Devant les dirigeants, décideurs et experts réunis pour MEDays 2025, Chakib Alj, président de la Confédération Générale des Entreprises du Maroc (CGEM), a dressé le portrait d'un continent africain à la croisée des chemins, engagé dans des transformations profondes qui redéfinissent sa place dans le nouvel ordre économique mondial. « Le monde ne se contente plus d'observer l'Afrique : il se tourne vers elle », a lancé Alj d'emblée, rappelant que le continent, avec ses 1,4 milliard d'habitants, sa classe moyenne émergente et son immense vitalité démographique, est appelé à devenir l'un des pôles majeurs de la croissance mondiale. Industrialisation, le moteur incontournable Pour Alj, l'avenir de l'Afrique dépendra avant tout de sa capacité à s'industrialiser massivement. L'enjeu : dépasser l'exportation brute des matières premières pour développer des chaînes de valeur locales, profiter pleinement de la ZLECAf, et créer les millions d'emplois pour une jeunesse « aussi nombreuse qu'ambitieuse ». « Aucune transformation n'est possible sans infrastructures à la hauteur des industries du futur », a-t-il insisté. Le Maroc, a-t-il rappelé, en a fait la démonstration, en érigeant sous le leadership de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, des plateformes industrielles et logistiques de classe mondiale : Tanger Med, Nador West Med, Dakhla Atlantique, les zones industrielles intégrées, mais aussi le réseau à grande vitesse et les stratégies numériques et énergétiques. Transition énergétique, une opportunité historique Le président de la CGEM a noté que l'Afrique détient les meilleurs potentiels solaires et éoliens du monde, ce qui peut la positionner comme un acteur majeur de l'hydrogène vert et des industries bas carbone. « Le Maroc a fait le choix précoce et stratégique du renouvelable, non seulement comme réponse climatique mais comme levier de compétitivité continentale », a-t-il rappelé. Les réserves africaines en cobalt, lithium et autres minerais stratégiques placent le continent au cœur des infrastructures numériques et de la mobilité propre. Pour Alj, l'erreur serait de répéter les modèles du passé : « Notre priorité doit être de transformer localement nos ressources, afin que la valeur ajoutée reste en Afrique. » Nourrir et connecter l'Afrique Pour Chakib Alj, deux urgences s'imposent désormais à l'Afrique si elle veut sécuriser son avenir économique et social. La première est la sécurité alimentaire, devenue un enjeu stratégique face au changement climatique et à la pression démographique. Cela passe, selon lui, par une modernisation profonde des systèmes agricoles, la maîtrise durable de l'eau, l'essor de l'agritech et la structuration de chaînes logistiques performantes capables de réduire la dépendance aux importations. La seconde urgence est la souveraineté numérique, indispensable pour que le continent garde la maîtrise de ses données et de sa compétitivité. Le président de la CGEM plaide pour un investissement massif dans les datacenters africains, l'intelligence artificielle locale, les infrastructures numériques souveraines, et une rupture nette avec la dépendance technologique extérieure, devenue un frein au développement comme à la sécurité économique. L'Afrique doit mobiliser « des volumes de capitaux sans précédent », et Alj appelle à des PPP massifs, des financements régionaux innovants, et un rôle accru du secteur privé dans la modernisation de l'éducation, de la santé et des infrastructures. Les régions du Sud comme nouveau carrefour africain Dans ce contexte, Chakib Alj est revenu sur la vision stratégique de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, en soulignant la montée en puissance des régions du Sud — Dakhla et Laâyoune — devenues, selon lui, « de véritables pivots atlantiques ». Ces territoires se positionnent désormais comme des hubs industriels émergents, appuyés par des infrastructures modernes et une attractivité croissante pour les investisseurs internationaux. Ils jouent également un rôle de plus en plus structurant comme points de connexion naturels entre l'Afrique de l'Ouest, le Sahel et les grands marchés mondiaux. Une transformation qui s'inscrit pleinement dans l'Initiative Atlantique lancée par Sa Majesté le Roi, laquelle « redessine en profondeur le schéma géoéconomique africain » en ancrant l'Afrique dans les nouvelles routes énergétiques, commerciales et logistiques du XXIe siècle. Un appel à l'unité africaine Face à un environnement mondial marqué par l'incertitude, Chakib Alj exhorte l'Afrique à « cesser d'être spectatrice » et à assumer pleinement son rôle dans la nouvelle géopolitique économique. «L'Afrique doit être une force de stabilité », affirme-t-il, mais aussi « une force d'innovation » et « une force de résilience et de croissance ». Pour le président de la CGEM, cette transformation ne pourra se concrétiser qu'à travers un secteur privé mobilisé, capable d'investir, d'innover, de créer de la valeur ajoutée et de bâtir les chaînes industrielles de demain, condition indispensable pour faire du continent l'un des pôles économiques majeurs du XXIe siècle. Il a conclu en réaffirmant l'engagement du secteur privé marocain :« Le moment est venu pour une Afrique confiante, unie, et déterminée à bâtir ses propres partenariats stratégiques. Nous serons au rendez-vous de cette ambition collective. »