Les provinces du Sud du Maroc attirent de plus en plus l'attention de grandes puissances économiques. L'Italie, les Etats-Unis, le Royaume-Uni ou encore la France : tous misent sur le potentiel de cette région en plein essor. Agriculture, tourisme, hydrogène vert, infrastructures... Autant de domaines où les projets fleurissent, portés par une volonté partagée de développement durable et de coopération renforcée. Les provinces du Sud du Maroc suscitent un engouement croissant auprès de puissances économiques majeures. Italiens, Américains, Britanniques et Français manifestent une volonté affirmée d'y investir, misant sur les ressources naturelles, le positionnement géostratégique et les perspectives offertes par le Nouveau modèle de développement (NMD) initié par le Royaume. Ce regain d'intérêt s'inscrit dans une reconfiguration régionale où le Sahara devient le théâtre d'un affrontement de diplomaties économiques. Côté italien, Giulio Frascatani, président de la Chambre de commerce italienne au Maroc (CCIM), évoque une montée en puissance des projets ciblant le Sud. Dans une interview accordée à un média marocain, il révèle que plusieurs demandes d'investissements dans la salaison du poisson, l'agriculture d'exportation et le tourisme sont actuellement à l'étude. L'hydrogène vert s'ajoute à cette liste, traduisant une volonté de s'aligner sur les transitions énergétiques en cours. Aussi plusieurs groupes hôteliers ont déjà posé leurs jalons à Dakhla, témoignant d'un début concret d'implantation dans la région. L'Italie demeure un partenaire commercial stratégique pour le Maroc. En 2023, les échanges bilatéraux ont atteint près de 57 milliards de dirhams, selon l'Office des changes. Les produits de la mer, le textile et les dérivés pétroliers constituent l'essentiel des flux. Le secteur textile, en particulier, illustre cette coopération : Casablanca et Tanger abritent les ateliers de fabrication de grandes maisons italiennes comme Armani ou Dolce & Gabbana, grâce à une chaîne logistique fluide assurée par Tanger-Med. Toutefois, malgré ce dynamisme, l'absence d'un positionnement clair de l'Italie sur les accords Maroc-UE au sujet du Sahara révèle une position encore peu affirmée. Lire aussi : Provinces du Sud : l'AFD prévoit des investissements de 150 millions d'euros (Rémy Rioux) À l'inverse, les Etats-Unis assument un positionnement géopolitique beaucoup plus tranché. La mission commerciale de haut niveau, organisée en mai 2025 avec la participation de plus de 15 Etats américains et d'agences fédérales, confirme cette orientation stratégique. L'objectif était clair : explorer les opportunités économiques, en particulier dans le secteur agroalimentaire et les provinces du Sud. Cette dynamique s'inscrit dans le sillage de la reconnaissance, en décembre 2020, de la souveraineté marocaine sur le Sahara par Washington, décision lourde de conséquences diplomatiques et économiques. Les retombées concrètes de ce choix géopolitique se font déjà sentir. En 2023, les investissements directs américains au Maroc ont atteint 7,4 milliards de dirhams, consolidant la première place des Etats-Unis comme investisseur étranger dans le Royaume. L'Agence Marocaine de Développement des Investissements et des Exportations (AMDIE), par la voix de son directeur général Ali Seddiki, multiplie les efforts pour promouvoir les atouts technologiques marocains, mis en avant au dernier Consumer Electronics Show (CES) de Las Vegas. L'objectif est de repositionner le Maroc, et particulièrement ses régions du Sud, comme un hub africain de l'innovation et de l'industrie verte. L'appui diplomatique américain inspire d'autres puissances. Le Royaume-Uni, récemment rallié au plan marocain d'autonomie, voit dans le Sahara un espace d'investissement prometteur. En visite à Rabat, le ministre britannique des Affaires étrangères, David Lammy, a qualifié la proposition marocaine de 2007 de « base la plus crédible et réaliste » pour un règlement du conflit. Dans la foulée, plusieurs accords bilatéraux ont été signés dans les domaines de la santé, de l'innovation et des infrastructures. À l'horizon 2030, la Coupe du monde coorganisée par le Maroc, l'Espagne et le Portugal constitue un levier majeur pour l'implantation britannique, notamment à travers le projet emblématique du Grand Stade de Benslimane, confié au cabinet Populous. Du côté français, le directeur général de l'Agence Française de Développement (AFD), Rémy Rioux, a récemment annoncé à Laâyoune des investissements de l'ordre de 150 millions d'euros dans les provinces du Sud. Les projets financés s'inscriront dans le sillage du nouveau modèle de développement lancé en 2015 par Sa Majesté le Roi Mohammed VI, visant à ériger ces régions en pôles de croissance intercontinentaux. L'initiative atlantique portée par le Maroc, visant à désenclaver les pays du Sahel via un corridor logistique reliant Tanger à la façade ouest-africaine, constitue une trame de fond commune à tous ces partenariats. Elle alimente une vision régionale intégrée, fondée sur l'investissement dans les infrastructures, l'énergie, l'agriculture et la connectivité numérique. Le Sahara marocain devient ainsi un laboratoire de la diplomatie économique du Royaume, mêlant stabilité politique, attractivité réglementaire et projection africaine.