En moins de cinq ans, l'endettement du Trésor a été réduit de 5 points de PIB, baissant à 67,7% contre 72,2% en 2020. Si la gestion active et la détente des taux ont largement contribué à obtenir ces résultats, il faut surtout souligner l'impact des hausses sans précédent des recettes fiscales, lesquelles ont permis de contenir le déficit budgétaire. Il n'en reste pas moins qu'il faudra aller explorer les champs d'optimisation des dépenses de l'Etat pour maintenir le tempo. Pour le Trésor, la dette n'est plus une menace. Et encore moins dans un contexte où les recettes fiscales continuent de cartonner. Le récent relèvement de la notation souveraine par S&P Global Ratings en est un indice mais c'est surtout les résultats de l'orthodoxie budgétaire qu'il faut relever. La dette du Trésor a connu une trajectoire baissière en passant de 72,2% du PIB en 2020 à 67,7% en 2024. En cinq ans, le Maroc aura donc réussi à baisser de plus de 4 points le ratio de la dette du Trésor par rapport à la richesse qu'il produit annuellement (PIB). Et pour 2026, l'endettement du Trésor devrait s'établir à 65,8% du PIB, selon les projections du Projet de loi de finances. Pour retrouver une telle euphorie, il faut remonter aux années 2012 lorsque la dette du Trésor était à 58,2% du PIB. La charge des intérêts de la dette, évaluée à 41,6 milliards de dirhams (MMDH) l'année prochaine, soit 2,3% du PIB, devrait également décrocher. La baisse du service de la dette résulte d'un recul de 0,9 points de la charge des intérêts de la dette intérieure et de 6,9% des intérêts de la dette extérieure. C'est le miracle de la gestion active de la dette que déroulent au quotidien les experts de la direction du Trésor et des Finances extérieures. Voilà qui devrait élargir des marges de manœuvre budgétaires au gouvernement. Ces économies sur le service de la dette, le Trésor les doit aussi à une explosion de rentrées fiscales. Ce qui a eu pour effet immédiat de contenir le déficit budgétaire (qui est une source d'endettement) durant les quatre dernières années. Depuis 2021, le déficit du budget de l'Etat a été réduit de 3,3 points du PIB pour atteindre 3,8% du PIB en 2024, et 3% attendus cette année. Chaque point en moins de déficit veut dire moins de dette, le tout, dans un contexte d'embellie de rentrées d'impôts. Pour financer l'endettement du Trésor, il n'y a pas trente-six solutions : soit par la croissance, dont on peut espérer des ressources fiscales supplémentaires, soit par des économies substantielles sur les dépenses. C'est surtout l'afflux de recettes fiscales qui a été décisif. Cartographie des créanciers La dette extérieure publique a atteint 468,2 milliards en 2024, soit 29,3% du PIB. Elle est détenue à hauteur de 52,8% par des créanciers multilatéraux et de 19,9% par des prêteurs bilatéraux, le reste, soit 27,3%, représentant l'encours des émissions sur le marché financier international. Pour la première fois depuis dix ans (2015), la dette extérieure du Trésor dépasse celle des autres emprunteurs publics. Parmi les principaux créanciers internationaux qui prêtent de l'argent à l'Etat, le groupe de la BIRD (Banque mondiale) concentre 30,2% des créances. Suivent derrière, la Banque africaine de développement (BAD) avec 16,2% de l'encours, la France (11,8%), la BEI (10,2%), l'Allemagne (7,6%), le Fonds arabe pour le développement économique et social (FADES), qui détient 4,1% de l'encours, et le Japon (3,5 %). Dans la cartographie des créanciers intérieurs de l'Etat, les OPCVM tiennent le leadership avec 35,9%, devançant les banques de 0,4 point (35,6%) et confirmant ainsi leur montée en puissance sur le marché des adjudications des obligations du Trésor. Les compagnies d'assurance sont en recul, à 13,8% de l'encours, sans doute parce qu'elles affectent massivement leurs ressources aux opérations de financements «innovants», ces acquisitions d'actifs appartenant au domaine privé de l'Etat qu'elles louent à ce dernier sur une longue période. Le reste, soit 14,7%, est détenu par «d'autres organismes financiers». Il s'agit, notamment, des caisses de retraite, mais aussi des opérateurs de la grande distribution et des sociétés de distribution des produits pétroliers qui placent leurs énormes réserves de cash dans les bons du Trésor, s'assurant ainsi des revenus financiers confortables. Le miracle de la gestion active de la dette La gestion active de la dette porte donc aujourd'hui ses fruits. Elle vise essentiellement la réduction du risque de refinancement inhérent au portefeuille de la dette du Trésor à travers le lissage de l'échéancier de ladite dette et partant, la maîtrise des besoins de financement de l'Etat. Cette gestion active s'opère à travers le recours à des opérations de rachat et/ou d'échange de titres, parmi lesquels les maturités résiduelles inférieures à 18 mois. L'objectif principal de ces opérations n'est pas de générer des gains financiers immédiats, mais plutôt de réduire le risque de refinancement, ce qui pourrait avoir un impact positif sur le coût de financement du Trésor, souligne le ministère des Finances. En termes d'impact des opérations de gestion active de la dette, il ressort ce qui suit : . L'atténuation du risque de refinancement, à travers la réduction des tombées de la dette intérieure des mois concernés par lesdites opérations de près de 3,1 milliards de dirhams (MMDH) en moyenne par mois en 2024 et de 3,9 MMDH en 2025. . La hausse des charges en intérêts de la dette intérieure payées au titre de l'année 2024, de 72,9 millions (MDH). Celle-ci résulte de l'effet combiné d'une économie de près de 108,9 MDH réalisée au titre des intérêts découlant du rachat des tombées de 2024 et d'une augmentation de 181,8 MDH au titre du rachat des tombées de 2025. . La réduction du ratio d'endettement de 2024 de près de 0,5 point du PIB grâce à la réalisation d'une opération de rachat pour près de 7,1 MMDH en fin d'année. En plus de ces résultats quantitatifs, les opérations de gestion active de la dette intérieure ont également eu un impact qualitatif en permettant au Trésor de lisser ses besoins de trésorerie sur toute l'année et de mieux gérer sa politique d'émission. Abashi Shamamba / Les Inspirations ECO