A Marrakech, le mémorial en mémoire des juifs et LGBTQ+ victimes de l'Holocauste fait encore parler de lui. Alors qu'il a été détruit hier par les autorités locales, la section locale de l'Association marocaine des droits humains révèle que l'association en charge du projet n'en serait pas à sa première tentative de propagande pour une normalisation avec Israël. Au lendemain de la destruction du mémorial consacré à des juifs et LGBTQ+ victimes de l'Holocauste, érigé dans la commune rurale d'Aït Faska (Marrakech), les protestations de PixelHelper en charge du projet n'ont pas pu freiner les autorités, même en affirmant avoir obtenu une autorisation de construction. Sur la page de l'association allemande, celle-ci réclame désormais des dommages et intérêts à l'Etat marocain, expliquant avoir travaillé «avec dix employés depuis plus de 365 jours». Selon elle, cette destruction génère des «dégâts d'environ 100 000 euros», et un appel aux dons a été lancé. Précédemment contacté par Yabiladi, le fondateur de PixelHelper, Oliver Bienkowski, a assuré que le projet avait «reçu les autorisations nécessaires». Le projet aurait été présenté comme un espace touristique Le soir même de la destruction du mémorial, la section locale de l'Association marocaine des droits humains (AMDH) à Marrakech a réagi aux faits, contredisant la version du fontadeur de PixelHELPER, rapportée vendredi dernier par Yabiladi. Dans un communiqué parvenu à notre rédaction, l'association explique que si PixelHELPER avance avoir obtenu des autorisations, elle aurait en tout cas fait la promotion de son projet comme étant un projet «touristique, avec des espaces de loisirs profitant à la population locale». Selon des informations reccueillies sur le terrain, l'AMDH révèle que PixelHELPER n'en serait «pas à sa première tentative» pour un tel projet qu'elle estime porteur d'«objectifs politiques relevés par les associations anti-normalisation avec l'entité sioniste». Contactée ce mardi par Yabiladi, la présidente de la section locale de l'association marocaine, Awatif Trii révèle que «l'ONG allemande a initialement tenté d'acquérir un terrain dans la commune d'El Ouidane, près de Marrakech». Confrontée à la population locale qui aurait refusé de le lui vendre en «soupçonnant des incohérences dans la manière dont les choses ont été présentées», le site aurait été finalement déplacé vers Aït Faska. Selon l'AMDH, PixelHELPER aurait «exploité la pauvreté des habitants en faisant travailler des locaux sur le chantier du mémorial, en fournissant des aides alimentaires aux familles et en mettant en place un terrain de football pour les enfants du village qu'elle a rapprochés en organisant des matchs», parallèlement à d'autres initiatives comme «la construction d'un point d'eau». L'AMDH accuse l'ONG allemande de normalisation avec Israël Pour Awatif Trii, cette approche se serait apparentée à une forme de «prosélytisme visant à profiter de la bonne foi des villageois pour les faire adhérer à un projet aux dimensions politiques, à leur insu». Les témoignages recueillis sur place par l'AMDH indiquent également que «le mémorial a accueilli de temps à autres des visiteurs étrangers, que les locaux ont vu pratiquer des rituels spécifiques». Mais l'association considère que «le peuple marocain ne peut pas être concerné par un tel mémorial» car «il n'a pas été partie prenante» dans les crimes de l'Holocaute. Par ailleurs, l'Association marocaine des droits humains à Marrakech met en doute la version des autorités. Elle explique qu'«il est inconcevable qu'un ouvrage d'une telle ampleur soit érigé sans que les pouvoirs locaux ne le sachent». Ne s'attardant pas sur une possible corruption localisée, l'AMDH préfère considérer qu'une telle initiative «renforce une forme de normalisation sioniste, en contradiction avec le soutien connu des Marocains à la cause palestinienne». C'est pour cette raison que la section de l'AMDH à Marrakech estime que «le processus ne s'arrête pas à la démolition sous prétexte d'absence d'autorisations». Elle exige d'«affronter fermement toutes formes de normalisation avec l'entité sioniste, quelle qu'en soit la source». Aussi, l'association réclame une enquête permettant d'«identifier les organismes qui ont été chargés de fournir le terrain pour ce projet» et de prévoir des sanctions juridiques à leur encontre, ainsi que ceux «ayant failli à leurs fonctions de faire respecter la loi». Selon elle, les investigations devront également faire la lumière sur les sources de financement du projet, en particulier les dons et les contributions de «partis exploitant les crimes nazis et prenant l'Holocauste comme un argument de normalisation pro-sioniste». Article modifié le 2019/08/27 à 14h37