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Visite de la dernière demeure de mon père “Le cimetière”
Publié dans Maghreb Observateur le 27 - 08 - 2009

A. Khouibaba , Montreal
"On ne peut pas prendre le train qui vient d'en face et se dirige dans le sens inverse de notre train sans faire un arrêt dans une gare et attendre.''
Loin de Montréal, du Maroc, loin de la vie, ma vie. Justement quelle vie ! Un éternel itinérant ou pour faire plus joli, un nomade ne sachant prendre racine. On dirait parfois que je sors de moi-même et que je me regarde, me parle, me punis même, et reste cette grande question : "Qui suis-je?"
Je suis le second, celui qui refuse d'être le commandant de ce bateau, qui refuse de prendre la responsabilité ; mais quelle responsabilité ? Au fait, je suis en train d'écrire ou de débuter la réalisation d'un rêve, écrire ce roman, "Le second" ?
Je crois énormément au destin et cela prend souvent un début ou un point de commencement d'une volonté qui se substitue à ce destin, mais on ne sait jamais de quel côté on est placé : parfois du côté de celui qui a pris la décision, parfois du côté de celui qui subit les conséquences de cette décision.
La rivière s'est transformée en marécage, elle a perdu son âme et est devenue une perte, "un gâchis". On ne peut pas prendre le train qui vient de l'autre coté et se dirige dans le sens inverse de notre train sans faire un arrêt dans une gare et attendre. Romain Rolland écrivait: "La vie est une bataille sans trêve et sans merci où l'homme qui veut être digne de ce nom d'homme doit lutter constamment contre des ennemis invisibles : les forces meurtrières de la nature, les désirs troubles, les obscures pensées … et tout cela pousse l'homme à s'avilir et à s'anéantir. Nous vivons pour accomplir une loi : la loi de Dieu: Meurs, pleure, souffre mais sois ce que tu dois être : un Homme".

J'ai promis qu'un verdict ou plutôt une décision serait rendue après la réunion de mon conseil d'administration composé de moi et moi. J'ai parlé déjà de ces deux êtres qui ne se sont jamais rencontrés sauf en état de crise et lors de décisions importantes. Ils ont en commun une seule chose: la peur de se faire mal et se sont rencontrés quelque part entre Mohammédia et Montréal. L'ordre du jour était "La rivière" ou plutôt "Le marécage".
Revenons au second, je l'ai toujours été dans la vie, je l'étais avec mon père, avec mon grand frère (Si Mohamed, celui à qui j'ai toujours voulu ressembler), avec ma mère, bref avec les gens que j'ai aimés. À la mort de mon père, "ce philosophe illettré", j'ai promis de marcher de notre maison jusqu'au cimetière, mais je ne l'ai pas fait. Je me suis levé un matin quand j'ai eu le courage d'y aller. J'ai pris la voiture que ma famille avait mise à ma disposition "pour être indépendant".
Je suis allé dans un "hammam" une espèce de bain "maure". Je voulais être propre en perdant mes cellules "mortes" avant de rencontrer mon père. En sortant j'ai pris la route. Je n'ai jamais été dans un cimetière de ma "vie" et je n'ai jamais perdu quelqu'un d'important. Ma mère m'avait indiqué la route.
Lorsque je suis arrivé devant la grande porte du cimetière, les mendiants se sont rassemblés autour de la voiture. Tout le monde prétendait savoir pour qui j'étais venu, je ne voyais que des visages et des mains tendues. Je n'ai jamais connu la valeur de l'argent au Maroc, mais j'ai souvent pensé que la gentillesse se paie, ainsi que la méchanceté. Je me suis sauvé de ma famille et des amis pour avoir une rencontre en tête-à-tête avec mon père, mais ces mendiants en ont décidé autrement. Ils étaient là, du portail du cimetière jusqu'à la nouvelle demeure de mon père.
Je me suis sauvé de cet endroit et j'ai eu peur d'y retourner et qu'on me voie pleurer. J'ai stationné au bord de la mer, j'ai marché seul dans un coin de cette plage où il n'y avait personne. C'était encore une rencontre entre moi et moi, une situation de crise. En marchant au bord de cette mer qui ne finit jamais, où dans ma jeunesse j'ai vu de l'ancienne demeure de mon père, le soleil mourir chaque jour le soir et se réveiller le jour suivant, je ne comprenais pas que mon père doive se coucher entouré de cette armée de mendiants. J'ai accepté leur volonté de nous déranger dans notre rencontre, et j'ai prié pour qu'ils ne dérangent pas mon père dans sa sieste ou son sommeil pour ce petit montant d'argent car ce n'est pas pour quelques dirhams qu'on peut le déranger.
Mon père est un grand homme, il disait : "Si les généreux vous mettent leurs plus beaux tapis pour vous recevoir, ayez la gentillesse d'enlever vos souliers". Il disait également que "le permis de conduire les voitures était pour les femmes. Moi, je me devais de conduire les camions". J'aurais pu venir le voir en camion au lieu de me faire conduire dans une Mercedes, car les hommes, selon ses dires, conduisent des camions. Plus tard en m'éloignant, je me suis demandé ce que le mendiant, en rentrant chez lui, dirait à ses enfants après une dure journée. Dira-t-il que la journée était bonne parce qu'il y avait beaucoup de morts ? Ou dira-t-il simplement que le cash était mauvais parce qu'il n'y avait pas assez de morts ? Mon père est devenu une marchandise pour le mendiant. Les mendiants, ont-ils pensé un moment qu'ils se nourrissaient de ma tristesse et de mes larmes ? Je déteste la pauvreté, mais pas les pauvres.
J'étais devant la mer et j'ai pleuré tellement pour nourrir ce grand lac avant de revenir voir ma mère. Je n'avais plus envie de retourner au foyer que mon père a quitté et j'avais peur d'aller le voir dans sa nouvelle demeure. L'armée des mendiants m'y attendait et cette peur m'habitait. En entrant dans la maison, la première personne qui s'est présentée à moi m'a regardé dans les yeux. Elle n'a pas osé me dire que l'enfant du Canada était triste car pour elle, nous n'avons pas le droit d'être tristes. La chambre que mon père occupait, là où personne ne pouvait entrer, pas même ma mère qui partageait avec lui cette chambre, demeurait un lieu désert. Ma mère a observé cet interdit car, malgré la mort, cette pièce demeurait son lieu, sa propriété. Elle est restée au rez-de-chaussée, bien qu'on l'ait informée que j'étais de retour. Ma grande sœur m'a dit une chose que je ne pourrais jamais oublier : "Tu sais, c'est toi qui mérites le plus de recevoir la bénédiction de nos parents car je ne t'ai jamais vu crier contre ma mère et mon père".
Il y a de ces hommes qu'on aime citer, Charles Baudelaire disait : "La vie est un hôpital où chaque malade est possédé du désir de changer de lit. Celui-ci croit qu'il guérirait à côté de la fenêtre. Celui-là croit qu'il serait bien à côté du poêle. Il me semble que je serais bien là où je ne suis pas".
Et cette question de lieu reste une question.
Revenons au second. La famille est une pièce, l'homme doit savoir où la mettre. On peut être une très belle bobine, on ne remplace jamais un carburateur. Comme on peut être une belle ampoule pour éclairer, mais malheureusement on ne peut pas être un interrupteur. Le monde est fait de composantes et de composants. Le monde fonctionne avec des éléments et malheureusement c'est l'élément qui forme l'ensemble.
Voltaire disait que : "Ce qui touche le cœur, se grave dans la mémoire."
Ce texte, je l'offre à toute personne qui a perdu un être cher, un proche parent ou tout simplement un nouvel ami...


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