Le groupe américain Boeing assoit sa présence dans l'industrie aéronautique marocaine en élargissant ses collaborations industrielles et techniques. Dans le cadre d'un partenariat stratégique avec Safran, la coentreprise Morocco Aero Technical Interconnect Systems Aerospace, située à Nouaceur, produit des faisceaux de câblage destinés à équiper des avions de nouvelle génération. Boeing soutient également le développement d'un centre avancé de recherche en ingénierie manufacturière dans le royaume, en lien avec ses besoins de production et de services. Selon des propos accordés par son directeur général pour l'Afrique, Henok Teferra, le Maroc réunit des conditions industrielles favorables et dispose d'un vivier de compétences reconnu. L'avionneur cherche à approfondir les synergies locales dans les domaines de la fabrication de composants, de l'ingénierie et des services techniques. Un réseau panafricain en expansion Le groupe, actif depuis plus de 75 ans sur le continent, coopère avec près de 60 transporteurs africains exploitant environ 500 appareils Boeing, ce qui représente approximativement 70 % de la flotte commerciale en service en Afrique. Ce partenariat de long terme a été renforcé en mars 2024 par une commande d'Ethiopian Airlines portant sur huit Boeing 777-9, assortie de douze options supplémentaires — une première pour une compagnie du continent. L'année 2024 a vu la livraison de sept appareils à différentes compagnies africaines, parmi lesquels quatre 737 MAX et trois 787 Dreamliner, destinés à Air Tanzania, au gouvernement tanzanien, à Ethiopian Airlines et à Royal Air Maroc. En janvier, TAAG Angola Airlines a reçu son premier 787 Dreamliner, marquant un jalon important pour la compagnie nationale angolaise. Soutien aux filières locales et aux métiers de l'aérien Boeing ne se limite pas à la vente d'avions : l'entreprise collabore activement au développement d'infrastructures locales et de compétences techniques. À Addis-Abeba, elle accompagne Ethiopian Airlines dans la mise en place d'un atelier de production de faisceaux électriques. Un autre site, issu d'un partenariat avec le fournisseur italien Geven-SkyTecno, fabrique des isolants acoustiques et thermiques pour le 737 MAX. En Afrique du Sud, Aerosud assemble des pièces de structure pour le compte de Boeing. «Nous cherchons à faire émerger des capacités industrielles pérennes, capables de soutenir une activité aéronautique autonome, ancrée dans les réalités africaines», a déclaré M. Teferra. Un ciel africain encore morcelé Malgré ces avancées, le transport aérien en Afrique demeure freiné par des charges d'exploitation élevées, des infrastructures inachevées et des mesures protectionnistes persistantes. Boeing soutient la pleine mise en œuvre du Marché unique du transport aérien africain (SAATM), qu'il considère comme essentiel à la fluidité des échanges et à la réduction des coûts. «Le déploiement complet du SAATM suppose une coordination étroite entre Etats, régulateurs et transporteurs. Nous accompagnons cet effort collectif à travers un dialogue constant avec les autorités concernées», a indiqué M. Teferra. Le financement, pierre angulaire de l'essor aérien L'accès aux financements reste un défi majeur pour les compagnies africaines. Pour y remédier, Boeing propose une offre d'accompagnement à travers sa filiale Boeing Customer Finance. Celle-ci apporte des conseils en structuration financière, évaluation des risques, et met en relation les compagnies avec des bailleurs tels que la Banque africaine d'import-export (AfreximBank) ou l'Export-Import Bank des Etats-Unis (EXIM Bank). L'entreprise encourage également une évolution des politiques nationales en matière de financement aéronautique, en lien avec des acteurs comme le Airline Working Group, qui évalue la conformité des législations avec la Convention du Cap, outil juridique fondamental pour la sécurisation des investissements aéronautiques. Un accord signé en 2024 avec le ministère nigérian de l'Aviation et du Développement aérospatial illustre cet engagement : il vise notamment à faciliter l'accès au crédit-bail et au financement d'équipements neufs pour les compagnies du pays. Une présence éducative et sociale étendue Au-delà de ses activités industrielles, Boeing intervient également dans la formation aux métiers de l'aérien et la sensibilisation aux sciences et technologies. L'entreprise coopère avec des institutions universitaires telles que l'Institut de technologie d'Addis-Abeba ou l'Université du Caire pour encourager la recherche et la formation de spécialistes. Ses programmes éducatifs et sociaux, déployés dans 17 pays, abordent des thèmes allant de l'enseignement scientifique à l'entrepreneuriat, en passant par la promotion des carrières féminines dans l'aéronautique. Ils sont conduits en partenariat avec des associations locales et des organismes éducatifs de référence, notamment en Côte d'Ivoire, au Ghana et au Soudan. «Notre ambition est de contribuer à une filière aéronautique africaine complète, structurée autour de savoirs, de compétences et de projets portés localement», conclut M. Teferra.