Dans les coulisses des communes de Casablanca-Settat et de Marrakech-Safi, un malaise grandit. Des recrutements massifs de travailleurs occasionnels, souvent sans mission réelle, soulèvent des soupçons de favoritisme et de détournement de fonds. Des élus locaux sont dans le viseur, et la justice pourrait bientôt être saisie. L'Inspection Générale de l'Administration Territoriale (IGAT) a récemment engagé une série de procédures à l'encontre de plusieurs élus locaux, notamment des présidents de communes et des conseillers issus des régions de Casablanca-Settat et de Marrakech-Safi. Ces responsables font désormais l'objet de poursuites potentielles devant les juridictions compétentes en matière de délinquance financière, à la lumière de dysfonctionnements jugés graves dans la gestion des ressources humaines et budgétaires. Selon les médias, les rapports élaborés par les équipes d'inspection, en attente de validation par le wali et inspecteur général Mohamed Faouzi, font état de pratiques irrégulières, principalement dans le recours abusif aux travailleurs occasionnels. Dans certains cas, des collectivités territoriales ont recruté plus de 300 agents temporaires sans encadrement administratif rigoureux, ni justification des besoins réels. Une telle surenchère dans les embauches pèse lourdement sur les finances locales et interroge sur la rationalité des choix opérés. Lire aussi : Performance de la gestion publique: Lekjaa souligne l'importance de la programmation budgétaire triennale Ces constats mettent en lumière une instrumentalisation politique des postes temporaires, souvent attribués selon des critères clientélistes ou en contrepartie de soutiens électoraux. Plusieurs agents recensés dans les registres communaux n'exercent en réalité aucune fonction effective, relevant ainsi de la catégorie dite des « agents fictifs ». Certains bénéficiaires possèdent par ailleurs des entreprises commerciales ou des cabinets médicaux privés, ce qui alimente les soupçons de conflits d'intérêts et d'abus de pouvoir. Des exemples concrets ont été documentés, notamment dans la province de Berrechid, où des agents recrutés sur une base temporaire ont été affectés à des services névralgiques tels que l'urbanisme ou la fiscalité locale. Dans plusieurs cas, les inspecteurs ont identifié des interventions au profit d'individus liés aux élus ou à leur entourage immédiat, traduisant une confusion entre gestion publique et intérêts particuliers. Alerté par l'ampleur de ces dérives, le ministre de l'Intérieur, M. Abdelouafi Laftit, a adressé une circulaire urgente aux walis et gouverneurs, leur demandant de veiller à la stricte application des dispositions de la circulaire de 2009 relative à la gestion des agents occasionnels. Il leur a également enjoint de transmettre des rapports détaillés sur la situation dans leurs circonscriptions, afin de permettre une évaluation nationale rigoureuse. Certaines communes ont d'ores et déjà entrepris de revoir leurs modalités d'engagement, exigeant désormais un renouvellement trimestriel des contrats et la fourniture d'un relevé d'identité bancaire (RIB), dans une optique de transparence et de traçabilité. Les éléments recueillis indiquent également que les recrutements ont souvent été réalisés sans prise en compte de l'organigramme ni respect des dispositions légales, attribuant aux agents des responsabilités incompatibles avec leur statut. Par ailleurs, la continuité des engagements, parfois prolongés sur plusieurs mois sans interruption, constitue une entorse manifeste aux règles encadrant le caractère non permanent de ces fonctions.