Le détroit d'Ormuz, passage stratégique reliant le golfe persique au golfe d'Oman et par lequel transite le tiers du pétrole transporté par voie maritime dans le monde, a été le théâtre, pour la deuxième fois en l'espace de deux semaines, de tensions entre des bâtiments de la marine américaine et des navires de la flotte iranienne. En effet, à la fin du mois d'Avril, trois navires iraniens d'attaque rapide s'étaient approchés à moins de 70 mètres de deux bateaux américains qui croisaient dans les eaux internationales du nord du Golfe persique ; ce qui avait contraint ces derniers à tirer des coups de semonce. Ce dernier incident qui est le deuxième depuis que Washington et Téhéran, qui n'entretiennent plus de relations diplomatiques depuis 1980, ont commencé à mener des discussions « indirectes » sur les conditions d'un retour des Etats-Unis dans l'accord de Vienne sur le nucléaire iranien, a été révélé, ce lundi, par John Kerby, le porte-parole du Pentagone lorsqu'il a annoncé que, la veille, un navire de la US Navy avait procédé à une trentaine de tirs de sommation en deux salves pour éloigner 13 vedettes d'attaque rapide des Gardiens de la Révolution qui s'étaient approchées à moins de 140 mètres d'un groupe de sept bâtiments de la flotte américaine déployés dans le détroit d'Ormuz à l'effet d'escorter le sous-marin lanceur de missiles Georgia et parmi lesquels se trouve l'USS Monterrey. Ainsi, d'après le porte-parole du département d'Etat, la riposte américaine entrerait dans le cadre de « la légitime défense (car) le harcèlement de la part des gardiens de la révolution n'est pas un phénomène nouveau », reste « dangereux » et peut donner lieu « à des erreurs d'appréciation ». De leur côté, les Gardiens de la Révolution, armée idéologique de la République islamique d'Iran, ont officiellement condamné, dès le lendemain, le comportement « non professionnel » de la marine américaine dont les hélicoptères ont survolé, sans aucune valable raison, les « eaux territoriales » iraniennes et les navires procédé à « des tirs de signaux lumineux et à des tirs provocateurs » en direction d'appareils iraniens bien que ces derniers respectaient « la distance règlementaire ». Aussi, en mettant en garde, dans un communiqué, la U.S. Navy contre tout « comportement risqué », les forces maritimes iraniennes ont saisi cette occasion pour signaler qu'elles se tiennent prêtes « à répondre de manière décisive et courageuse à toute erreur de calcul » qui proviendrait du côté américain. Ce nouvel incident survient au moment où les grandes puissances, encore parties au Joint Comprehensive Plan of Action (JCPoA) signé à Vienne en Juillet 2015 et encadrant le programme nucléaire iranien, tentent, tant bien que mal depuis début-avril, de réactiver un accord moribond depuis que le retrait unilatéral des Etats-Unis en 2018 avait donné lieu au rétablissement de lourdes sanctions américaines contre la République islamique d'Iran qui, par ricochet, s'était vu en droit de commencer à s'affranchir, dès 2019, de tous les engagements qu'elle avait pris dans le cadre dudit accord. Est-ce à dire, au vu de ce qui précède, que l'arrangement conclu avec l'Iran, en Juillet 2015, à Vienne, par les cinq membres permanents du Conseil de Sécurité de l'ONU et l'Allemagne au titre de l'encadrement de son programme nucléaire et balistique a beaucoup moins de chances de renaître de ses cendres que de tomber à l'eau et de s'y engouffrer complètement ? Attendons pour voir... Nabil EL BOUSAADI