Loin des foules déchainées, le golf fait son petit bonhomme de chemin au Maroc. Et pour peu que l'on regarde dans le rétroviseur, on constate qu'en quarante ans le golf a réussi une véritable révolution, non seulement dans la pratique d'une discipline où les adeptes, de plus en plus nombreux, se bousculent aux grilles des clubs et doivent patienter de longues années avant d'être admis dans le nirvana golfique, mais la révolution a été aussi sociale et économique. C'est en fait un changement total dans les mentalités qui s'est opéré au sein de l'opinion publique nationale. Retour en arrière… En 1971, à la création du Trophée Hassan II à Dar Es Salam, quelques pionniers réunis autour du regretté Moulay Abdallah, président de la FRMG et golfeur accompli, furent chargés de prêcher la bonne parole. Il s'agissait de convaincre le bon peuple que le golf n'était pas fait contre lui, mais pour lui. Alors les Abassi, Chraïbi, Skiredj, Colonel Sbaï et tant d'autres se jetèrent dans la mêlée des conférences de presse pour répondre aux questions lancinantes sur le coût de l'évènement que tout le monde s'imaginait mirobolant, et aussi pour rassurer les spécialistes sur le danger écologique des greens de golf, accusés, à tort, d'assécher la nappe phréatique. La foule des curieux « montait », au Royal Golf de Dar Es Salam, à pas mesurés, s'extasiaient devant la beauté luxuriante du lieu, se repaissant de ce paysage redessiné par les concepteurs du parcours, et où les arbres, les fleurs et les espaces verts offraient une image des plus agréables à l'œil et à l'esprit. On s'enhardissait à déguster les plats du club house, à acheter les pulls à la boutique spécialisée, on allait voir les nénuphars, et les flamands roses, mais point de golf. On ne jouait pas, ou très peu. Une petite armée de fidèles arpentait à leur guise des « Par » déserts, alors que la grande majorité des citoyens, hormis durant les périodes « portes ouvertes » quand le Trophée Hassan II était organisé, ignorait carrément tout de ce sport. Certains même se vantaient de ne pas s'intéresser à ce sport de riches oisifs, qui ne pouvait que polluer notre belle jeunesse et les valeurs de la société marocaine. Il faudra rendre hommage à tous ceux qui, dès le départ, luttèrent contre toutes les idées reçues et résistèrent à toutes les attaques pour que chaque année, le Trophée Hassan II puisse se tenir et continuer d'attirer les meilleurs joueurs du monde. Américains, Japonais, Espagnols, Britanniques, et même des Fidjiens et bien sûr les Français vinrent chaque année, en pèlerinage au Maroc, rendre leur culte au golf. Le Maroc se mettait en quatre pour les recevoir, hôtel Mamounia, Golf Royal de Marrakech, avant de venir à Rabat, pour le Trophée Hassan II. Journalistes du monde entier, invités tous frais payés, se régalaient. Les joueurs pros étaient, eux aussi, invités et souvent généreusement rémunérés. Et le golf tout en devenant de plus en plus bling, bling s'éloignait petit à petit de son côté sportif et performant. S.A.R le Prince Moulay Rachid, allait en 1999, mettre fin à cette dangereuse dérive, coûteuse et improductive. Le Trophée Hassan II fait partie depuis cette date des compétitions de l'European Tour. Le privilège qu'en a recueilli le Maroc, est qu'aujourd'hui, pour venir jouer au Trophée Hassan II, il faut être qualifié pour, et les meilleurs joueurs européens viennent, à leurs frais, consolider leur classement. C'est un pas de géant que le golf national a accompli ainsi, lors de ces 3 dernières saisons. Et en cet an de grâce 2012, pour la 39ème édition du Trophée, on sent une montée en puissance. A l'A.T.H (Association du Trophée Hassan II) présidé par S.A.R. le Prince Moulay Rachid, des personnalités golfiques Chraïbi, Maître Zine, Kholti, Sayah etc .. sont devenues des orfèvres en matière d'organisation, et sont aujourd'hui, au contraire de leurs glorieux ainés de la FRMG, très à l'aise pour répondre aux questions gênantes des journalistes. Pour le Maroc, en matière d'image et de promotion touristique, le Trophée Hassan II est « tout bénef ». 500 millions de foyers suivent la compétition à travers un nombre sans cesse croissant de chaînes de télévisions. Les golfs d'Agadir sont magnifiques et le Maroc est salué à longueur d'année par les joueurs du monde entier. Cerise sur le gâteau, si il y a 20 ou encore 10 ans, le Maroc avait besoin de faire venir des techniciens étrangers pour organiser la compétition, aujourd'hui le « know-how » national est devenu probant. Tous les métiers du golf sont de mieux en mieux assimilés. La formation des cadres a été maintenue de façon constante et cela dans la plus grande discrétion. Mais il y a mieux, car l'ambition de Moulay Rachid est d'aller plus loin encore. Certes, les greens marocains sont de beaux écrins pour accueillir les golfeurs du monde entier, mais S.A.R. le Prince nourrit un rêve secret, celui de voir un golfeur marocain s'illustrer dans le Trophée Hassan II avec les meilleurs pros européens. Il fut donc instauré l'Atlas Pro Tour qui permet aux joueurs marocains de s'aguerrir et de récolter expériences et points pour enrichir leur classement international. Déjà 2 joueurs focalisent tous les espoirs, Fayçal Serghini et Younes Lahssaini paraissent bien armés pour passer le cap psychologique et s'affirmer dans ce sport qui pourrait par là gagner une popularité extraordinaire au Maroc. Récemment à la dernière compétition de l'Atlas-Pro-Tour Younès Lahssaini a réalisé un parcours record avec un score de -10 (10 coups sous le Par) authentique exploit quand on sait que le record mondial est de -12 et n'a été réussi qu'une fois dans l'Histoire, et c'est par Tiger Wood. Le golf avance à grandes enjambées, désormais le Maroc joue dans la cour des grands. Rabat, El Jadida, Marrakech, Agadir, ne sont plus des étapes golfiques exotiques, mais le rendez-vous des meilleurs compétiteurs. Et la presse nationale suit. De plus en plus nos confrères s'y intéressent et en parlent. Ils font bien de le faire car bientôt il leur sera difficile de prendre le train en marche. On rendra un hommage au regretté ami et confrère Kadmiri Ken, amoureux passionné du golf, auquel l'avait initié le doyen Kamal Lahlou qui, il y a 30 ans, éditait la célèbre revue « G.E.T » (Golf, Equitation, Tennis). C'est l'ainé des Mani Benjelloun et Mourad Moutawakil qui, aujourd'hui, sont les spécialistes médias du golf. Et il y en a de plus en plus car le golf ratisse large. Sport champion du tourisme économique, pratiqué par tous les managers et décideurs mondiaux, il attend du Maroc son champion pour crever le plafond de l'engouement populaire. Et quelque chose nous dit que ce jour ne saurait plus tarder.