Dans un contexte de tensions commerciales mondiales, la politique agressive de l'administration Trump en matière de droits de douane a eu un effet inattendu, celui de rapprocher des puissances asiatiques longtemps divisées. Chine, Japon, Corée du Sud et pays de l'ASEAN parlent désormais d'une seule voix contre le protectionnisme américain, un exploit que peu auraient cru possible. Lors de la 28e réunion des ministres des Finances et des gouverneurs des banques centrales de l'ASEAN plus trois, tenue le 4 mai à Milan, en Italie, les membres de l'ASEAN, ainsi que la Chine, le Japon et la Corée du Sud, ont appelé à un renforcement de l'unité et de la coopération régionales afin de faire face aux incertitudes croissantes, notamment la montée du protectionnisme et la volatilité des conditions financières mondiales, selon une déclaration commune publiée à l'issue de la réunion. Cette déclaration sans précédent, qui n'a pas mentionné directement les Etats-Unis, est intervenue alors que de nouveaux droits de douane américains de grande envergure menaçaient de frapper durement l'Asie du Sud-Est. Elle souligne que l'escalade du protectionnisme commercial pèse sur le commerce mondial, entraînant une fragmentation économique et affectant les échanges, les investissements et les flux de capitaux dans la région. Ils ont ajouté que les perspectives à court terme pourraient également être impactées par d'autres risques externes, notamment le durcissement des conditions financières mondiales, le ralentissement de la croissance chez les principaux partenaires commerciaux et la réduction des flux d'investissement. Lire aussi : Cinéma: Trump impose des droits de douane de 100% sur les films produits à l'étranger La déclaration commune a également souligné que, dans un contexte marqué par des incertitudes croissantes et des transformations structurelles à long terme, les signataires réaffirment leur engagement plein et entier en faveur du multilatéralisme ainsi que d'un système commercial multilatéral fondé sur des règles, non discriminatoire, libre, équitable, ouvert, inclusif et transparent, ayant pour centre l'Organisation mondiale du commerce (OMC). Par ailleurs, la situation géopolitique en Asie de l'Est et du Sud-Est reste marquée par des tensions croissantes entre la Chine, le Japon, la Corée du Sud et les pays de l'ASEAN, en raison de différends territoriaux, de rivalités militaires et de préoccupations économiques. À titre d'exemple, face à l'augmentation des dépenses militaires de la Chine et à ses actions perçues comme agressives, plusieurs pays de la région renforcent leurs capacités de défense. Le Japon, notamment, a approuvé un budget de défense record de 50,7 milliards d'euros pour l'exercice 2024-2025, soit une hausse de près de 17 % par rapport à l'année précédente. La Corée du Sud et les Philippines augmentent également leurs budgets militaires. Les Philippines, par exemple, investissent 35 milliards de dollars pour moderniser leur armée, en réponse aux revendications territoriales de la Chine en mer de Chine méridionale. En mai 2024, la Chine, le Japon et la Corée du Sud se sont réunis à Séoul pour leur premier sommet tripartite en cinq ans. Les dirigeants ont réaffirmé leur engagement en faveur de la dénucléarisation de la péninsule coréenne et ont convenu de renforcer leur coopération économique, notamment en accélérant les négociations pour un accord de libre-échange trilatéral. Cependant, dans un contexte de rivalité stratégique croissante entre les Etats-Unis et la Chine, désormais considérée comme la principale ligne de fracture géopolitique, ni le Japon ni la Corée du Sud ne peuvent définir leur propre trajectoire sans tenir compte de cet affrontement entre les deux grandes puissances. Sur le plan géopolitique, ces deux pays voisins jouent un rôle clé en Asie. Bien que leur position future demeure incertaine, ils restent des sociétés dynamiques, marquées par des avancées notables sur les plans économique, militaire et technologique.