Parlement : le Code de procédure pénale adopté dans une ambiance électrique    Chambre des Conseillers: Haddad s'entretient avec le vice-Premier ministre, ministre de l'Energie de la République de Tanzanie    Orange Maroc, partenaire engagé de REACT 2025 pour une industrie marocaine décarbonée    Marsa Maroc crée "Ports4Impact" pour porter son engagement RSE    Kia ouvre un nouveau showroom à Laâyoune    La CGEM tient la première édition du Carrefour de la TPME autour du thème : « Inspirer pour transformer »    RDC : Un Casque bleu marocain décédé suite à un accident périlleux    MINUSRO : Face à la menace d'un retrait américain, l'Allemagne renforce sa contribution financière    Routes commerciales : Rabat s'arrime au corridor indo-américain [INTEGRAL]    Fondation du Théâtre Royal de Rabat : Lalla Hasnaa préside le premier conseil d'administration    National "Amateurs"/J29 : Wydad Temara et Amal Tiznit promus en Botola DII !    CAN U20 : Le Maroc bat l'Egypte et se qualifie pour la finale    CAN U20 / Jour de la demi-finale ''Egypte - Maroc'' : Horaire ? Chaînes ?    FRMF : Le Wydad sanctionné !    Anniversaire de la création de la DGSN : 69 ans de dévouement au service de la patrie et des citoyens    Sous l'égide de SAR la Princesse Lalla Hasnaa, le Théâtre Royal de Rabat amorce un nouveau chapitre d'excellence culturelle    Parution : « Juste une dernière » de Wiam El Khattabi    La Princesse Lalla Hasnaa préside la 1re session du Conseil d'Administration de la Fondation du Théâtre Royal de Rabat    France : Des messages islamophobes et néonazis dans le centre-ville et le campus d'Orléans    Les Emirats investiront 1.400 milliards de dollars aux Etats-Unis sur 10 ans    Le Nigeria à la conquête de l'espace    Afrique centrale et de l'Ouest. La famine menace    Les initiatives stratégiques lancées par le Maroc en faveur de l'Afrique présentées à Johannesburg    Maroc : Mehdi Bensaid prône l'élargissement de l'action de la HACA aux réseaux sociaux    Compétitivité logistique : Les points clés du Logismed 2025    Standard Chartered s'installe au Maroc et ouvre un bureau de représentation à CFC    Dacia Maroc lance la commercialisation du Bigster : Dacia en grand    Morocco wins three medals at World Cadet Taekwondo championships    Mazraoui : Une finale européenne pour sauver la saison    Le comité directeur du Wydad s'apprête à nommer Benhachem entraîneur officiel du club    Sahara-CIA files #32 : Quand la Mauritanie a misé sur un Etat au Sahara pour l'isoler du Maroc    ANEF : Plus de 300 incendies recensés au Maroc en 2024    Moroccan couple's baby trafficking case : Italian court upholds custody, disturbing revelations    Ancient cemeteries and rock art unearthed in Tangier reveal rich prehistoric past    Trafic de bébés du Maroc : La justice italienne maintient les détentions, vu les révélations    69e anniversaire de la Sûreté nationale : Un engagement constant au service du citoyen    Sous le leadership de SM le Roi, le Maroc est un acteur « stratégique » pour la stabilité en Afrique    De Tanger à Pékin : le livre Ainsi j'ai connu la Chine révèle la profondeur des liens historiques entre le Maroc et la Chine    INSMAC: À Rabat, un institut pour former les talents de demain    L'Italie, invité d'honneur du 28è Festival de Fès des musiques sacrées du monde    Théâtre: Casablanca accueille la 3ème édition du Tournoi international d'improvisation    Agriculture de précision. Bruno Tisseyre : "Mutualiser les approches pour démontrer les avantages des techniques digitales"    African Lion-2025 : coopération satellitaire entre les forces armées royales et les forces spatiales américaines à Agadir    Deux parachutistes israéliens blessés au Maroc lors de l'exercice «African Lion»    Crédit du Maroc s'apprête à lever jusqu'à un milliard de dirhams par emprunt obligataire subordonné    Massive Qatari Investments in the United States Surpass One Trillion Dollars During Trump's Visit to Doha    Découverte de trois nécropoles préhistoriques et de peintures rupestres sur la presqu'île de Tanger    Leila Slimani at Cannes 2025 : «We laugh, even when part of the world is in darkness»    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



David Castillo : l´énergie de l´excès
Publié dans Aujourd'hui le Maroc le 12 - 12 - 2003

Le poète catalan David Castillo donne une conférence, lundi 15 décembre, à l'Institut Cervantès de Rabat à 19 h. Il compte parmi les plus grands dans la poésie espagnole contemporaine. Dans un texte enflammé, véritable chevauchée lyrique, son ami le poète marocain Larbi El Harti nous le présente.
La poésie de David Castillo n'est ni plate, ni réconfortante. Elle n'est pas non plus politique, et encore moins marginale ou amoureuse. Il ne s'agit pas d'une création bourgeoise qui émane d'un esprit adolescent, galvanisé dans sa révolte par la lecture de quelques poèmes de Rimbaud, Baudelaire ou le Péruvien maudit César Vallejo. Esprit indomptable, David Castillo s'inscrit en faux contre la supposée logique d'une société en quête d'identité. Une société perdue dans un vain combat d'éthique, dépendante d'une esthétique plus médiatique que profonde. La sienne - son esthétique - concentre l'esprit ambigu et paradoxal, rebelle et riche en nuances du XXe siècle. Sa poésie intègre d'une manière subtile les grandes transformations de la pensée occidentale, en s'attachant à l'interaction entre les différentes références culturelles, allant de la Bible jusqu'au rock, de l'existentialisme aux inquiétudes sociales les plus dérangeantes pour la pensée unique – dont le vrai souci est la consommation.
La littérature de David Castillo est indissociable de l'engagement de son auteur. Il connaît l'idéologie, parce qu'il a souffert de ses travers. Il n'ignore rien de ses manœuvres de séduction. Il sait que l'idéologie est une mante religieuse. Armé d'un miroir, David Castillo la regarde bien en face pour lui renvoyer une image hideuse. Il a fini par se lasser de ce jeu de m'as-tu vue. Aujourd'hui, il a banni les idéologies de son monde, conscient qu'elles conduisent à l'embaumement de la pensée, et partant de la liberté. C'est de cette lucidité d'homme qui a suffisamment lu et qui a beaucoup vécu qu'il nourrit son esprit épique. S'il le pouvait, il détruirait le pseudo carcan logique qui tient le monde, convaincu que toute raison est bâtie à l'aide d'une argile où entrent des matériaux de légitimation de souffrances découlant d'une injustice. Pour lui, être aux cotés de ceux qui souffrent est plus logique qu'être avec ceux qui détiennent en otage la raison.
La poésie et les romans de David Castillo se structurent et se construisent autour de Barcelone. Dans ses écrits, cette ville apparaît comme un creuset de conflits. Un tissu où se croisent des références culturelles et sociologiques composites. Une ville méditerranéenne avec une vocation universelle, mais qui a le mal du troisième millénaire. Elle est marquée par les lois de Dieu, le rationalisme, les ruines, les échecs des idéologies, le rock, le jazz, le rai, la pensée des surhommes, mais aussi celle de simples hommes méprisés, des marginaux qui se savent morts et qui cherchent vainement du plaisir dans leurs doses quotidiennes d'héroïne, de cocaïne et de crack, des filles révolutionnaires converties à la prostitution, des travestis, des folles à l'affût des fruits corrompus jetés par des pateras. Des personnages qui n'ont que faire du passé, du pourquoi, et de demain.
La Barcelone de David Castillo est une ville réelle, qui fait l'effet d'une gifle cinglante, mais elle reste inconnue de la majorité des Barcelonais : quartiers déprimés, pris d'assaut par les émigrés, des espaces industriels peuplés par une mécanique anonyme et triste, des faubourgs avec des baraques improvisées à l'aide des déchets d'une société de consommation anesthésiée par la sainteté du bien-être. Il ne s'agit pas d'une Barcelone physiquement tangible, mais, par le biais de la littérature, elle est émotionnellement et culturellement réelle.
La poésie de David Castillo se distingue aussi par une bonne dose d'inattendu. Elle transforme des aspects peu courants en phénomènes habituels. Ses textes sont forgés par des réalités manipulées par les documentaires et les informations véhiculées par les mass media : un monde hanté par des passions indolentes et fugaces, sans espoir, où demeurent des esprits expressément dissous, pourris, éclatés par les gardiens de l'ordre, dans des commissariats, des casernes, des banques et des bureaux où se prennent “les grandes décisions“.
Il s'agit d'une poésie écrite sans morale, sans engagement grandiloquent, sans rupture apparente. Mais elle s'élève contre ceux qui représentent la partie dite “civilisée“ de la société. Les soubassements de cette civilisation ont partie liée avec la culture du Nouveau Testament dont l'écriture de David Castillo est imprégnée. Dans le recueil “Game Over“, par exemple, les apôtres Lucas et Mathieu sont les guerriers anarchistes sans dignité qui combattent le franquisme, les idéologies, le fléau militaire, les mentalités provinciales et superstitieuses.
Ce poète catalan, ex-anarchiste, connaisseur des bagnes de la honte, humain jusqu'au bout des ongles, iconoclaste et moderne à la fois, est pétri dans la pâte éphémère de la poésie. Celle qui se crée et se détruit, mais ne tend jamais vers la miséricorde circonstancielle – emblème de notre ère plus esthétique que morale.
Par Larbi El Harti
* Poète


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.