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La sélection politique
Publié dans La Gazette du Maroc le 31 - 07 - 2002


Elites partisanes
Les partis politiques remplissent partout deux fonctions essentielles : d'une part, une fonction de structuration par l'organisation de l'expression de l'opinion et la transmission des demandes aux centres de décision. Et d'autre part, une fonction traditionnelle de recrutement à travers laquelle les partis politiques assurent la sélection et le renouvellement des élites politiques.
Et c'est justement cette dernière fonction qui nous intéresse, puisqu'elle nous renseigne sur le processus de circulation des élites dans chaque système politique. C'est pourquoi, à l'approche des élections, le processus de sélection des candidats aux postes électifs du parlement prend autant d'importance. C'est le cas au Maroc, surtout à quelques jours des échéances électorales du 27 septembre.
À ce niveau, chacun serait tenté de se poser la question sur le processus de recrutement et de sélection des candidats par les partis politiques : d'abord, les candidats politiques répondent-ils à un processus d'élection démocratique ou sont-ils soumis à la loi de la désignation ? Ensuite, la sélection politique des candidats, par les partis, dépend-t-elle du militantisme partisan ou tout simplement ne fait-elle que traduire la logique de la rentabilité électorale ? Enfin, quelles sont les conséquences du processus de sélection politique des candidats, notamment lors de la constitution des listes électorales ?
Passage obligé
La plupart des politologues défendent l'idée que la sélection politique des candidats soit un processus politique complexe, aux contours flous. De plus, elle revêt une importance capitale dans la mesure où pour être élu, il faut être candidat. On pourrait concevoir que la candidature à des fonctions politiques demeure une initiative purement individuelle. Pourtant, à la limite, tout le monde pourrait être candidat et chacun voterait pour lui-même.
Donc, un mécanisme de présélection est nécessaire et, dans la plupart des cas, ce sont les partis qui vont l'assurer. En effet, ces derniers constituent le lieu naturel où les futurs hommes politiques font l'apprentissage de la vie publique avant d'assumer des responsabilités communautaires. En fait, les dirigeants des partis soumettent les hommes politiques à l'examen, évaluent leurs compétences, les font progressivement escalader les niveaux de la hiérarchie partisane. Ensuite, au bout d'un certain temps, plus ou moins long, ceux d'entre eux qui auront donné satisfaction seront choisis pour défendre devant l'électorat les couleurs du parti.
Election ou désignation
D'une manière générale, il ne serait pas exagéré d'affirmer que la sélection des candidats par les partis politiques suive un mode oligarchique de désignation plutôt qu'une logique démocratique d'élection.
Pour aller plus loin, il faudrait rappeler que la désignation des candidats recoupe la distinction des partis de cadres et des partis de masses. En effet, les candidats peuvent être cooptés par les organismes dirigeants ou élus par la base du Parti. Dans le premier cas, on a un groupe de notables qui reconnaissent à un individu sa disposition pour siéger parmi eux. Un tel mode de sélection implique que les candidats nommés s'accordent sur les mêmes valeurs, sur les manières de penser ou d'agir que ceux qui les choisissent. Résultat, on finit par reproduire les traits culturels du groupe dirigeant. D'où le dysfonctionnement du processus de la circulation des élites. C'est le cas du Maroc qui peine à renouveler ses élites partisanes. À cet égard, il est curieux de voir encore gouverner des hommes politiques sexagénaires, issus de la lutte pour l'indépendance. Dans le second cas, la décision appartient à des individus qui ne sont pas eux-mêmes en place. Elle est donc plus favorable à l'apparition de nouvelles élites.
En pratique, cependant, il est souvent difficile d'opérer une distinction nette entre l'élection et la désignation par la base. En effet, il est rare que le premier procédé se présente totalement à découvert. Il est important pour les partis de se donner au moins l'apparence d'une vie interne démocratique.
Au Maroc, la situation est tellement confuse qu'on a du mal à démêler les partis pour qu'on puisse dégager les procédures de recrutement et de sélection des candidats politiques. Pour ce qui concerne les partis dits de “ l'administration ”, un choix démocratique des candidats par les “ militants ” demeure un vœu pieu. Habitués à l'obéissance, soumis aux divers moyens de pression traditionnels par le pouvoir central et téléguidés par les notables, ces partis peuvent s'incliner, de plus ou moins bonne grâce, à la volonté de la strate politique dirigeante du parti, particulièrement à son leader charismatique (RNI, MP, PND..).
Pourtant, même dans les partis dits “ traditionnels ou nationalistes ”, arbitrairement classés comme des partis de masses, les pratiques démocratiques sont une monnaie rare. A ce propos, il n'est nul besoin de rappeler les comportements politiques au sein des partis, caractérisés par la domination d'un mode de relations fondé sur l'obédience et le loyalisme dévoué entre le chef du parti et le militant, semblable à celui qui régit la relation entre le cheikh soufi de la “ Zaouïa ” et son disciple (A.Hammoudi 2000).
Pis encore, même les modes d'entretien du loyalisme partisan suivent une trajectoire traditionaliste basée sur une culture anachronique marquée par : la priorité aux hommes politiques les plus âgés, clientélisme, népotisme... A cet égard, un bon nombre de candidatures politiques n'a pas échappé à ces pratiques pour le moins anodines. Pis encore, l'observatoire marocain chargé du suivi des élections avait même signalé l'intervention des agents de l'autorité en faveur de quelques candidats !
N'exagérons rien tout de même, puisque même au sein des partis occidentaux de masses, et qui connaissent pourtant une réelle démocratie, le poids des organismes centraux est très important. Cependant, dans de telles formations, si l'on excepte le cas particulier des partis communistes, la promotion d'un individu par la seule volonté de la base reste possible. Mais, elle ne sera durable que si l'individu en question se voit adopté par le groupe dirigeant. (M.Duverger 1978)
Rentabilité électorale
En règle générale, lors de la sélection politique des candidats, la rentabilité électorale finit souvent par l'emporter sur le militantisme partisan. (R.Boudon 1979). Le système politique marocain ne fait, certainement, pas exception à cette règle. En effet, les partis politiques n'hésitent pas à mettre une sourdine aux revendications de leurs militants. Par exemple, les dignitaires partisans ignorent souvent les voix des militants qui désirent voir un fervent militant comme le candidat privilégié du parti. C'est pourquoi, on assiste souvent lors des échéances électorales à des démêlés politiques entre les dirigeants du parti et les militants. C'était le cas au sein du parti de l'UC, lors de la sélection de quelques candidats à Casablanca pour les prochaines élections.
Toutefois, les différences d'appréciation entre la base et le sommet ne s'expliquent pas seulement par la volonté des dirigeants de rester entre soi. En fait, ces différences procèdent également d'une différence d'optique. En effet, les dirigeants d'un parti ont communément des préoccupations de rentabilité électorale. Ils sont tentés de préférer à des candidats qui plaisent aux militants, des individus plus maniables, moins intransigeants et donc mieux susceptibles de faire le plein des suffrages.
D'autre part, un parti qui gouverne, ou qui aspire à gouverner, a besoin de recruter des hommes compétents, mais qui ne possèdent pas nécessairement les qualités du candidat idéal : souplesse et délicatesse dans les rapports humains, éloquence facile, etc. A ces mauvais candidats, qui seront de bons gouvernants, on réserve donc des circonscriptions sûres, c'est-à-dire où les assises du parti sont assez solides pour faire élire n'importe qui. C'est le cas de certains partis politiques, notamment l'UC, le RNI et l'Istiqlal. Ainsi, en adoptant le système de “ pointage ” dans la sélection des candidats, le parti de Abass El Fassi compte ratisser large lors des prochaines primaires, en visant la “ rentabilité électorale maximale ”. Alors que d'autres partis, tels que l'USFP, avaient opté, dans le choix de leurs candidats, pour le militantisme politique, qui demeure soumis au libre arbitre du bureau politique du parti.
De là, tous les risques de décalage entre la base d'un parti et son électorat potentiel. C'est pourquoi, pour pallier cette situation, certains systèmes politiques, notamment le système américain des primaires, évitent que les comités de notables ne confisquent le processus de désignation des candidats à la présidence : dans ce cas, c'est aux électeurs eux-mêmes que le choix est confié. Le caractère de la méthode est incontestable, puisqu'il permet le contrôle populaire à tous les stades du processus électif, et non pas seulement dans sa phase finale.
La guerre des listes
Dans le cas des élections législatives, la fonction de sélection des candidats s'exerce normalement. Toutefois, il arrive souvent que des désaccords surviennent lors de la mise en place des listes électorales par les partis politiques participant aux élections.( G.Vedel 1980). Ceci est d'autant plus vrai dans les systèmes électoraux qui adoptent la représentation proportionnelle par le scrutin de liste (RPSL), actuellement en vigueur au Maroc. Pour exemple, la compétition entre les candidats politiques, pour prendre la tête des liste, se fait des plus redoutables à telle enseigne que les instances partisanes ont dû intervenir pour trancher des litiges de candidature, surtout dans la ville de Casablanca.
Certes, la compétition lors de la sélection des candidats politiques n'est point un processus irrévocable, puisque les partis politiques arrivent toujours à pallier les discordes et à endiguer les conflits. Il n'en demeure pas moins qu'en règle générale, la guerre de sélection des candidats politiques ne favorise guère les partis de la majorité gouvernementale. En fait, une telle compétition nuit considérablement à l'image de marque des grands partis qui doivent éviter, autant que faire se peut, de s'abaisser à de telles pratiques, qui ne feront, d'ailleurs, que traduire le manque d'implantation politique des partis.
Ceci étant dit, dans la majorité des cas, la compétition lors de la sélection des candidats politique n'est que rarement portée à son paroxysme. En fait, la plupart des conflits politiques sont réglés rapidement à l'amiable : ceux des circonscriptions tenues par des sortants apparemment indéfectibles à l'image des dignitaires des partis politiques, qui se sont placés à la tête des listes. Et ceux que les partis de la coalition majoritaire n'avaient aucune chance d'emporter. C'était le cas, par exemple, dans quelques circonscriptions rurales à forte connotation amazighe (MP et MNP).
En contrepartie, seulement un petit nombre de circonscriptions provoquaient des conflits très violents : soit que le candidat ne fait pas l'objet d'une unanimité au sein de son parti, qui se trouve tiraillé entre des alliés qui soutiennent le candidat et des adversaires qui le désapprouvent. La candidature de l'uspéiste, Khalid Alioua, en est une parfaite illustration. Soit que la majorité a des chances sérieuses de gagner un siège sur l'opposition. Ce cas de figure reste hypothéqué sur le terrain par les calculs partisans et les manœuvres politiciennes, qui ne sont pas toujours faciles à démêler. Enfin, soit que le parti refuse de sélectionner un candidat qui bénéficie d'un soutien sans réserve de la base. C'était le cas pour un candidat usfpéiste qui s'est vu refuser la tête de liste à la circonscription de Rabat-Chellah, ce qui l'a poussé à abandonner son parti d'origine !
Bien sûr les partis restaient totalement libres, juridiquement, de présenter des candidats comme ils l'entendent. Mais parfois, c'est la guerre ouverte, préjudiciable à la coalition dans son ensemble, et peut-être à chacune de ses composantes. C'est le cas de l'USFP qui a été secoué par des luttes intestines au sein de ses instances lors de la sélection de ses candidats à Rabat et à Casablanca.
Test démocratique
Il apparaît donc au total que la désignation des candidats est bien une fonction spécifique dans la mesure où elle ne se réduit pas à des choix personnels et des préférences subjectives, mais doit intégrer des facteurs divers. N'empêche que ce sont les partis qui représentent l'organe le mieux adapté pour remplir cette fonction, car c'est le lieu spécifique où les divers paramètres en cause peuvent être reconnus, analysés et où un arbitrage peut être opéré entre eux.
Au Maroc, il semble établi que le processus de sélection politique des candidats réponde plus à un mode oligarchique de désignation, diligenté par les notables, qu'à un mode d'élection démocratique. Par voie de conséquence, la guerre des listes, par exemple, à laquelle se livrent des candidats assoiffés de pouvoir, n'est que la résultante normale et prévisible d'un manque patent de démocratie interne au sein des partis. Le fait de désigner un candidat bien pistonné par les cercles dirigeants du parti, au détriment de candidats émérites, ne fait qu'attiser les tensions entre les candidats et les organes des partis. D'où le risque de démobilisation politique aussi bien des candidats que de l'électorat.
Certes, la soif de pouvoir provoque souvent une course effrénée pour la quête d'un siège au parlement, voire d'un poste au gouvernement. Néanmoins, cela ne veut pas dire pour autant que les candidats ont le droit de piétiner le processus électoral. Nous conviendrons que la tentation de siéger soit irrésistible, n'empêche que le manque d'un “ self-control politique ”, au moment des compétitions, peut s'avérer fatal pour la mise en place de toute entreprise démocratique.
Faire le plein des suffrages au “ station ” de la démocratie : oui , mais à condition de respecter les autres “ clients ”, de disposer d'un bon “ véhicule ” et surtout de savoir bien “ conduire ” ? Cela résume, parfaitement, le test démocratique que les élites partisanes sont appelées à passer. Arriveront-elles à le faire avec brio ? Les prochains jours nous le diront.


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