Des sources bien informées ont indiqué au journal Hespress que des services de sécurité, de la Gendarmerie royale ainsi que des inspections du travail à Casablanca ont reçu plusieurs plaintes émanant d'ouvriers du secteur du bâtiment. Ces derniers dénoncent le comportement de certains entrepreneurs qui se sont soustraits au versement du paiement du salaire de l'Aïd , après avoir subitement disparu, à seulement quelques jours de la fête, de plusieurs grands chantiers situés à Zenata, dans le pôle financier, à Bouskoura et à Nouaceur. Ces disparitions ont laissé des dizaines d'ouvriers sans les salaires qui leur étaient dus. Selon les mêmes sources, certains d'entre eux disposaient de chèques de leurs employeurs, qui se sont avérés sans provision. Par ailleurs, plusieurs promoteurs immobiliers se retrouvent aujourd'hui dans l'obligation de régulariser les salaires de ces ouvriers, après que les sous-traitants, avec lesquels ils avaient signé des contrats, ont manqué à leurs engagements. Les mêmes sources révèlent également l'implication d'entrepreneurs opérant dans le cadre de contrats de sous-traitance avec des entreprises de matériaux de construction, auprès desquelles ils se sont procuré des marchandises et équipements sans en régler les factures. Et ce, malgré le fait qu'ils avaient eux-mêmes reçu le paiement de leurs prestations de la part des sociétés immobilières donneuses d'ordre. Cette situation a provoqué une vive colère et un climat de tension, d'autant plus que le règlement des salaires et indemnités constitue une tradition bien ancrée dans le secteur à l'approche de l'Aïd al-Adha. L'interruption du paiement des salaires a entraîné l'arrêt temporaire de plusieurs chantiers ces derniers jours. Certains entrepreneurs se sont justifiés en affirmant qu'ils accomplissaient les rites du pèlerinage à La Mecque, promettant de résoudre les problèmes de salaires suspendus à leur retour. D'autres entrepreneurs, actifs dans les domaines des grands travaux, des raccordements à l'eau et à l'électricité, de l'aménagement, de la menuiserie ou encore de la plomberie, ont quant à eux prétendu être partis à l'étranger pour raisons médicales. Ils ont fermé leurs téléphones portables, coupant ainsi tout contact avec les ouvriers travaillant pour eux. Face à cette situation, certains maîtres d'ouvrage ont été contraints de prendre en charge, à titre provisoire, les salaires des ouvriers employés par les entreprises de sous-traitance, afin d'éviter l'arrêt des travaux après les congés de l'Aïd. Selon les mêmes sources, cette prise en charge s'est faite sous condition de la saisie des équipements et des marchandises appartenant aux entreprises concernées, restés sur les chantiers, et de la déduction des frais avancés sur les prochaines échéances financières prévues dans les contrats de sous-traitance. Le secteur du bâtiment traverse actuellement une crise aiguë, marquée par une flambée des salaires et une pénurie de main-d'œuvre qualifiée. Ce double phénomène a fortement ralenti la cadence d'exécution des projets d'infrastructures et de logements. Cette pénurie est due à plusieurs facteurs, notamment l'exode des ouvriers vers des chantiers plus lucratifs gérés par des entreprises étrangères, le retour inopiné vers le secteur agricole à la suite des précipitations tardives, ainsi que l'absence de programmes de formation professionnelle efficaces. Les salaires des ouvriers qualifiés ont enregistré une hausse de 25 % en l'espace d'un an, ce qui a considérablement alourdi les coûts de construction. Ce contexte a eu des répercussions négatives sur l'offre immobilière, entraînant des retards dans la livraison des projets et une baisse notable de leur rentabilité. Toujours selon les informations recueillies par Hespress, certains promoteurs immobiliers ont décidé de suspendre les virements bancaires et le paiement de traites à destination des entrepreneurs disparus, après avoir constaté l'absence de ces derniers sur les chantiers et les protestations de leurs ouvriers pour salaires impayés. Des instructions ont été données aux agences bancaires partenaires pour « geler les transferts », en attendant des clarifications sur la situation de ces entrepreneurs, les solutions qu'ils comptent apporter aux conflits avec leurs ouvriers, et les garanties qu'ils peuvent offrir quant à la continuité de leurs engagements contractuels. Plusieurs promoteurs redoutent en effet d'avoir à supporter, à eux seuls, les pénalités de retard liées à la non-livraison des projets dans les délais impartis.