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Crise Alger-Paris : révélations explosives sur un krach politique et diplomatique inédit
Publié dans Barlamane le 22 - 10 - 2021

Une longue enquête du journal Le Monde démontre que les politiques étrangères de l'Algérie et la France vivent un antagonisme sans précédent. Les priorités de l'une et de l'autre ne convergent plus, et le caractère conflictuel des relations franco-algériennes et leurs errements s'explique par les non-dits qui les gangrènent.
Les relations entre la France et l'Algérie avaient toujours une histoire compliquée. De la question de la repentance aux rapports économiques et diplomatiques, les rapports bilatéraux traversent une récession sans précédent. Emmanuel Macron, qui a voulu placer son mandat sous le signe de rapports dépassionnés et plus réalistes avec le régime algérien, est devenu exacerbé des avanies, voire des humiliations que ce dernier cherche à infliger à son pays.
«La crise entre Paris et Alger dure désormais depuis trois semaines, et chaque jour qui passe est l'occasion de voir surgir de nouvelles sources de contentieux. Si l'affrontement s'est officiellement ouvert sur des questions d'immigration – particulièrement sur le point sensible de l'octroi des visas après que Paris a annoncé, le 28 septembre, vouloir les réduire de 50 % en raison du faible taux de réadmissions des ressortissants Algériens en situation irrégulière –, les causes du malaise apparaissent bien plus larges et profondes» écrit Le Monde dans son édition de fin de semaine.
Selon les informations du journal, «le dossier le plus sensible aujourd'hui pour la France concerne le rôle de l'Algérie au Mali. Alger avait interdit le survol de son territoire aux avions militaires français en route vers le Sahel. Or quinze jours plus tard, non seulement cette situation n'est pas réglée, mais le dossier malien apparaît comme un élément clé ayant exacerbé la crise en raison d'une tentation, côté algérien, de soutenir un scénario noir pour Paris : un renforcement du rôle de la Russie au Mali. Les sources algériennes interrogées ne parlent jamais directement d'un éventuel soutien au contrat auquel réfléchiraient, de leur côté, les autorités maliennes avec la controversée entreprise russe de mercenaires Wagner» a-t-on indiqué.
Face à la dégradation de la situation sécuritaire au Mali, les interlocuteurs du Monde affirment qu'un renforcement de la présence de la Russie dans ce pays ne serait pas un repoussoir pour l'Algérie. «Un scénario confirmé par une source française de haut niveau. D'autant que Bamako et Alger ont toujours été très proches de la Russie. Moscou leur vend notamment régulièrement du matériel militaire» a-t-on noté.
«L'Algérie considère le Mali, notamment le nord du pays – qui fut la première région à passer sous la coupe djihadiste en 2013 – comme son arrière-­cour. Alger a été le principal médiateur des accords signés en 2015 entre Bamako et des groupes armés. Or le Mali est aujourd'hui gangrené par les cellules djihadistes jusque dans les faubourgs de sa capitale et l'opération Barkhane est repliée depuis longtemps dans une toute petite partie du territoire, au centre-­est du pays, autour de Gao» mentionne Le Monde.
Les mercenaires de la discorde
«Le soutien d'une option russe au Mali provoquerait toutefois des tiraillements au sein même de l'exécutif algérien, selon plusieurs interlocuteurs. Les partisans de Moscou se trouveraient principalement du côté de l'état­-major des armées, traditionnellement russophile. Face à eux, des réseaux considérés comme plus francophiles, proches d'anciens cadres des services de renseignements encore influents, exprimeraient leurs réticences» dévoile le journal français.
«L'Algérie manie aussi une autre carte sensible pour Paris : le soutien implicite au renforcement du dialogue entre Bamako et les islamistes armés, afin d'éviter, de son point de vue, toute partition du territoire, sa hantise. Paris a déclaré plusieurs fois qu'une négociation avec le sommet de la hiérarchie djihadiste et le contrat de Bamako avec Wagner constitueraient des lignes rouges. L'Allemagne, l'Union européenne ou encore la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cédéao) ont aussi mis en garde le Mali» souligne-t-on.
Malgré la crise avec Alger ; «le désengagement des bases du nord du Mali et la réorganisation de l'opération se poursuivraient sans encombre. Les avions militaires français, eux, continueraient leurs rotations en contournant l'Algérie via les espaces aériens marocain et mauritanien. Mais jusqu'à quand ? Pour un certain nombre d'observateurs, quoi qu'il advienne, il y aura un avant et un après cette nouvelle crise franco­algérienne. Longtemps conciliant avec l'Algérie, selon un diplomate, l'Elysée aurait fini par être gagné par la lassitude. Et la récente décision de réduire les visas s'inscrirait dans une forme de fin de cycle. La liste est longue, en effet, des casus belli accumulés entre la France et le pouvoir algérien. Une liste pas forcément constituée de gros dossiers d'affrontement, mais d'une multitude de tensions autour d'affaires ordinaires qui ont pris des dimensions kafkaïennes, selon des documents consultés par Le Monde.»
L'ambassade de France, un des postes les plus difficiles de la diplomatie
Selon Le Monde, «la question des visas devenant de plus en plus épineuse au fil des ans. Le nombre de visas annuels demandé par les Algériens a ainsi été multiplié par trois en dix ans, passant de quelque 200 000 en 2007 à plus de 600 000 en 2017. Or le taux de visas effectivement délivrés par la France a suivi cette courbe exponentielle (de 100 000 à plus de 400 000 sur la même période). À partir de l'élection d'Emmanuel Macron, Paris a décidé de serrer la vis. Le nombre de visas a progressivement été ramené sous la barre des 300 000. Au point d'atteindre un taux de refus, autour de 50 %, longtemps considéré comme un palier à ne pas franchir, au risque de mettre en péril la relation bilatérale. Et c'est en connaissance de cause que le chef de l'Etat a annoncé, fin septembre, une nouvelle baisse à venir de 50 % du nombre de visas délivrés.»
«Bien que M. Macron ait assuré que cette mesure visait le milieu dirigeant qui avait l'habitude de demander des visas et non les étudiants ou les hommes d'affaires, les familiers du dossier savent qu'il n'en sera rien. Alger distribuant très facilement des passeports diplomatiques, cette réduction n'aura pas d'impact sur la circulation de nombreux cadres du régime, même si le Quai d'Orsay pourrait être tenté de leur imposer une lettre de mission. En revanche, la soupape que représentait cette manne de visas pour le régime vis-à-vis d'une certaine frange de sa population risque d'en prendre un coup. Un autre sujet de tensions récurrent entre Paris et Alger concerne les renouvellements de personnels diplomatiques. Les diplomates algériens en poste en France ont tendance à demeurer sur le territoire une fois leur mission achevée. Selon nos informations, une demande récente formulée par Alger d'accréditer trente nouveaux diplomates dans les consulats algériens en France sans qu'il soit possible de comprendre leurs attributions, a ainsi fait bondir Paris» précise le journal français.
Un épisode symbolique : «Dans ce bras de fer, Alger a repoussé de longues semaines l'accréditation en Algérie de deux diplomates français censés occuper des postes vacants. Ils n'ont été autorisés à gagner la capitale algérienne que fin septembre. Chaque rentrée scolaire est aussi l'objet de demandes insistantes des cercles dirigeants algériens pour inscrire leurs enfants au lycée international français Alexandre­ Dumas, à Alger. Le ministère algérien des affaires étrangères présente ainsi à l'ambassade de France une longue liste de diplomates et de hauts fonctionnaires désirant une inscription. Mais la pression est excessive : entre dix et vingt demandes pour une place. Pour cette rentrée 2021, le lycée comptait 2 005 élèves, dont 906 Français.»
Covid-19, et autres soucis
«L'été très difficile vécu en Algérie sur le front du Covid­-19 a également nourri son lot d'incompréhensions entre les deux capitales. Alors qu'une nouvelle vague épidémique frappait le pays, les autorités algériennes n'ont pas donné suite à une proposition française d'assistance et de fourniture d'extracteurs d'oxygène tandis que les hôpitaux algériens manquaient d'oxygène, affirme­-t­-on à Paris. Les dossiers d'entraide pénale sont un autre sujet de bisbilles. Si, pour les affaires de terrorisme, les choses se sont toujours relativement bien passées, il n'en va pas de même sur d'autres dossiers, plus politiques, ou liés à des enquêtes de corruption concernant des personnalités influentes de la diaspora algérienne. La justice française a ainsi couru pendant des mois, en vain, après l'audition d'un témoin important, réfugié en Algérie, dans le cadre de l'instruction ouverte sur le financement libyen de la campagne électorale de Nicolas Sarkozy. Un témoin qui mettait comme condition d'être entendu dans les locaux des services du renseignement extérieur algérien... Alger demande régulièrement, pour sa part, que Paris lui livre des opposants» assène Le Monde.
«Ses bêtes noires : les indépendantistes du Mouvement pour l'autodétermination de la Kabylie (MAK) – considéré comme une organisation terroriste en Algérie – et leur chef, Ferhat Mehenni, réfugié en France. «Tu expulses des gens parce qu'ils te dérangent. Mais ceux qui travaillent avec tes services, les mouchards, ceux-là, ils sont biens», grondait il y a quelques jours encore, le 11 octobre, le président algérien Abdelmadjid Tebboune lors d'une rencontre avec la presse, faisant référence aux demandes régulières françaises d'expulsion d'islamistes radicaux et de sortants de prison. Contacté par Le Monde, le ministère français de la justice a indiqué qu'il ne commentait pas les demandes d'entraide pénale» raconte Le Monde.
Gérald Pandelon, l'avocat de Ferhat Mehenni, assure, lui, qu'«à ce jour, il ne dispose d'aucune information précise concernant un mandat d'arrêt diffusé par les autorités algériennes». «À l'inverse, en 2018, la France a dû longuement négocier pour parvenir à expulser vers l'Algérie le djihadiste Djamel Beghal, condamné en France à plusieurs reprises, notamment pour des faits d'association de malfaiteurs en vue de la préparation d'un acte de terrorisme. Incarcéré depuis 2001, déchu de sa nationalité française en 2006, cette figure de l'islam radical considérée comme le mentor de Chérif Kouachi et Amedy Coulibaly – deux des auteurs des attentats de janvier 2015 – arrivait au terme de ses peines en juillet 2018 et devait bénéficier d'un laissez-passer consulaire pour que son retour puisse être effectué. Mais ce document n'a été accordé qu'in extremis» a-t-on indiqué.
Alger, assure Le Monde, fait pression avec insistance sur les autorités françaises sur deux dossiers a priori plus secondaires, mais emblématiques de la longue liste des irritations entre la France et Algérie. «Le premier concerne Al­-Magharibia TV, une chaîne d'opposition au pouvoir algérien aujourd'hui basée en région parisienne. Initialement positionnée sur la défense des valeurs islamiques, elle s'est reportée sur la couverture des manifestations du Hirak contre le régime, à partir de février 2019. Al­Magharibia TV a été fondée au Royaume-Uni par le fils du cofondateur et président du Front islamique du Salut en Algérie (FIS), Abassi Madani. De quoi agiter les autorités algériennes qui sont allées jusqu'à demander – et obtenir – en octobre 2019, de la société française Eutelsat, la suspension de la diffusion de la chaîne. Accusée par Alger de faire l'apologie du terrorisme, Al­Magharibia TV avait déjà inquiété le régime en 2016 en rachetant une petite chaîne française, dénommée La Locale» a-t-on rapporté.
Le cas du blogueur et activiste Amir DZ, de son vrai nom Amir Boukhors, s'inscrit dans la même veine. «Fort de plus de 800 000 abonnés sur Facebook, soutien assidu du mouvement antigouvernemental du Hirak, il s'en prend régulièrement au pouvoir algérien en publiant des documents à charge et est poursuivi en Algérie dans plusieurs affaires. Mais après avoir vécu en Allemagne, Amir DZ réside désormais en France, où il est en situation irrégulière, et fait l'objet de plusieurs plaintes pour atteinte à la vie privée, insultes et diffamation pour des propos violents et outranciers. Malgré tout, les autorités françaises traînent des pieds pour son extradition, redoutant d'être accusées de complaisance avec le régime» a-t-on énoncé.
Les questions économiques ne sont pas en reste
«Les questions économiques attisent aussi les frustrations côté français. Paris accumule en effet les déconvenues sur des contrats commerciaux importants, comme le marché de la distribution des eaux dans les grandes villes ou l'exploitation du métro d'Alger. Ces derniers n'ont pas été reconduits. La France redoute par ailleurs que ce climat déteigne un jour sur ses exportations de blé vers l'Algérie, aujourd'hui principal débouché à l'export (de 20 % à 30 % en volume, selon les années). Alger évoque de plus en plus l'idée de diversifier ses approvisionnements» note Le Monde.
Contentieux mémoriels
Il y a enfin les incontournables questions mémorielles. Emmanuel Macron a multiplié les gestes mémoriels. « Mais voilà, un couple marche à deux. Et l'Elysée a, semble-il, été agacé que le travail de «vérité» promis par l'Alger n'ait jamais avancé. Un épisode méconnu a crispé récemment Paris.
«Interrogées sur ce sujet comme sur un certain nombre de dossiers objets de tensions avec la France, les autorités algériennes n'ont pas donné suite. Après trois semaines de crise, beaucoup d'observateurs s'inquiètent. Selon certains, cette séquence pourrait pousser la France, déjà très bienveillante à l'endroit du Maroc, à basculer plus franchement encore dans le camp de Rabat alors que s'exacerbe la rivalité entre les deux frères ennemis» conclut Le Monde.


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