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“Isoler le président Arafat est une erreur”
Publié dans La Gazette du Maroc le 30 - 06 - 2003


Robert Malley
Qu'est-ce qui a mal tourné à Camp David en l'an 2000 ? Qui était responsable de l'échec ? La situation actuelle qui prévaut au Proche-Orient, la place de Yasser Arafat sur l'échiquier politique palestinien et le rôle des Etats-Unis dans le processus de paix telles sont les questions abordées par Robert Malley, ancien conseiller de Bill Clinton pour les affaires israélo-arabes de 1998 à 2001.
Il occupe actuellement le poste de président du programme Moyen-Orient de l'International Crisis group.
La Gazette du Maroc : vous avez participé à tous les rounds des négociations entre Palestiniens et Israéliens à Camp David et ailleurs. Quelles sont, selon vous, les véritables raisons qui ont abouti à l'échec de vos efforts ?
Robert Malley : la question à laquelle il est impératif de répondre et en même temps, paradoxalement, à laquelle il est quasiment impossible de répondre. Le processus engagé sous la présidence Clinton et dont l'un des points culminants fut le sommet de Camp David, fut un processus d'une rare complexité et qui tentait de résoudre en un temps record un conflit vieux de plusieurs décennies.
Une chose pour moi est claire en tout cas : la version dite orthodoxe, celle qui tient à faire porter toute la responsabilité de l'échec aux Palestiniens est à la fois simpliste, fausse et politiquement dangereuse. A mon sens, les responsabilités sont partagées et il restera aux historiens d'en dégager les leçons profondes et d'en faire le tri : manque de confiance réciproque, manque de temps, manque de préparation, conceptions contradictoires sur le conflit et sur la logique de sa résolution, conduite insuffisamment volontaire et déterminée des Américains qui auraient dû imposer leurs idées, conduite excessivement passive des Palestiniens qui semblaient parfois agir à Camp David en simples touristes, conduite excessivement impérieuse des Israéliens qui semblaient parfois agir à Camp David en décideurs ultimes de l'avenir des territoires occupés.
Le Président Yasser Arafat, est-il, comme tiennent à l'affirmer certains milieux américains, responsable directement de cet échec ?
On peut faire beaucoup de reproches au dirigeant palestinien, et je n'y ai moi-même pas manqué. Il aurait dû comprendre le caractère historique du sommet, agir en tant que leader et saisir l'opportunité
offerte par un Président américain et un Premier ministre israélien qui voulaient désespérément un accord. Il aurait également dû clairement exposer la vision palestinienne d'un accord de paix. Mais de là à lui faire porter entièrement le chapeau de l'échec, il y a un pas qui s'explique davantage par les calculs politiciens des uns et des autres que par les faits. Arafat est arrivé à Camp David convaincu qu'il s'agissait d'un piège ; d'ailleurs, la majorité de sa propre équipe était hostile à la tenue du sommet. Pendant la première année où le Premier ministre Barak était aux affaires, Arafat s'est senti négligé et humilié. Des engagements israéliens n'ont pas été tenus, les colonies de peuplement ont continué à croître, les premières propositions israéliennes étaient inacceptables, et un temps précieux a été perdu lorsque des mois durant Barak s'intéressait exclusivement aux affaires syriennes. Barak, il n'y a pas de doute, était prêt à aller plus loin que ses prédécesseurs dans la recherche d'un accord de paix. Mais sa conception rigide des négociations, son approche dédaigneuse, son manque de compréhension de la réalité palestinienne ont joué un rôle important dans l'échec final, tout comme sa campagne publique de dénigrement des Palestiniens et de Yasser Arafat en particulier après cet échec ont dangereusement contribué à empoisonner le climat actuel.
Nous assistons, à l'heure actuelle, à une nouvelle tentative “la feuille de route”, pour relancer le processus de paix entre Israéliens et Palestiniens. Quels sont, d'après vous, les avantages de cette initiative par rapport à celle que vous avez mise en place à l'époque, initiée par le Président Clinton ?
Il ne s'agit pas de la même chose. Le Président Clinton cherchait à résoudre le conflit d'une seule traite, en réglant tous les problèmes de fond – les territoires, les réfugiés, Jérusalem, etc. La feuille de route en revient à la logique des accords d'Oslo : un processus en étapes, destiné à recréer la confiance entre les parties et, petit à petit en venir aux questions de fond. J'ai, pour la feuille de route, une attitude ambivalente. D'un côté, je crois qu'elle ne pourra jamais être mise à exécution telle qu'elle est rédigée justement parce qu'elle reproduit les erreurs d'Oslo. Le conflit israélo-palestinien ne se résoudra pas à travers la recherche chimérique de la confiance entre occupants et occupés – elle se résoudra une fois que l'on aura réglé les problèmes de fond qui divisent les deux parties. Aucune des deux parties ne sera prête à des concessions de fond – sur le démantèlement des colonies de peuplement ou sur le désarmement des organisations palestiniennes armées par exemple – tant que subsistera un doute profond sur l'issue finale du conflit. C'est pourquoi l'organisation dans laquelle je travaille, l'International Crisis Group, milite depuis de longs mois pour une approche dans laquelle la communauté internationale -Etats-Unis, Nations Unies, Europe, Monde arabe- définirait ensemble et d'emblée une solution juste et définitive du conflit.D'un autre côté, la feuille de route présente une opportunité modeste mais réelle de changer la dynamique néfaste qui gouverne depuis plus de deux ans et de créer une nouvelle donne dans laquelle la logique de paix l'emportera sur la logique de la confrontation. Par rapport à Oslo, il faut souligner trois améliorations importantes : la feuille de route définit les contours de l'objectif final (deux états viables et souverains vivant côte à côte) de façon vague il est vrai mais mieux que ne le faisaient les accords d'Oslo ; elle introduit un semblant de calendrier (le but étant d'atteindre cet objectif en 2005) ; et elle accepte le principe d'une vérification internationale de la conduite des deux parties.
Estimez-vous que les démarches entreprises par l'Administration Bush pour isoler le chef de l'Autorité palestinienne et mettre sur orbite Abou Mazen et Mohamed Dahlan, sont-elles les bonnes pour faire sortir la crise de l'ornière ?
Non. Je crois qu'essayer de manipuler les rapports de forces palestiniens est une erreur. On court toujours le risque d'affaiblir ceux que l'on veut aider et de renforcer ceux que l'on veut affaiblir. D'ailleurs, écoutez Abou Mazen et Dahlan : ils sont les premiers à réclamer la fin de l'isolement de leur leader. Et puis, il faut bien comprendre qu'Arafat jouit d'une autorité au sein du peuple palestinien qu'aucun arrangement institutionnel ne pourra affecter. L'isoler, c'est se priver d'un acteur fondamental de la scène palestinienne sans pour autant l'empêcher d'agir ; c'est le rendre hostile aux efforts en cours et lui enlever toute motivation d'y contribuer positivement.
La majorité des populations arabes se doutent -notamment après l'occupation de l'Irak, qui risque de perdurer- des intentions de Washington quant à la création d'un Etat palestinien. Ont-elles, à votre avis, raison de voir les choses sous cet angle ?
J'ai toujours estimé que le monde arabe avait trop tendance à se défaire de ses propres responsabilités en comptant de façon excessive sur les Etats-Unis. Bien sûr que Washington a un rôle crucial à jouer : mais ce n'est pas le seul acteur qui puisse influer sur la situation. Les pays arabes pourraient approfondir la démarche historique du sommet de Beyrouth, communiquer directement au peuple israélien pour lui expliquer ce qu'ils sont prêts à faire si un accord de paix juste était conclu. Un pays comme le Maroc a bien montré par le passé combien il pouvait influencer l'attitude des Israéliens par des gestes forts qui ne compromettent en rien les principes de base de la position arabe.
Quant à la position de l'Administration Bush, je crois que c'est aujourd'hui un grand point d'interrogation. Certainement, le discours a beaucoup évolué depuis quelques semaines, et dans un sens positif qui indique un engagement beaucoup plus poussé que pendant les deux dernières années. Mais il faudra juger sur les actes. Et pendant ce temps, il est crucial que le monde arabe prenne ses responsabilités sans attendre toujours le réveil américain.
Le secrétaire d'Etat Colin Powell a appelé les Etats arabes à considérer Hamas comme Al Qaïda, et de le traiter comme tel. Pourtant, ce mouvement prouve au fil des jours qu'il pèse au niveau de l'échiquier politique palestinien. Les Etats-Unis pourront-ils changer d'avis au cas où cette formation accepte de jouer le jeu de la trêve ?
Franchement, je n'en suis pas sûr. L'essentiel pour l'Administration américaine actuelle n'est pas la trêve, bien qu'elle la souhaite ; l'essentiel c'est la fin des organisations armées palestiniennes.
Si Hamas ou le Hezbollah libanais devenaient de simples partis politiques, j'imagine qu'une nouvelle attitude américaine serait possible.
Les observateurs remarquent que l'Administration Bush fait un forcing exceptionnel pour relancer le dossier israélo-palestinien, allant jusqu'à donner un rôle à l'Union européenne et à la Russie.
Cela a-t-il un lien, d'après vous, avec l'approche de l'entrée en campagne présidentielle à partir du mois d'octobre prochain ?
Sincèrement je ne le crois pas. L'influence de la politique étrangère sur les élections américaines est en général réduite ; qu'il y ait ou non progrès dans le dossier israélo-palestinien ne changera presque en rien la donne politique. Bien sûr, à mesure que les élections approchent, le Président Bush subira des pressions croissantes de la part de certains groupes proches d'Israël et son intérêt se portera davantage sur la situation interne. Mais à mon sens le degré d'implication de l'Administration se déterminera bien plus en fonction de l'état des négociations entre Israéliens et Palestiniens qu'en fonction de l'état des chances électorales du Président.
Les Etats-Unis sont sortis victorieux de leur guerre contre l'Irak. Tiendront-ils leurs promesses quant à l'aide à l'instauration d'un régime démocratique dans ce pays ; et, de là, à remodeler la région dans un sens plus démocratique ?
Les Etats-Unis font face à de réels problèmes en Irak dont nous avons fait état dans un récent rapport de l'International Crisis Group. Cela se sent tant du point de vue de l'échafaudage politique que de la sécurité et de l'économie. Une véritable course contre la montre est engagée : si les Américains ne parviennent pas rapidement à rétablir la sécurité, à rendre le pouvoir au peuple irakien, à montrer qu'ils ne sont pas là en occupants mais, comme ils le disent, en libérateurs, les Irakiens eux-mêmes se retourneront massivement contre eux. C'est une partie officielle, beaucoup plus difficile que Washington -qui s'attendait à un accueil triomphal à Baghdad et ailleurs- ne le pensait. Alors, avant de penser au remodelage de la région, ils doivent d'abord penser à la sauvegarde de l'Irak.
Peut-on prendre au sérieux les menaces adressées à Téhéran ? Et dans quelles mesures le politique est-il capable de suivre le militaire et si ce dernier est déterminé à frapper l'Iran ?
Je ne crois pas que le modèle de la guerre contre l'Irak soit exportable, ni en Syrie ni en Iran. Les désaccords entre Washington et Téhéran sont nombreux et connus, mais une conquête militaire n'est pas à envisager
-l'Iran n'est pas l'Irak, et le monde ne les regarde pas de la même manière.Cela ne veut pas nécessairement dire que la pression ne s'accentuera pas- avec tentative d'isolement de l'Iran, aide accrue aux manifestants anti-régime, pression sur le dossier nucléaire. Mais pour moi, ce serait faire fausse route. Américains et Iraniens ont des intérêts stratégiques légitimes. Il vaudrait mieux mettre cartes sur table, et se parler ouvertement et franchement pour voir si on peut aboutir à des points d'accord.
Pensez-vous que les derniers attentats de Casablanca sont les conséquences de la coordination étroite du Maroc avec les Etats-Unis dans la guerre contre le terrorisme ?
Franchement, je ne le sais pas. Cela fait longtemps que je n'ai plus accès aux rapports des divers services secrets et je ne veux pas me hasarder à des spéculations.Ce que je tiens à dire, premièrement, c'est que mes pensées vont aux victimes de ces attentats meurtriers. Rien ne peut les justifier et il faut des mesures fortes pour empêcher qu'ils ne se reproduisent au Maroc ou ailleurs. Mais on ne peut pour toute réponse au terrorisme où qu'il soit, offrir des réponses sécuritaires.La plaie béante du problème israélo-palestinien, les problèmes socio-économiques dans le monde arabe, les sentiments d'humiliation, de rejet, d'impuissance vis-à-vis de l'Occident, le déficit démocratique intérieur, ce sont ces chantiers là qu'il faut traiter au plus vite.


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