Chaque été au Maroc, avec la montée des températures, les intoxications alimentaires se multiplient. Cette année encore, plusieurs incidents ont été signalés dans différentes régions du pays, mettant en lumière les failles persistantes dans les circuits de production, de distribution et de contrôle des denrées alimentaires. À Taounate, treize personnes ont été hospitalisées après avoir consommé des pastèques. Dans la région des Doukkala, douze autres ont présenté les mêmes symptômes à la suite de la consommation de melons et de pastèques. À Casablanca, une jeune femme a également été admise en clinique après avoir mangé un melon. Ces cas illustrent un phénomène devenu presque saisonnier : des produits alimentaires très prisés en été peuvent devenir une source de danger sanitaire lorsqu'ils ne sont ni cultivés, ni stockés, ni vendus dans de bonnes conditions. Des signalements similaires sont apparus dans d'autres régions, à la suite d'événements collectifs comme des mariages, où plusieurs convives ont souffert de troubles digestifs après avoir consommé des fruits ou des plats préparés. Ces incidents posent la question de l'hygiène, de la qualité des produits agricoles, et surtout du manque de traçabilité sur le marché local. Lire aussi : Smara se classe 6e au palmarès mondial des villes les plus chaudes Selon les spécialistes en sécurité alimentaire et en agriculture, plusieurs éléments expliquent ces intoxications alimentaires. Parmi eux figurent les températures élevées, des conditions de conservation inadéquates, une exposition prolongée des fruits au soleil sur les étals, ainsi que certaines pratiques agricoles préoccupantes. L'un des facteurs les plus alarmants reste l'usage non maîtrisé de pesticides, souvent acquis hors des circuits réglementés. Ces substances, parfois falsifiées ou non autorisées, sont fréquemment employées sans respecter les dosages prescrits ni les délais de sécurité. Résultat : des résidus chimiques peuvent subsister dans les produits mis en vente, notamment les fruits consommés crus comme les melons et les pastèques. Les circuits de commercialisation posent également problème. Une grande partie des produits vendus sur les marchés hebdomadaires échappe aux contrôles. Ces denrées arrivent directement des champs chez les détaillants sans passer par les marchés de gros, où un minimum de vérifications sanitaires est exigé. Le résultat donne lieu à un marché local peu encadré, où la traçabilité est quasi inexistante, exposant les consommateurs à des produits potentiellement dangereux. Le contraste est d'autant plus frappant avec les produits agricoles destinés à l'export. Ceux-ci sont soumis à des normes strictes, à des contrôles rigoureux, et doivent répondre aux exigences des marchés étrangers. À l'inverse, les produits écoulés localement souffrent d'un manque criant de supervision. Le secteur agricole se retrouve ainsi divisé entre un circuit formel, axé sur la qualité et l'export, et un circuit informel, où les règles sont rarement appliquées. Cette dualité fragilise à la fois la sécurité sanitaire des consommateurs marocains et l'image du produit national sur les marchés internationaux. Dans certains cas, des exportateurs s'affranchissent des règles, en achetant des cargaisons sans vérifier leur origine ou leur qualité.