Le ministre de la Justice, Abdellatif Ouahbi, a proposé de dépénaliser la faute médicale pour la traiter comme un manquement civil, en vue de restaurer la confiance entre les praticiens et leurs patients, et libérer la médecine d'une peur constante du pénal. Faut-il continuer à juger les médecins comme des criminels lorsqu'une erreur se produit au bloc opératoire ou dans une salle de soins ? C'est à cette question sensible qu'a répondu, ce vendredi, le ministre de la Justice, lors de son intervention à la rencontre organisée par le Conseil consultatif pour la greffe d'organes humains, à la Faculté de médecine et de pharmacie de Rabat. Ouahbi a annoncé que son département étudie la possibilité de transférer la faute médicale du domaine pénal vers le domaine civil. Une réforme ambitieuse qui, selon lui, permettrait de « replacer l'acte médical dans son véritable cadre : celui de la préservation de la vie ». Devant un parterre de praticiens, de juristes et d'universitaires, il a reconnu que trois sujets le « hantent » depuis des années, notamment la faute médicale, le recours à l'ADN dans les enquêtes judiciaires et la législation sur le don d'organes. Selon le responsable, une interprétation erronée persiste au sein de certaines institutions de l'Etat : toute faute médicale serait assimilable à un homicide involontaire. Une vision qu'il rejette fermement. « Le médecin a une obligation de moyens, pas de résultat. Il prodigue des soins pour sauver des vies, non pour les ôter », a-t-il insisté. Même dans le cas de la chirurgie esthétique, où la promesse de résultat peut être invoquée, « le jugement de la réussite ou de l'échec reste relatif », a-t-il nuancé. La réforme envisagée consisterait donc à qualifier l'erreur médicale non plus comme une infraction pénale, mais comme un manquement à la responsabilité civile. Le patient lésé pourrait ainsi obtenir réparation devant les juridictions civiles, sans que le médecin ne soit automatiquement poursuivi au pénal. « Nous voulons permettre à la victime d'exercer son droit à indemnisation, sans criminaliser l'acte médical », a expliqué Ouahbi. « Le débat est vif, et c'est sain », a reconnu le ministre, qui se dit déterminé à faire aboutir ce chantier avant la fin de son mandat. « Mon souhait est de soumettre le texte au Parlement avant de quitter le ministère », a-t-il confié.