La consommation électrique nationale a atteint un nouveau palier en 2024, portée par la reprise industrielle et les grands chantiers structurants du Royaume. Au-delà des volumes, les derniers indicateurs révèlent une transformation silencieuse mais profonde de l'organisation du marché de la distribution, marquée par l'essor des nouveaux acteurs régionaux. Selon les données publiées par l'Autorité nationale de régulation de l'électricité (ANRE) au titre de l'année 2024, la demande nette en énergie électrique s'est établie à 45,71 térawattheures, en hausse par rapport à 2023. Cette progression s'inscrit dans une tendance observée depuis la sortie de la crise sanitaire de 2020, avec un élargissement rapide des usages de l'électricité dans l'industrie et une montée en charge de projets à forte intensité énergétique. L'un des faits marquants de l'exercice réside dans la capacité du système électrique national à répondre à cette demande. En 2024, 95,5 % des besoins ont été couverts par la production nationale, traduisant à la fois la solidité du parc de production et la montée en puissance des capacités locales, dans un contexte de volatilité des marchés énergétiques internationaux. Mais c'est surtout du côté de la distribution que les équilibres évoluent. La mise en service progressive des sociétés régionales multiservices dans plusieurs grandes régions ( Casablanca-Settat, Souss-Massa, Marrakech-Safi et l'Oriental ) a modifié la structure des ventes du groupe Office national de l'électricité et de l'eau potable (ONEE). Ces nouveaux opérateurs se positionnent désormais comme les premiers clients directs en volume, concentrant près de 45 % des ventes directes enregistrées en 2024, selon l'ANRE. Dans ce nouveau paysage, le secteur distribution de l'ONEE conserve un rôle central, avec environ 43 % du total des ventes, réparties de manière quasi équilibrée entre les clients en moyenne et en basse tension. Les grands comptes raccordés en haute et très haute tension représentent, pour leur part, 12 % des ventes globales, un niveau stable qui reflète la structure actuelle du tissu industriel lourd. L'analyse par catégorie de tension confirme la diversification des usages. Les clients en moyenne tension concentrent un peu plus d'un cinquième des volumes, une proportion comparable à celle de la basse tension, traduisant l'élargissement de la base productive et des services électro-intensifs. À moyen terme, l'ANRE anticipe une poursuite de la croissance de la demande nationale, tirée par les projets industriels de grande taille, les stations de dessalement, les programmes liés à l'hydrogène vert et les investissements en infrastructures engagés dans la perspective des grandes échéances sportives internationales que le Maroc s'apprête à accueillir, selon les projections de l'Autorité nationale de régulation de l'électricité. Cette trajectoire pose néanmoins la question de l'adaptation des réseaux, des capacités de stockage et des mécanismes tarifaires à un système de plus en plus sollicité. Elle renforce également le rôle stratégique de la régulation pour accompagner l'ouverture progressive du marché, sécuriser l'investissement et garantir l'équilibre entre performance économique et continuité du service public.