Enseignant au département d'économie à l'université Mohammed V Agdal de Rabat, spécialisé dans l'aménagement du territoire, Pr. Mekki Zouaoui est originaire de la ville de Salé. Il est de toutes les rencontres qui concernent de près ou de loin les villes voisines. Vous êtes membre du bureau de l'Association Bouregreg, dont le siège possède d'ailleurs une vue imprenable sur l'ensemble de la vallée du Bouregreg. Pouvez-vous nous en dire plus sur l'association ? L'Association Bouregreg est une fédération de petites associations et d'initiatives extrêmement diverses qui prennent naissance dans la région. Elle a la particularité de posséder des annexes dans toute la région, et qui sont extrêmement autonomes. Quelle est la portée des rencontres que l'association a initiées entre la société civile et l'Agence de l'aménagement de la vallée du Bouregreg ? Il s'agit de la huitième rencontre d'une série qui s'inscrit dans un accord de partenariat entre l'Agence du Bouregreg et nous-mêmes, et qui a pour but d'offrir un forum de discussion et d'échange. Ce type de rencontres se fait tous les 3 ou 4 mois. Les citoyens peuvent venir interpeller essentiellement l'Agence du Bouregreg sur un certain nombre de points. Comprenez que l'Agence a beau communiquer, cette communication est officielle et n'atteint pas toujours sa cible. Au cours de ces discussions, l'occasion est d'aller dans les détails. Notre but est que le citoyen puisse se faire une idée sur des données un tant soit peu objectives. Il peut y avoir des critiques virulentes, mais c'est souvent dû à un manque d'informations. Pensez-vous sincèrement que le poids de l'avis de la société civile face à l'Agence du Bouregreg peut être conséquent ? Il est difficile de délimiter l'impact des acteurs de la société civile. Mais d'une manière ou d'une autre, il est vrai qu'elles impactent à la marge, parce que le plan d'aménagement global a déjà pratiquement fixé l'essentiel. Les citoyens, de part le manque d'informations, découvrent un jour qu'il y aura une concentration urbaine. Donc, nous sommes toujours dans cette situation de rattrapage. Urbanisme, transport, protection de l'environnement. Quel est, selon vous, le principal point sur lequel l'Agence doit focaliser ses actions pour le bien de la vallée ? On part du paradigme que la vallée du Bouregreg va être le cœur battant, la nouvelle centralité, de la nouvelle capitale Rabat-Salé. L'assainissement du fleuve en est le principal objectif. L'Agence joue un rôle de lubrifiant de ces actions. Plusieurs Slaouis pensent que Salé est la grande perdante de tout ce projet. Êtes-vous d'accord avec eux ? Au contraire, Salé est la grande gagnante de cet aménagement. Les Slaouis sont beaucoup plus sensibles à ce qui se passe sur le fleuve que les Rbatis, du simple fait de la topographie du projet. Une bonne partie de Slaouis traversent tous les jours le fleuve, alors que les Rbatis restent parfois des mois sans voir le Bouregreg. Aujourd'hui, ce qui handicape le rééquilibrage au sein de l'agglomération de Rabat-Salé, c'est l'absence d'équipements emblématiques à forte charge symbolique dans la ville de Salé, (théâtre national, musées, sièges de grands ministères, infrasctructures touristiques et récréatives,…). Je défends la thèse qui fait de Rabat-Salé la nouvelle grande capitale du pays. Elle ne l'est pas aujourd'hui ? Elle ne l'est pas administrativement parlant. Dans les faits, elle le devient. Finalement, cette intégration se fait sous nos yeux, grâce à ce projet qui soude les deux villes. Le tramway est en ce sens extrêmement important parce qu'il restructure l'ensemble de la mobilité urbaine. Aujourd'hui, ceci devient aberrant à la limite d'avoir deux entités distinctes. Mon souhait serait qu'il y ait, pour Rabat et Salé, un seul gouverneur, et un seul maire. La distinction est pour moi une aberration.