Maroc-Chine: partenariat commercial atteint un niveau record    France : Sébastien Lecornu nommé Premier ministre    Rabat Business School dans le Top 20 mondial du classement Financial Times    Hydrogène: le Maroc s'active dans la recherche...    Le Maroc condamne vivement l'agression israélienne odieuse contre le Qatar    Les prévisions du mercredi 10 septembre 2025    Cannabis médical: le Maroc autorise la mise en vente de 67 produits    La douane traque les huiles moteur contrefaites provenant d'Espagne    Polémique autour des plaques internationales : le ministère de Kayouh clarifie    Tourisme : Eté record au Maroc avec plus de 13,5 millions de touristes à fin août    Sahara : La Centrafrique porte la voix de 40 États en appui au Maroc    UE : Dimiter Tzantchev prend ses fonctions à Rabat    Maroc : Le PJD et Al Adl wal Ihsane condamnent la frappe israélienne sur le Qatar    Elim Mondial 2026 : Le Niger surprend la Tanzanie (1-0)    Yassine Bounou décroche le prix du meilleur arrêt en Saudi Pro League    WeCasablanca International Challenge 2025 : la métropole en mode sport urbain    Après la TICAD9, le Polisario se prépare à participer au 7e sommet UA-UE    Le Maroc condamne fermement l'attaque israélienne contre le Qatar    Fès-Meknès : Amine Tahraoui s'enquiert de l'avancement de projets sanitaires    Plus de 1200 artistes boycottent les productions israéliennes impliquées dans le génocide en Palestine    La Fondation Dr Leila Mezian inaugure l'« Espace Amazigh » au cœur de l'Alhambra de Grenade    De Lorient à Lusaka : Igamane enchaîne les coups d'éclat    Omar El Hilali, débuts discrets mais inoubliables avec les Lions de l'Atlas    Côme et Fàbregas relancent la piste Hakim Ziyech    Salon du Cheval: El Bouari s'enquiert des préparatifs de la 16e édition    La police de l'environnement et les droits de l'Homme au menu du prochain Conseil de gouvernement    Partenariat: L'Institut Amadeus signe un MoU avec l'Emirates Center for Strategic Studies and Research    Enfin, une Ecole Numérique voit le jour à Samara    Météo : Averses orageuses avec chutes de grêle et rafales de vent prévues ce mardi    Enseignement : Saad Berrada inaugure des établissements scolaires à Errachidia    Nasser Bourita s'entretient avec Sergueï Lavrov en pleine préparation de la 8ème Commission Mixte    Retraite de haut niveau sur l'avenir des relations euro-méditerranéennes »    Musique : décès du maître gnaoua Mustapha Baqbou    Un marroquí muere en un accidente de coche en el norte de Italia    Prince Hicham Alaoui calls to «break with Netanyahu» but not with the Israeli people    Maroc : Les anti-normalisation appellent à boycotter le Forum mondial des femmes pour la paix    Le prince Hicham Alaoui appelle à «rompre avec Netanyahu» mais pas avec «le peuple israélien»    Países Bajos: Un testigo clave en el juicio de Ridouan Taghi será liberado próximamente    Prépa CDM féminine de futsal : Italie - Maroc ce mardi    Sahara : Quand Staffan de Mistura met le Polisario et l'Algérie dans le même panier    Un élève rend hommage à son professeur après 22 ans : une Omra en guise de gratitude    Leïla Benali engage à Nouakchott une concertation approfondie avec Mohamed Ould Khaled sur l'interconnexion électrique et les chantiers communs des énergies renouvelables    Entretien téléphonique entre Nasser Bourita et son homologue sénégalais    Le Maroc figure sur la liste européenne des pays d'origine sûrs tandis que l'UE+ voit chuter ses demandes d'asile de 23 % au premier semestre 2025, un chiffre historique    Le Maâlem Mustapha Baqbou n'est plus    L'Alhambra de Grenade accueille un nouvel espace amazigh en l'honneur de la Dr Leila Mezian    Moroccan Gnaoua master Maalem Mustapha Bakbou passes away at 72    Erick Baert, l'homme aux 100 voix, de retour au Maroc avec son spectacle "Illusions vocales"    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



L'autre rentrée littéraire
Publié dans Maroc Diplomatique le 08 - 12 - 2016

Médiatiser les mêmes auteur(e)s, aus­si talentueux soient-ils, empêche les lectrices et les lecteurs, notam­ment ceux n'étant pas forcément attirés par leurs ouvrages, de découvrir la pluralité des oeuvres présentes au sein du champ littéraire. Au cours de cette rentrée littéraire, allons à la découverte d'autres livres plus discrets et regardons ce qu'ils ont à nous dire...
Lorsqu'on s'est mis à annoncer cette fa­meuse rentrée littéraire 2016, on a cité, à maintes et maintes reprises, et bien évidem­ment à juste titre, les derniers romans de Leïla Slimani, Reda Dalil ou Mohmed Nedali. Ce sont de grands romanciers dont il est normal de parler au sein des rubriques culturelles. Toutefois, ce n'est pas tant ces derniers que nous évoquerons mais d'autres textes litté­raires dont on ne parle jamais ou rarement dans les médias. Ces derniers possèdent leur intérêt et leurs qualités intrinsèques, et méritent d'être mentionnés au sein de cet événement culturel. En effet, qu'est-ce que « la rentrée littéraire » au Maroc ? Un événement lancé en décembre 2014 par M. Abdelka­der Retnani, directeur de la maison d'éditions La Croisée des chemins, et reproduit, maintenant chaque année, une fois que la rentrée scolaire est terminée. D'ailleurs, en Europe, comme le souligne Sylvie Ducas, l'expression « rentrée littéraire » pourrait avoir été inventée à partir de ce que l'on appelle « rentrée des classes ». L'enjeu est de jouer sur la portée symbolique de l'événement afin de promouvoir le livre, en mettant bien souvent en évidence les au­teurs reconnus du champ (ceux qui vendent bien, qui ont été primés à des prix prestigieux etc...). Faut-il reproduire cela au Maroc, où les chiffres d'affaire du livre et la quantité (je n'ai pas dit la qualité !) des publications n'est pas la même ? La rentrée littéraire pourrait être aussi un événement culturel où l'on of­frirait une vision panoramique de l'existant, en s'adressant à la diversité des publics. Ma chronique ne prétend bien entendu pas parler de tous les textes littéraires ignorés par les rubriques culturelles. Je me limiterai à ceux sortis récemment, notamment cet été.
Le premier livre dont je souhaiterais parler est celui de Najat Dialmy, Mémoire d'un pro­fesseur, paru en septembre 2016 aux éditions Bouregreg. Dans un contexte où il est facile de discréditer les pratiques d'enseignement, cet ouvrage vient à point nommé pour té­moigner de la façon dont certaines personnes se dévouent à leurs tâches et s'investissent, avec un engagement fort louable, dans les techniques d'apprentissage. Capable de jouer avec l'autofiction, Najat Dialmy relate ses expériences d'enseignante mais en inscrivant son propos dans un style romancé, suscep­tible d'intéresser des lectrices et des lecteurs évoluant dans les mi­lieux pédagogiques. Najat Dialmy raconte le parcours professionnel d'une femme qui a consacré sa vie à apprendre aux enfants à lire et à calculer. Cela pourrait être banal. Toutefois, la force du livre est de restituer les émotions de cette en­seignante sensible et affirmée à la fois. Il relate la façon dont elle a poussé ses élèves à s'intéresser à la culture mais aussi à l'éthique. Cer­tains passages donnent, avec ma­lice, des ficelles aux enseignants pour tenir leurs classes et sur­veiller leurs épreuves : « J'étais sûre qu'il m'était impossible de bien surveiller une quaran­taine d'élèves assis à deux à la même table. Alors, avant de distribuer l'épreuve du contrôle, je de­mandais à quelques élèves de changer de place de sorte qu'un élève médiocre soitassis à côté d'un aussi médiocre que lui, l'élève moyen à côté d'un autre de même niveau et l'excellent à la même table qu'un autre élève excellent. Ainsi, je ne risquais pas d'avoir la désagréable surprise de trouver un quatorze ou un seize sur la copie d'un élève de très faible niveau ».
L'éditeur Marsam a également publié un certain nombre de romans pour cette rentrée littéraire, notamment Meurtre à Adrassane de Dounia Charaf, auteure de Les petites filles et l'oued (2012) et L'orange de l'ogresse (2015). Dans ce livre écrit sur le ton du po­lar mais nous plongeant dans les abîmes de l'âme humaine, nous suivons le personnage de Assia, enquêtant sur une série de crimes et d'agressions sexuelles. Derrière cette atmos­phère policière, l'auteure aborde des thèmes sociaux tels que la misogynie et le machisme, la vie des gens démunis et le délabrement dans lequel on laisse certains lieux du monde rural. Cela n'empêche pas les femmes d'être solidaires entre elles et penser collectivement des plans d'action communs, à l'image de l'accueil que Naïma, la brigadière, réserve à Assia lors de son arrivée à l'hôpital pour rencontrer une fille victime de viol. Malgré tout, l'inspectrice prend conscience de la difficulté à dénoncer et faire condamner la domination masculine, en donnant la parole aux subalternes : «Assia soupira et se leva, écoeurée et découragée comme à chaque fois qu'elle devait s'occuper d'affaires de viols, lorsque les victimes se défiaient plus de la justice que de leurs agresseurs».
La rentrée littéraire pourrait être aussi un événement culturel où l'on offrirait une vision pano­ramique de l'existant, en s'adressant à la diversité des publics. Ma chronique ne prétend bien entendu pas parler de tous les textes litté­raires ignorés par les rubriques culturelles.
La semaine où j'ai aimé de Moha Souag, paru cet été aux éditions Sirocco, fait égale­ment partie des romans à retenir pour cette rentrée. L'auteur nous parle des expériences de Didon Benkoa, un jeune lycéen envouté par une djin aux formes voluptueuses qui fait l'amour avec lui chaque soir et ne supporte pas la concurrence des autres femmes de la vie réelle. De nombreux passages sont des moments de pure poésie, rendant compte de la violence du désir et des troubles de la pos­session, au sens propre comme au sens figu­ré : « Elle était unique et multiple. Elle était toutes les filles de mes rêves, celles du passé et de l'avenir, celles que je ne connaissais pas encore, celles que j'avais aimées, celles que je n'avais pu aimer et celles que j'avais dési­rées en cachette, un mirage attisant les affres de la soif d'aimer ». Plus l'on avance dans le récit, plus la virilité et la dureté masculine se fissurent, laissant apparaître la fragilité et la vulnérabilité des êtres devant une passion qui les dépasse. D'autres romans mériteraient d'être cités ici, notamment La dame à la djel­laba rouge de Ahmed Massaïa, Villa Austra­lia de Habib Mazini et Il n'y a pas de barbe lisse de Mounir Serhani paru chez Marsam, Absolut Hob de Rachid Khaless chez Virgule Editions ou bien Les Ephélides d'Alejandro de Patrick Lowie sorti cet été aux éditions marrakchies P. A. T, mais j'en parlerais peut-être une prochaine fois. Parmi les ouvrages à paraître durant la rentrée littéraire, signalons le nouveau roman de Mamoun Lahbabi, Une douleur à vivre. Prévu en novembre 2016 aux Editions L'Harmattan, ce texte magni­fique raconte le périple d'un homme débar­quant en Asie et partant à la recherche d'une mystérieuse inconnue. Tout comme dans ses autres romans, notamment Sur tes pas (2001) et Entre tes mains (2015), le style d'écriture de l'écrivain restitue avec une minutie et une qualité descriptive les paysages naturels dans lesquels s'enfonce Malik Amr, le person­nage principal. Les fleuves et la végétation du Vietnam ou de la Thaïlande montrent tout le bien-être que la nature apporte à ces hommes fatigués de l'aliénation des grandes périphéries urbaines. Les organisateurs de la COP 22 mais aussi Annie Devergnas, la brillante auteure de l'essai Nature et culture, apprécieront. Parmi les nouveautés à paraître, signalons aussi Orgasme, le prochain ouvrage de AbdelhakNajib qui sortira aux éditions Les Infréquentables, ainsi que la nouvelle « Mo­dern Love » de Zakya Gnaoui, auteure de Sans Contrefaçon (2016), qui sera publiée en novembre aux éditions La Musardine et qui raconte la fracture existentielle d'une femme errant dans la nuit parisienne, accompagnée des chansons de David Bowie. Une bonne rentrée à toutes et à tous, et de belles lectures pour tout le monde, en fonction de ses goûts et de ses désirs.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.