Des mineurs marocains, ainsi que d'autres originaires de diverses nationalités, ayant réussi à pénétrer l'enclave de Sebta samedi dernier, font actuellement l'objet d'une répartition vers d'autres villes espagnoles. Ce processus intervient en réponse à une crise d'engorgement aigu des centres d'accueil. Le quotidien El Faro de Ceuta rapporte que 27 mineurs marocains ont quitté Sebta ce lundi matin à destination de différentes régions espagnoles. Cette opération s'inscrit dans le cadre des plans de soutien déployés par plusieurs gouvernements locaux, afin de répondre à la situation critique que connaissent les structures d'hébergement dans la ville. Dans le même temps, le journal Europa Sur révèle que les autorités espagnoles et marocaines ont décrété un état d'alerte maximale aux frontières séparant le Royaume du Maroc des deux enclaves occupées de Sebta et Melilla. Cette mesure coïncide avec la plus importante tentative de franchissement de l'été, survenue samedi dernier. Toujours selon la même source, les autorités de Sebta ont adressé une demande de coopération urgente au gouvernement central, après que le nombre de mineurs accueillis a atteint 500, alors que la capacité légale est fixée à 132. Des réflexions sont en cours pour aménager de nouveaux espaces d'accueil, notamment au sein des zones industrielles. Khalid Mouna, chercheur en migration, souligne que, malgré un contrôle espagnol très strict du fonctionnement des centres d'accueil pour migrants et mineurs, « le risque de violations des droits humains demeure réel », surtout dans un contexte de transferts massifs vers d'autres villes imposés par l'urgence de la surpopulation. Dans une déclaration à Hespress, le chercheur insiste sur le fait que cette situation ne doit pas masquer la responsabilité du Maroc face à l'émigration continue d'une frange aussi sensible de la population. Selon lui, cela pose une interrogation fondamentale sur « la pertinence des politiques publiques marocaines ainsi que sur les efforts réels déployés pour encadrer la jeunesse, assurer son insertion socio-économique, et proposer des formations continues et des opportunités d'emploi ». Et d'ajouter : « L'émigration de cette catégorie vulnérable, bien qu'elle soit un phénomène ancien et persistant, soulève des enjeux cruciaux à long terme, dans un contexte où le Maroc est confronté à une transition démographique vers le vieillissement de sa population ». Il précise que la problématique actuelle ne réside pas uniquement dans l'accueil des mineurs à l'étranger, mais surtout dans la nécessité urgente de stopper l'hémorragie migratoire de ces jeunes vers l'Espagne, souvent à la nage, avant qu'ils n'atteignent l'âge de 18 ans. Le chercheur rappelle également que le transfert des mineurs marocains vers d'autres centres d'hébergement s'inscrit dans une logique visant à régulariser leur situation administrative, afin de leur éviter une expulsion automatique à leur majorité. De son côté, Hassan Bentaleb, journaliste spécialisé dans les questions migratoires, met en garde contre la tendance médiatique à exagérer systématiquement le phénomène de la migration clandestine des mineurs. Dans une déclaration à Hespress, il observe que l'expérience des dernières années a démontré que la saturation des centres d'accueil pour migrants en situation irrégulière revient chaque été, en raison de la hausse significative des tentatives de franchissement durant cette période. Bentaleb souligne que chaque année, les gouvernements régionaux relancent les discussions avec le gouvernement central à Madrid afin de résoudre le problème de l'encombrement des structures d'accueil. Toutefois, « aucune solution structurelle n'est apportée », si ce n'est des mesures temporaires comme les opérations de transfert. Il exprime également une préoccupation croissante concernant la disparité des services offerts aux mineurs migrants, selon qu'ils soient pris en charge dans le nord ou le sud de l'Espagne.