usage intensif à petite échelle. En effet, la taille du pays favorise une diffusion rapide et les paiements mobiles remplacent largement l'argent liquide. L'interopérabilité soutient l'adoption quotidienne. Pourquoi ces pays dominent le mobile money africain ? Ces leaders partagent plusieurs facteurs clés. La réglementation y est favorable aux opérateurs mobiles. De plus, les autorités ont autorisé des modèles simples et flexibles. Les licences, elles, sont accessibles et adaptées aux réalités locales. Pour leur part, les réseaux télécoms couvrent largement les territoires, y compris ruraux et les investissements télécoms ont été continus. Les frais restent accessibles pour les ménages modestes et les services répondent à des besoins quotidiens concrets : transferts, paiements et épargne s'utilisent chaque jour. Dans ces pays leaders, le mobile money s'intègre à l'économie réelle. Il soutient le commerce informel et les revenus irréguliers. Afrique du Nord : un retard persistant du mobile money L'Afrique du Nord, pour sa part, affiche les taux de mobile money les plus faibles. La région reste sous les 30% en moyenne. Les paiements en cash y dominent encore largement car les habitudes financières évoluent lentement. La bancarisation classique reste privilégiée par les institutions. Les banques conservent un rôle central dans les paiements et les cadres réglementaires freinent souvent l'innovation mobile. Les autorisations restent complexes et longues tandis que la confiance des usagers progresse lentement. Car la valeur ajoutée du mobile money reste peu perçue. C'est pourquoi l'usage quotidien peine à s'imposer même si le potentiel demeure significatif. Mobile money : la première porte d'entrée vers l'inclusion financière en Afrique Le mobile money est devenu la première porte d'entrée financière. Il dépasse largement les comptes bancaires traditionnels. En Afrique, 37% possèdent un compte bancaire, mais 60% disposent d'un compte mobile money. Le mobile réduit les barrières d'accès financières : aucun déplacement bancaire n'est nécessaire. Les jeunes adoptent massivement ces solutions digitales et utilisent le mobile pour payer et transférer. Les zones rurales bénéficient aussi d'un meilleur accès : le téléphone y remplace souvent l'agence bancaire. Concernant l'impact économique de ce modèle, le mobile money réduit fortement les coûts de transaction et les transferts deviennent plus rapides et moins chers. Il sécurise les paiements, limite les pertes de cash et les risques de vol diminuent fortement. Conséquence : les ménages gèrent mieux les chocs économiques. Ils reçoivent des fonds en urgence. Les petits commerçants, eux, fluidifient leurs paiements quotidiens. Les ventes, elles, augmentent grâce à la rapidité. Pour les états, la traçabilité financière s'améliore et les flux deviennent plus visibles et formels. L'économie gagne en efficacité. Enjeux futurs du mobile money en Afrique L'interopérabilité reste un défi majeur sur le continent, car les plateformes communiquent encore peu entre elles. Dans ce contexte, les utilisateurs sont souvent contraints de multiplier les comptes. Parallèlement, la cybersécurité devient une priorité stratégique, à mesure que les volumes financiers augmentent. Face à ces enjeux, la protection des consommateurs doit être renforcée. Cependant, les litiges restent parfois mal traités. De son côté, l'intégration avec les banques progresse lentement. Malgré cela, les modèles hybrides se multiplient. À terme, le mobile money prépare l'essor des fintech africaines. Il contribue ainsi à structurer les services financiers de demain. Abdelhafid Marzak / Les Inspirations ECO