Le gouvernement aprouve la transformation de l'ONHYM en société anonyme    ONU : Omar Hilale appelle à l'urgence d'assumer la responsabilité collective de protéger les populations contre les atrocités    USA : un projet de loi pour classer le polisario "organisation terroriste"    Maroc-France : une coopération migratoire renforcée    Circulaire de la Présidence du Ministère public sur l'activation de son rôle dans les procédures des entreprises en difficulté    Conflit israélo-palestinien : La solution à deux Etats, seule voie pour une paix juste et durable    Sahara marocain: Le Parlacen réaffirme son soutien à l'initiative d'autonomie et à l'intégrité territoriale du Royaume    A l'ONU, un plaidoyer pour garantir aux Sahraouis de Tindouf «le statut de réfugié»    Fibre optique et 5G : Maroc Telecom et Inwi lancent leurs joint-ventures "Uni Fiber" et "Uni Tower"    Charte de l'Investissement : 47 projets approuvés, 17 000 emplois ciblés    Un nouveau partenariat entre la région Drâa-Tafilalet et la province chinoise du Fujian pour renforcer la coopération économique et culturelle    Le 1er Moharram 1447 correspondra au vendredi 27 juin 2025, Hespress FR vous souhaite une heureuse année de l'Hégire    Accords d'Abraham : L'administration Trump annonce de «nouvelles adhésions»    Casablanca : Vive controverse après le retrait de deux textes sur la Palestine d'un examen de sixième    Mali : Arrestation de 6 chauffeurs de camions marocains suite à un accident de la route    Le Maroc élu par acclamation à la présidence de la 68e session du COPUOS    Algérie-France : La suspension d'une résolution parlementaire ravive les tensions postcoloniales    Nouvel an de l'Hégire 1447: SM le Roi, Amir Al Mouminine, adresse des cartes de vœux aux Chefs d'Etat des pays islamiques    Le Wydad de Casablanca termine sa participation à la "Coupe du Monde des Clubs" par trois défaites et aucun point récolté    Mondial des clubs : Al Aïn bat le WAC qui finit dernier du groupe    Achraf Hakimi obtient le soutien de médias français pour sa candidature au Ballon d'Or    Le Royaume-Uni officialise son appui à la Coupe du monde 2030 au Maroc    Immatriculation des véhicules à l'étranger : La NARSA rappelle les règles en vigueur    Maroc Telecom e Inwi anuncian la constitución de Uni Fiber y Uni Tower    Parlacen backs Morocco's autonomy plan for Western Sahara during San Salvador assembly    Trump administration says new countries are set to join Abraham Accords    Feux de forêt : Début de saison maîtrisé, mais l'été ne fait que commencer [INTEGRAL]    Drame de Sidi Rahal : L'association "Touche pas à mon enfant" appelle au renforcement de la sécurité sur les plages    Reda Benjelloun prend les rênes du Centre cinématographique marocain    Mawazine 2025 : Will Smith livre à l'OLM Souissi un show exaltant à l'américaine    Subvention aux associations, manifestations et festivals culturels et artistiques: plus de 9 MDH accordés au titre de 2025    Abderahman Elebbar : le DJ qui transforme les rues d'Essaouira en scène musicale    Espagne : Séville veut attirer le tourisme marocain via l'Histoire et la culture communes    Le Sénégal est le plus grand importateur de livres français en Afrique    L'Ambassadeur de Chine visite le Centre Mohammed VI des personnes en situation de handicap et réaffirme l'engagement de son pays en faveur de la coopération humanitaire au Maroc    Donald Trump: Le procès contre Netanyahou « doit être annulé immédiatement »    Mercato : Hamza Igamane aurait choisi de rejoindre le LOSC    La gigantesque grue ZCC9800W du chinois Zoomlion façonne le chantier du stade de Rabat en vue du Mondial 2030    Khalid Mrini : "Dès septembre, nous postulerons au full membership de l'IIHF"    Brahim Diaz : « Je suis performant et je veux être titulaire »    Amine Bennani : "Le smart living est au cœur de notre stratégie"    Taux directeur : Jouahri justifie son statu quo    Tourisme : Ammor expose son plan pour répondre à la forte demande estivale    «Un cumul de risques structurels» : voici les arguments officiels du gouvernement britannique qui tournent la page du projet transnational Xlinks    Jazzablanca en ville: une programmation gratuite au cœur de Casablanca    Mawazine 2025 : Rabat sous le Will-Power de Smith !    Aurore Bergé salue l'engagement « très clair » du Maroc en faveur de la condition de la femme    Les prévisions du jeudi 26 mai    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



"Le problème d'identité maghrébine est une invention d'anthropologues coloniaux"
Publié dans La Gazette du Maroc le 25 - 07 - 2005


Interview Rachid Boudjedra, écrivain algérien
En marge du colloque sur la littérature maghrébine tenu à Assilah, Rachid Boudjedra, l'un des noms phares de la littérature maghrébine, livre dans cette interview exclusive pour la Gazette du Maroc ses points de vue sur les faux problèmes d'identité dans la littérature maghrébine d'expression arabe ou française, sur l'avenir de l'écriture dans la région, les changements dans la société maghrébine et cette pléthore de publications qui pourraient un jour accoucher de quelque qualité.
LGM: croyez-vous à tous ces discours sur les conflits d'identité dans la littérature maghrébine?
Rachid Boudjedra: je ne crois pas à toutes ces histoires sur l'identité. Il n'y a jamais eu de problème d'identité dans la littérature maghrébine. Je pense que tout homme a eu à un moment ou un autre de sa vie un problème d'identité. Il n'y a pas que les Maghrébins qui ont ce type de problème. Ceci est une invention d'anthropologues coloniaux et surtout des anthropologues dits les pères blancs qui ont constitué l'anthropologie coloniale imaginaire et surréelle et ils ont créé ces problèmes d'identité. Pour ma part, je n'y crois pas du tout. J'ai 66 ans aujourd'hui et je n'ai jamais eu de problème d'identité. Je sais qui je suis, et je le sais très bien. Je suis Algérien, je suis Maghrébin, je suis arabe, je suis musulman. Il s'agit plutôt de crise personnelle d'un individu. Le roman est l'expression de cette crise. Vous pouvez le retrouver chez William Faulkner, chez James Joyce, chez Gustave Flaubert… C'est en fait le problème du doute de soi-même.
Pensez-vous réellement que le roman maghrébin a une particularité?
Oui. Il a une particularité parce qu'il a une histoire terrible. Une histoire coloniale très lourde. Cette histoire que les pays orientaux n'ont pas vécue. Le colonialisme anglais a été très court en Egypte ou en Mésopotamie. Mais nous dans le Maghreb, nous avons réellement été écrassé par le colonialisme. L'enseignement de l'arabe a été interdit en Algérie, c'est très lourd de sens. Ceci a généré beaucoup de dégâts. Et là apparaît le problème du rapport à la langue. Au Maghreb, nous avons pris la langue du colonisateur, malgré plus d'une cinquantaine d'années des indépendances. Mais la langue française est toujours là. Pour les gens au Moyen orient, l'anglais est parlé parce que c'est la langue la plus importante dans le monde pour des raisons politiques et économiques. Vous voyez que la donne est différente pour nous dans le Maghreb. Nous sommes attachés à la langue française, d'où la spécificité de la littérature maghrébine.
Il faut aussi souligner qu'il y a deux littératures maghrébines, celle d'expression française et celle d'expression arabe. Y a-t-il une différence entre les deux types?
Non, il n'y a absolument pas de distinction possible. Vous savez que Kateb Yassine a écrit Nejma, c'était un roman absolument maghrébin sans prendre en compte sa langue d'écriture. Quand moi-même je suis passé à l'écriture en arabe en 1986, après avoir longuement écrit en français, ceci a été un tournant dans la littérature. J'ai introduit la sexualité, la psychanalyse, la peinture, le cinéma, même les sciences exactes. Et là, je considère que ce que Kateb Yassine a fait avec le roman en français, je l'ai fait avec le roman maghrébin écrit en arabe.
Comment avez-vous vécu le passage du roman écrit en français à celui en arabe?
Il n'y pas eu de transition du tout dans mon cas. J'ai écrit le démantèlement (Attafakouk) en arabe comme premier roman en arabe, après j'ai continué à écrire dans cette langue sans me poser de questions. Vous savez l'écriture, c'est d'abord un problème de désir. Et la langue, c'est la maison de l'Etre dont parle Martin Heidegger. Pour moi, qui suis bilingue, j'avais très envie d'écrire en arabe parce que c'est une écriture qui peut être complexe, où le texte est fondamental en tant que structure et non pas l'histoire. J'ai introduit aussi la langue latine dans mes textes en arabe. Parce que je crois que nous sommes Latins, nous avons un héritage et un patrimoine archéologique latin très important qu'il faut exploiter véritablement. Vous savez, à un moment donné le pouvoir idiot algérien a interdit l'enseignement du latin dans les universités. C'était une grossière erreur. Au bout de cinq, six ans, ils sont revenus au Latin. C'est pour vous dire que c'est une composante importante de notre culture. Sans oublier que le pouvoir avait besoin d'archéologues. Peut-on former des archéologues sans une connaissance et un enseignement du latin et du grec?
Que pensez-vous de ce que l'on pourrait appeler aujourd'hui l'actuelle littérature maghrébine teintée par une mièvrerie criarde?
Oui, c'est vrai. Aujourd'hui, il y a la quantité et moins de qualité, alors qu'avant, il y avait moins de quantité mais beaucoup de belles choses écrites. Je pense aussi qu'avec l'accumulation de cette quantité va finir par donner de la qualité. Ce qui est intéressant là, c'est que des auteurs jeunes arabophones ou francophones, malgré le fait qu'il n'y ait pas cette maturité à la Mohamed Dib dans la Trilogie ou d'un Driss Chraïbi dans les Boucs ou d'un Kateb Yassine dans Nejma, nous sommes là dans des sujets et des thèmes qui n'ont pas été abordés auparavant. Le thème de la femme, de la sexualité que ni Dib ni Chraïbi n'avaient abordés. Aujourd'hui, il y a tout cela et c'est une bonne chose.
Quel pourrait être l'avenir de la littérature maghrébine?
Il faut que l'on quitte la poésie. Celle-ci est l'expression d'une société non-urbaine. Une société nomade. Avec le développement de l'urbanité dans le Maghreb, avec la modernité, le roman sera de plus en plus ancré dans la vie parce qu'il est l'expression urbaine par excellence.
Quel impact auront les changements politiques dans le Maghreb sur la littérature?
Il y a une complémentarité entre le développement de la littérature et le développement de la démocratie dans le Maghreb même si elle est balbutiante. Il y a quelque chose de nouveau dont on peut beaucoup attendre. Vous savez, la littérature, la vraie, c'est celle qui refuse, celle de la rébellion. Quand on est dans le refus et la négation avec des capacités techniques indéniables, c'est là qu'une littérature devient intéressante et crédible. C'est ce qui se passe dans le Maghreb et surtout au Maroc et en Algérie. Un multipartisme qui tient la route et une presse indépendante, très culottée. C'est là une ouverture qui peut accoucher de belles choses sur le plan littéraire.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.