Le déficit budgétaire est désormais placé sous les fourches caudines dune aggravation pour le moins intenable. Après avoir frôlé les 4,5% en 2004, on sattend à ce quil atteigne la barre des 5%. Le récent renchérissement des cours de lor noir, la hausse des dépenses de fonctionnement, pour ne citer que ces deux données, sont incontestablement pour beaucoup dans cette tendance. Reste que cette évolution pourrait sestomper dans le temps, lEtat étant de plus en plus prompt à devenir investisseur; ce qui serait susceptible de contribuer à colmater les brèches à ce niveau. Les cours pétroliers ne cessent daugmenter atteignant des niveaux record. Tous les spécialistes sont unanimes pour indiquer que les cours de lor noir vont dépasser les 70 dollars le baril avec lapproche de lhiver, voire les 100 dollars en fin dannée. Ce sera un coup fatal pour les finances publiques qui seront contraintes de supporter les subventions devant alimenter la Caisse de compensation qui devraient dépasser les 7 milliards de DH, si lon compte les arriérés de 2004 chiffrés quant à eux à 2,5 milliards de DH. Le Maroc, on le sait, importe 97% de ses besoins en hydrocarbures de létranger. La loi de Finances pour 2005 a basé ses prévisions sur un cours du pétrole plafonné à 35 dollars le baril. Or, ce cours a atteint presque le double courant août. Des analystes estiment que cette tendance haussière devrait sinscrire dans la durée, dautant que la demande mondiale est appelée à saccroître lors de la prochaine saison. Selon les autorités, le Budget de lEtat a supporté, entre janvier et juillet, du fait de la non-répercussion totale sur les consommateurs des hausses des cours mondiaux du pétrole, un montant de 3,40 milliards de DH. Et bien avant lenvolée des cours du brut, pour 2004, le déficit public, compte tenu des concours du Fonds Hassan II, avait approché les 4,5% du PIB contre 4,3% en 2003 et 3,2% en 2002. Malgré la restriction des dépenses et lamélioration de la collecte fiscale, le déficit a dérapé du fait de laugmentation continue des dépenses courantes. A cela sajoute le fardeau de la dette publique. En effet, nonobstant la gestion active (conversion de la dette en investissements) et la politique daccompagnement des établissements publics pour le traitement de leur dette onéreuse adoptée par le Trésor, lencours de la dette extérieure, même sil sest inscrit dans un trend baissier, a atteint au terme du premier trimestre de cette année, 114.286 MDH contre 115.310 MDH à lissue de 2004. Face à cette nouvelle donne, les autorités marocaines ont dû revoir à la baisse leurs prévisions. Ainsi, le taux de croissance, qui devait sétablir à seulement 3%, pourrait tomber au-dessous de 2,6%, voire de 1,8% ou même de 1,2%, selon les prévisions les plus pessimistes. La mauvaise performance de la campagne agricole, qui est un facteur déterminant, va également se répercuter sur le déficit budgétaire. En labsence dopérations de privatisation majeures, il faut sattendre à un déficit de près de 5%. Même si le ministère des Finances cherche à calmer les esprits en avançant une bonne évolution des recettes fiscales qui sont supérieures à 25%. Pour rappel, au terme du premier semestre de lannée 2005, les recettes ordinaires du Trésor ont progressé de 22,9% sous leffet des rentrées au titre de la privatisation, dun montant de 6,2 milliards de DH, ainsi que de lamélioration des recettes fiscales de 16%. Les dépenses ordinaires ont, quant à elles, augmenté à un rythme moins rapide de 13,2%. Aussi, le solde ordinaire est-il passé, en un an, de 9,8 milliards à 16,8 milliards de DH, couvrant largement les dépenses dinvestissement chiffrées à 10,7 milliards. Compte tenu du solde positif des comptes spéciaux du Trésor de près de 3 milliards, le Budget général sest soldé par un excédent de 9,1 milliards. Après paiement des arriérés pour un montant de 3,4 milliards, le Trésor a dégagé un excédent de financement de 5,7 milliards, qui a permis de couvrir les sorties nettes de capitaux au titre de la dette extérieure et de réduire les recours au système bancaire. Ayant été accompagnée déléments dincitations budgétaires qui ont encouragé les demandes, lopération Intilaka relative aux départs volontaires ne peut, par la force des choses, quengendrer un coût supplémentaire pour lEtat, sur le poste Dépenses. Et pour cause, son coût devrait atteindre la bagatelle des 6 milliards de dirhams. Faisant montre dun optimisme mesuré, les autorités de tutelle estiment, toutefois, que cet investissement, qui devrait entraîner une réduction dautres dépenses de fonctionnement, serait susceptible dêtre amorti dans les trois années à venir. Pour le moment, renchérissent les observateurs, les fourches caudines dune éventuelle aggravation du déficit budgétaire se feront sentir avec acuité. Sauf que dans ce cas de figure, on sattend à ce que ce déficit va sestomper avec le temps, lEtat étant devenu investisseur à travers le Budget, mais aussi grâce au Fonds Hassan II pour le développement économique et social, lequel est alimenté par les recettes de privatisation. Dans le programme, des opérations de privatisation à venir sont envisagées pour 2006, notamment les 20% restant de la Régie des Tabacs ou une partie du capital de la Banque populaire. Le Fonds Hassan II participe à la construction de Tanger-Med, des autoroutes, celle menant à Tanger, celles dEl Jadida et de Marrakech, prévues pour décembre 2006, et celle dAgadir pour 2009, etc. On sattend aussi à un renflouement des caisses de lEtat par le biais des prochaines opérations de privatisations. Outre le récent passage dans le giron du privé des quatre sucreries, il y a dans le pipe de ces mêmes opérations, notamment les 20% qui restent dans la Régie des Tabacs et qui seront acquis par Altadis, la poursuite du processus douverture de capital de la BCP et celui de la COMANAV.