Sebta : Début du transfert de mineurs marocains isolés vers la péninsule ibérique    Un accord commercial entre l'UE et le Maroc intégrant le Sahara soumis au vote le 1er octobre    Au Medfest 2025, l'ambassadeur Youssef Balla confirme l'implication de Rabat dans un câble sous-marin Maroc–Allemagne «qui devrait couvrir près de 5 % des besoins énergétiques de la République fédérale»    Le Prince Moulay El Hassan préside l'ouverture de la 16e édition du Salon du cheval d'El Jadida    (Compétitions africaines) Nos trois clubs frappent fort sur la scène continentale : L'OCS en démonstration, les FAR en maîtrise, la RSB en confiance    Arrestation d'un individu pour diffusion de montages vidéos de manifestations étrangères avec des protestations au Maroc    Rassemblements suite à des appels anonymes : l'intervention des forces publiques a été équilibrée    Un spectacle de drones illumine le site archéologique du Chellah à Rabat    Le Maroc et la Jordanie engagent un projet de jumelage entre la ville de Salt, capitale du gouvernorat de Balqa, et les cités impériales de Fès et Meknès    Accréditation internationale. Sami El Omari : ''Un gage d'excellence et d'ouverture''    Marsa Maroc annonce une croissance de 23 % du résultat net au S1 2025    Retraités de l'enseignement : La CMR accélère le paiement des pensions    Al Barid Bank : un premier semestre marqué par des résultats records    Tanger : Arrestation du frère du baron de la drogue El Ballouti    France : Un investisseur saoudien au Maroc condamné dans l'affaire Nicolas Sarkozy    Manifestations Gen Z 212 au Maroc : Des partis critiquent la répression et appelle au dialogue    Electricité : Cegelec décroche des marchés de 2 MMDH aux Emirats et en Arabie saoudite    Interview avec Xavier Driencourt : « Il n'y a plus rien à attendre du régime algérien » [INTEGRAL]    Le moment de vérité au Conseil de sécurité des Nations Unies : pour une reconnaissance pleine et entière de la marocanité du Sahara    La Cour nationale d'Espagne refuse l'asile à un Marocain non musulman    Mondial U20 : Le Maroc bat l'Espagne à son premier match    CDM U20 : Ouahbi premier coach utilisateur du carton vert    CDM U20 / J1 : Le Maroc en tête du groupe C    Manifestation «Gen Z» à Casablanca : arrestation de 21 jeunes après le blocage de l'autoroute    « Final lap » de l'Exécutif...    Manifestación «Gen Z» en Casablanca: arresto de 21 jóvenes tras el bloqueo de la autopista    Mundial Sub-20: Marruecos vence a España en su primer partido    Saudi investor active in Morocco sentenced in Sarkozy case    Cannabis licite : La surface cultivée double et passe à 1.347 hectares à Chefchaouen    Sidi Bennour : Lutte contre l'absentéisme des élus locaux, le gouverneur brandit l'article 67    Tourisme : Plus de 17,13 millions de nuitées à fin juillet    Ma plume saigne pour Gaza!    Programmation compétitive : 1337 s'offre le trophée du MCPC    Industries manufacturières : baisse de l'indice des prix à la production de 0,1% en août    Incendies en Espagne: 34,5 millions d'euros pour la restauration des zones sinistrées    Ebola fait 42 morts en RDC depuis fin août    Maroc – Bahreïn : 30.000 billets déjà vendus pour le match amical à Rabat    Des averses orageuses attendues mercredi et jeudi dans certaines régions    Walid Regragui dévoilera sa liste jeudi avant les matches contre Bahreïn et le Congo    10KM International WeCasablanca : Une édition réussie pour Casablanca capitale sportive    Poids lourds : Le Maroc, 3e importateur dans la région MENA    Rencontres de la Photographie : Dakhla au cœur de la commémoration de la Marche Verte 2025    Guinée. Rendez-vous aux urnes le 28 décembre    Classement Stanford 2025 : l'UEMF place huit de ses scientifiques parmi les 2% les plus influents    Saïd Jedidi, la voix espagnole de la télévision marocaine, tire sa révérence    MAGAZINE : Jimi Hendrix, d'ange heureux    Sidi Bennour: L'INSAP annonce d'importantes découvertes archéologiques sur le site d'Al-Gharbiya    Gad Elmaleh sans filtre à Casablanca : entre rires, confessions et émotions    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Adieu Hédi !
Publié dans Albayane le 27 - 03 - 2012

Hédi Guella nous a quittés cette semaine. A sa manière sur les pointes des pieds ! Pour ne pas nous déranger ! Comme à son habitude, il était discret et délicat avec nous ! Lorsque les voix se levaient dans les grandes discussions sur le meilleur des mondes ! Il ne quittait pas les salles enfumées tellement il adorait la compagnie des autres ! Ni ne demandait qu'on se taise pour écouter la voix du poète ! Il était très raffiné pour le faire ! Mais, se perdait dans ses pérégrinations et probablement partait en quête d'un air pour un poème qu'il avait en tête depuis quelques jours ! Hédi avait la grâce et la sensibilité des poètes ! Même ses rares colères ne duraient qu'un instant avant qu'il ne reparte nous expliquer un nouvel air ou une nouvelle ballade ! Son départ était à l'image de sa vie tout en douceur et en délicatesse afin de ne pas troubler ses amis et qu'il chérissait par-dessus tout !
Comme toute une génération nous avons connu Hédi Guella et sa voix douce et profonde dans les années 1970 lorsqu'il était étudiait en France. Il avait alors comme tous les jeunes rejoints les luttes des travailleurs immigrés en France et le combat du peuple palestinien. Mais, plus globalement il avait fait sien le combat de la gauche contre les régimes autoritaires et les mamelouks des temps modernes. C'est à cette époque que nous sont parvenus ses premières chansons comme « Babour Zammar », dont les paroles ont été écrites par Am Kmaies, travailleur immigré installé dans la ville de Grenoble et poète et artiste à ses heures perdues. Mais, Hédi sera aussi un des premiers à s'attaquer à la nouvelle poésie arabe et à des poètes comme Mahmoud Darwiche ou Samih Al-Kacem. Les mélodies de Hédi Guella nous parvenaient à l'université dans des cassettes sous les manteaux. Elles sont devenues rapidement des hymnes pour la jeunesse révoltée. Mais, surtout Hédi avec ses mélodies et son engagement sera le père fondateur de la chanson engagée ou militante tunisienne. Beaucoup de groupes et de chanteurs vont apparaître dans son sillage comme feu Hamadi Ladjimi, Mohamed Bhar, la troupe des colombes blanches ou un peu plus tard celle de la recherche musicale de Gabès. Cette chanson tunisienne engagée s'inscrivait dans un courant arabe dont les porte-drapeaux étaient Cheikh Imam Issa et Marcel Khalifé. Mais, cet engagement artistique s'inscrivait dans un bouillonnement et dans l'effervescence politique de la gauche démocratique et ses luttes contre les régimes autoritaires dans le monde arabe. Ces chanteurs animaient les grands rassemblements politiques et des milliers de jeunes et d'étudiants reprenaient à l'unisson leurs chansons et leurs hymnes portées par cette espérance collective d'une fin de la dictature et de l'injustice.
Hédi connaîtra son heure de gloire à la fin des années 1970 et au début des années 1980. Le public tunisien a fini par le voir en public au théâtre de Carthage lors de la fameuse soirée de la poésie arabe en 1977 en présence des monstres sacrés de la poésie arabe : Mahmoud Darwiche et Nizar Kabani. Plus tard et avec la petite parenthèse démocratique du gouvernement Mzali au début des années 1980, Hédi est revenu en Tunisie et a animée quelques soirées mémorables dans les différents festivals. On se rappellera tous de cette fameuse émission de télévision en 1981 sur la chanson engagée où avec Marcel Khalifé et Anouar Brahem, il a tenu la dragée haute au maître incontesté de la musique tunisienne Ali Sriti médusé par l'audace de ses héritiers et leur rejet de sa thèse sur la neutralité de la musique et de l'art.
Plus tard, les années 1990 seront celles d'une traversée du désert de l'artiste. Une traversée qu'il a faite à sa manière en silence et en se réfugiant dans son monde intérieur rempli de poésie, de rythmes et surtout de grâce et d'émotion. C'est à cette période que j'ai côtoyé Hédi comme on l'appelait tous. Il avait déserté le monde des artistes et des galas pour exercer le métier qu'il a appris à l'université, l'interprétariat. Il était de toutes les grandes réunions des cénacles onusiens et j'aimais le retrouver le soir pour échapper aux grandes joutes des responsables politiques pour me réfugier avec lui dans le monde des poètes. Il acceptait de m'ouvrir et comme à son habitude sur les pointes des pieds sur une part de son âme et de son cœur. Il me parlait de sa famille qu'il chérissait, de ses amis palestiniens et à leur tête le plus célèbre d'entre-eux Abou Ammar, de ses démêlées avec le régime contre-culturel qui sévissait chez nous et qui lui interdisait les festivals et les rencontres avec le public. De ses rencontres où Hédi se laissait aller à parler presque en chuchotant par timidité de son quotidien que je me rendais compte de cette fragilité de la vie des poètes mais aussi de cette grande fierté et de leur grandeur d'âme. Nos dîners se prolongeaient souvent tard dans la nuit et lorsque les restaurants se vidaient de leurs derniers clients c'est le moment où Hédi retrouvait toute sa magie et me lisait ses derniers poèmes ou me fredonnait ses dernières compositions. Parfois, je m'approchais des cabines d'interprétariat et je regardais secrètement Hédi. Je voulais voir comment ce poète pouvait accepter cette vie de routine ! De loin je le voyais, il était perdu dans ses pensées avec un regard qui scrute l'horizon ! Secrètement, comme à son habitude, peut-être était-il en train de pester contre cet Orient qui laisse des poètes de sa trempe se démêler avec le quotidien et offre à des artistes de seconde zone gloire, reconnaissance et notoriété. Plus tard, Hédi s'est de nouveau mis à écrire de nouvelles mélodies. Elles étaient empreintes de nostalgie et de mélancolie. Elles étaient intimistes comme celles de Mahmoud Darwiche après les refus successifs de son cœur de porter sa tristesse et son chagrin. C'était aussi comme un retour aux sources et Hédi ne cessait d'évoquer ses dernières années son père Am Hassen Guella le grand chanteur de musique religieuse. Comme si doucement il se préparait à le rejoindre et nous préparait, nous qui l'avons aimé et qu'il chérissait, à son départ !
Hédi est parti sur les pointes du pied comme à son habitude ! Il a eu au moins le temps de voir la chute des despotes. Que les temps seront longs en son absence et sa présence douce et délicate nous manquera ! Mais, il continuera à nous accompagner dans cette transition difficile avec sa voix douce profonde et à nous donnera espoir avec ses mélodies sensuelles et charnelles.
* Economiste et intellectuel arabe


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.