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Adultère, tout le monde sait, personne ne parle
Publié dans La Vie éco le 06 - 05 - 2005


L'adultère reste
encore un sujet tabou
dans la société mais
les sociologues sont formels : il est en progression et il touche
de plus en plus de femmes.
La loi punit ce délit
par des peines pouvant aller jusqu'à deux ans
de prison, mais la justice est plus clémente envers les hommes que les femmes.
Un an après la promulgation de la nouvelle moudawana, les féministes peuvent se féliciter : le nombre de nouveaux polygames a substantiellement baissé par rapport aux années précédentes. Pour autant, les femmes sont-elles aujourd'hui satisfaites ? «On peut certes parler de satisfaction, mais les femmes n'en seront pas plus heureuses, affirme une des militantes du mouvement féminin. L'infidélité conjuguale gagne chaque jour du terrain». Perceptible mais non quantifiable, cette évolution ne doit rien à la nouvelle moudawana. Et si les femmes n'en sont pas plus heureuses, les hommes ne le sont pas non plus. L'infidélité conjuguale joue dans les deux sens et encore plus aujourd'hui qu'hier.
L'infidélité conjugale ? Elle est aussi vieille que l'institution du mariage et elle a de tout temps existé, répondent encore les anthropologues. Elle va même en s'amplifiant pour devenir une liaison banalisée avec la société moderne. Plus : l'infidélité est aujourd'hui jugée par beaucoup nécessaire pour sauvegarder l'équilibre du mariage. Ce serait une bouffée d'oxygène pour casser la monotonie qui s'installe insidieusement dans la vie du couple.
«Les hommes ne pensent qu'à ça» Et les femmes ?
Khalid B., cinquante ans, ne le cache pas. Marié depuis un quart de siècle, il reconnaît qu'il a toujours eu des relations avec d'autres femmes, alors même qu'il était encore fiancé. Et son épouse le sait. «Impossible pour moi d'être fidèle. J'aime ma femme, mais pour préserver justement cet amour, on a convenu elle et moi, depuis quelques années, de mener chacun une vie privée. On a fini par avoir chacun son appartement pour mieux respirer, tout en continuant de vivre ensemble, et j'avoue que nous sommes les êtres les plus heureux du monde.» Un autre témoin, la quarantaine, notaire, marié aussi et père de deux adolescents, dit ne pas comprendre qu'on n'ait pas des escapades sexuelles de temps en temps, façon de changer de… «cuisine». «Je ne crois pas, affirme-t-il, qu'il existe un seul Marocain qui n'ait pas eu, à un moment ou à un autre, l'idée d'avoir des relations avec d'autres femmes que son épouse. Le besoin de changer de partenaire est inné chez l'homme, il est biologique». Oui, mais entre l'idée et le passage à l'acte… Malika, une militante associative, mariée et mère de trois enfants, corrobore ces dires et considère que tous les hommes «ne pensent qu'à ça. Ils sont tous partants, qu'ils soient mariés ou pas, barbus ou le visage rasé».
Ce que révèle Khalid au sujet de sa vie de couple n'est certes pas le plus courant et est, tout au plus, l'apanage d'une infime minorité qui s'assume socialement. Il serait, dans ce cas particullier, malvenu, commentent certains, de parler d'infidélité. «Puisque le couple est d'accord sur certaines clauses gérant sa vie privée, on devrait parler plutôt de "fidélité et de concorde", puisque les deux partenaires sont heureux du choix qu'ils ont fait», poursuit malicieusement Khalid. C'est ce qu'explique précisément le sociologue Ahmed Moutamassik. Ce couple est arrivé, selon lui, à un modus vivendi et a pris conscience, sociologiquement, que mener chacun une vie privée, est une façon de renforcer la vie du couple. « Mais, souvent, l'infidélité, comme son nom l'indique, est vécue à l'insu du partenaire avec lequel on vit.» Et douloureusement vécue : que de scènes de ménage, de bouderies, de séparations et de déchirements !
Faute de statistiques et de recherches sur l'adultère au Maroc, impossible de cerner l'ampleur du phénomène. Le sujet continue d'être d'autant plus tabou que les enquêtes de terrain et les sondages font cruellement défaut. Moins tabou en France, le sujet suscite plutôt une sorte d'engouement : un sondage réalisé en 2000 par l'Ifop révèle ces chiffres : 39 % des hommes contre 24 % des femmes ont confié avoir trompé leur conjoint au moins une fois. L'évolution est notable : en 1972, les femmes étaient trois fois moins nombreuses que les hommes à tromper leurs partenaires. En tout cas, l'infidélité conjugale (on disait «l'adultère», il y a trente ans) n'est plus un délit sanctionné par la loi depuis 1975. Mais il constitue, dans ce pays, le principal motif de divorce. Une enquête sur l'infidélité, réalisée en juin 2004 par le magazine L'Express, révèle que «jamais la question de la liberté sexuelle au sein du couple, en particulier le couple marié, ne s'est posée avec autant de vigueur. Désacralisé, le mariage ne corsète plus le désir, pas plus que la procréation (40% des enfants naissent hors mariage)». L'infidélité est-elle exclusivement masculine ? Depuis l'entrée massive des femmes dans le marché du travail, le nombre d'infidélités conjugales féminines aurait sensiblement augmenté.
Au Maroc, quand on parle d'infidélité conjugale, c'est le mur de silence. Or, les Marocains sont nombreux à tromper leurs conjoints, qu'ils l'avouent ou pas. Selon M. Moutamassik, les mœurs, chez nous, ont aussi changé. «L'infidélité a toujours existé d'ailleurs, là où il y a norme, défend-il, il y a obligatoirement transgression de cette norme.» Mais le phénomène s'est amplifié, selon lui, dans le monde entier et le Maroc ne fait pas exception. «Non seulement il s'est amplifié aussi dans notre pays, mais on en parle de plus en plus ouvertement et publiquement. La notion du couple et de la famille subit par conséquent un profond changement.» Quelques verrous ne viennent-ils pas de sauter au Maroc, au même titre qu'en France ? La réforme du code de la famille, est, in fine, celle du divorce. La vie conjugale devrait s'en ressentir. Certes, l'institution du concubinage n'est pas légalisée au Maroc, mais les enfants nés hors mariage sont désormais reconnus par la loi marocaine et ont le droit de porter le nom de leur mère et d'être inscrits à l'état-civil.
Ils ont tué leur femme sur simple soupçon d'infidélité
Pourtant, malgré cette révolution juridique et les acquis en matière de droits de l'homme, des crimes d'honneur continuent d'être commis. Sur un simple soupçon d'infidélité, il y en a qui ont tué leur femme. Ce fait divers relaté par la presse marocaine en atteste. La commune de Béni Dghoughe, près d'El Jadida, en a été, en 2004, le théâtre. Abdelkader, sexagénaire, à cause d'un retour tardif de sa femme à la maison après une journée passée dans la famille, dans un douar avoisinant, lui assène un coup de bâton mortel sur le crâne. «Je n'avais pas l'intention de la tuer, mais seulement de la dresser», déclare-t-il devant la Cour d'appel d'El Jadida. Verdict rendu en juin 2004 : douze ans de réclusion criminelle. Abdelkader était-il réellement cocu ? Aucune preuve. Le flagrant délit est requis par les textes juridiques marocains pour l'établissement de la preuve de l'adultère. Ce ne fut pas le cas.
Justement, ce verrou juridique n'a pas sauté au Maroc, notamment la criminalisation de l'infidélité conjugale. L'adultère est une infraction sévèrement punie par le code pénal marocain (articles 491 et 492) : un à deux ans de prison. Etant un délit d'ordre moral, explique une avocate, qui ne porte en rien préjudice à l'ordre public, mais uniquement à l'honneur du conjoint offensé, ce dernier peut seul porter plainte contre le conjoint adultère. Une seule exception : «Lorsque le mari est éloigné du territoire, la femme qui, de notoriété publique, entretient des relations adultères, peut être poursuivie d'office à la diligence du ministère public» (Article 491). Cette poursuite est écartée par la loi pénale marocaine contre l'homme lorsque sa femme est à l'étranger.
La loi pénale marocaine réprime l'auteur de l'adultère, homme ou femme, mais elle est clémente vis-à-vis de l'époux offensé qui aurait décidé de se faire justice soi-même lorsqu'il surprend sa femme en train de le tromper. L'article 418 du Code pénal est clair sur ce point : «Le meurtre, les blessures et les coups sont excusables s'ils sont commis par l'époux sur son épouse ainsi que sur le complice à l'instant où il les surprend en flagrant délit d'adultère». La même loi ne mentionne pas la réciproque, elle ne parle pas de l'épouse. «Excusables» ne signifie pas que le crime commis par un homme contre sa femme qui le trompe est absout, mais seulement qu'il bénéficie de circonstances atténuantes.
Comment constate-t-on l'adultère ? La preuve «s'établit soit par un procès-verbal de constat de flagrant délit, dressé par un officier de police judiciaire, soit par l'aveu relaté dans des lettres ou documents émanant du prévenu ou par l'aveu judiciaire», stipule l'article 493 du code pénal. Autre chose : le plaignant peut retirer sa plainte à tout moment. «Le retrait de la plainte, survenu même postérieurement à une condamnation, arrête les effets de cette condamnation, mais uniquement à l'égard du conjoint adultère ; en aucun cas il ne saurait profiter au complice de l'infraction», explique un juriste.
Reste à savoir pourquoi un homme ou une femme trompent leurs partenaires. Insatisfaction sexuelle ? Caprice? Vengeance ? Aventure sans lendemain ou besoin inné de tromperie ? Aboubakr Harakat, sexologue et psychothérapeute, nuance d'abord la notion de fidélité. «De quelle fidélité parle-t-on ? Tant il est vrai que la fidélité n'est pas que sexuelle. Elle est aussi au niveau affectif, relationnel. On peut ne pas avoir des relations sexuelles avec une autre personne que sa femme ou son mari, mais on peut tisser avec elle une relation sentimentalement forte, à l'insu de son partenaire : une relation intense, où il y a un échange de confidences et de choses intimes. Serait-ce aussi une forme detromperie ? Dans ce cas-là, on ne peut limiter la notion de tromperie à la sexualité». Les sexologues et les psychanalystes répètent la même chose : on se jette dans les bras d'un amant ou d'une amante pour assouvir un besoin que l'époux ou l'épouse ne peuvent procurer. L'infidélité, précise la psychanalyste Hakima Lebbar, «réside dans la recherche de l'amitié, du soutien, de la compréhension, du respect, de l'attention, de l'affection, de la sollicitude, tout ce qu'une liaison heureuse est censée procurer.»
Mohamed El Marjane, sociologue et professeur à la faculté des lettres de Rabat, ne dit pas autre chose : «Je crois qu'un couple qui vit une bonne satisfaction sexuelle, matérielle, et affective est immunisé contre toute tentation en dehors du mariage. Dans ce cas, changer son partenaire par un autre serait un luxe». Selon lui, l'infidélité conjugale est un signe de dysfonctionnement, voire d'une dégradation de la relation maritale. «Elle est due surtout au système culturel ambiant». Les personnes interrogées par La Vie éco sont unanimes : dans la société marocaine et arabe, les femmes victimes de l'infidélité conjugale tolèrent plus facilement l'incartade de leurs maris que les maris celle de leur femme. La plus grande insulte pour l'homme arabe est d'être trompé par sa femme. Mais l'infidélité a des causes: dans la majorité des cas, c'est la nature même de la relation maritale qui secrète des relations extraconjugales.
Mme Lebbar donne son avis de psychanalyste : «Ce qu'on appelle les couples émotionnellement intelligents, dit-elle, connaissent intimement leur univers réciproque. L'un des moyens de protéger une relation contre la rupture ou l'infidélité, réside dans la façon même de vivre ensemble, de partager ses intérêts culturels et autres intérêts communs. Souvent, les mariages heureux sont aussi fondés sur une profonde amitié amoureuse».
Dernière question : le mâle est-il doté, comme on le répète, d'une libido plus puissante que celle de la femme? «Sur le plan biologique, répond M. Harakat, quelques découvertes renseignent, en effet, qu'au niveau hormonal, l'homme a plus de capacité sexuelle que la femme, mais elles n'en font pas une machine sexuelle.» C'est dire que le mariage n'est pas que sexe et infidélité.


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