Les transformations démographiques en cours en France, caractérisées par une natalité en baisse conjuguée au vieillissement de la population, devraient peser davantage à l'avenir sur les équilibres budgétaires du pays, a alerté mardi la Cour des comptes française. « Les évolutions démographiques en cours vont affecter puissamment et durablement notre potentiel de croissance, les recettes et les dépenses publiques », prévient la Cour dans son nouveau rapport consacré à l'impact de la démographie sur les finances publiques, appelant à anticiper pour faire face aux défis démographiques. Dans le prolongement d'un rapport sur la situation financière et les perspectives du système de retraites remis au Premier ministre en février 2025, les magistrats financiers ont examiné les grandes évolutions démographiques auxquelles est confrontée la France et leurs conséquences sur les finances publiques, en s'attachant à distinguer leur impact sur la croissance économique, le niveau des recettes publiques et la structure des dépenses et des besoins collectifs. Constatant leur faible prise en compte par les documents budgétaires et les diverses lois de programmation pluriannuelles, la Cour appelle à « les anticiper pour éviter que les réformes nécessaires n'interviennent trop tard et sous la contrainte de l'urgence ». D'après le rapport, la France est confrontée à des transformations démographiques profondes, marquées par deux tendances centrales : La première est un vieillissement de la population, résultant de l'arrivée des générations nombreuses du baby-boom aux âges seniors et de l'allongement de l'espérance de vie. La seconde est une baisse rapide de la natalité. Lire aussi : France : le Sénat s'oppose à la surtaxe sur les bénéfices des grandes entreprises Ces tendances, longtemps atténuées par ce qui a pu être décrit comme une spécificité démographique française, convergent désormais vers celles observées dans le reste de l'Europe, relève le document. Dans le détail, la Cour fait observer que la part des personnes âgées de 65 ans et plus est passée de 16,3 % en 2005 à 21,8 % en 2024. L'indice conjoncturel de fécondité s'élevait à 1,62 enfant par femme en 2024, ce qui est inférieur au seuil de renouvellement des générations. Le solde naturel de la population, c'est-à-dire la différence entre les naissances et les décès, est devenu négatif en mai 2025. Selon les prévisions centrales de l'Insee, la population française devrait atteindre 70 millions d'habitants vers 2040, avant de retomber à 68 millions en 2070. Dans le même temps, les plus de 75 ans passeraient de 7,3 à 11,2 millions, tandis que la population en âge de travailler (20-64 ans) diminuerait de 38 à 34,6 millions. Pour la Cour des comptes, le vieillissement de la population française risque de peser sur le potentiel de croissance de l'économie à travers « un tassement de la productivité globale et de l'innovation et des comportements d'épargne », tandis que la contraction de la population en âge de travailler (20-64 ans) exercera de surcroît « une pression inédite sur le niveau des recettes publiques et le financement de la protection sociale ». Alors que les dépenses publiques sensibles au vieillissement représentent déjà plus de 40 % des dépenses publiques en 2023 et les retraites 14 % du PIB (contre 11,5 % en moyenne dans la zone euro), la Cour estime qu'à l'avenir, ces dépenses « devraient encore progresser sous l'effet de la dégradation de la santé et de la perte d'autonomie des générations du baby-boom ». Et d'ajouter qu'« à dépenses publiques par tête inchangée, la déformation de la pyramide des âges conduirait, toutes choses égales par ailleurs, à ce que les dépenses publiques atteignent 60,8 % du PIB en 2070, soit un niveau équivalent à celui atteint au pic de la crise sanitaire du Covid ». La Cour qui juge à cet égard que les effets budgétaires des évolutions démographiques sont peu analysés et articulés avec la programmation budgétaire, invite les pouvoirs publics et les partenaires sociaux à « se saisir des défis que soulève la démographie pour l'avenir des finances publiques ».