C'est un communiqué aussi sobre que chargé de sous-entendus. Le 26 juin, dans la foulée des révélations de Sky News sur le rejet du projet par le gouvernement britannique, Xlinks a officiellement réagi. Surprise, amertume, mais aussi détermination à rebondir : la déclaration de l'entreprise en dit long sur les enjeux d'un projet que Londres choisit de laisser de côté. Le ton est mesuré, mais la déception est palpable. Dans un communiqué publié jeudi 26 juin, Xlinks dit "accepter" la décision du ministère britannique de l'Énergie (DESNZ) de ne pas accorder de soutien à son projet d'interconnexion électrique entre le Maroc et le Royaume-Uni. Mais derrière cette résignation de façade, la réaction de l'entreprise traduit une incompréhension profonde face à ce qui est perçu comme un désengagement politique brutal. « Nous sommes profondément surpris et amèrement déçus », affirme Sir Dave Lewis, président de Xlinks. Le Royaume-Uni renonce à un projet jugé exemplaire Xlinks ne mâche pas ses mots pour rappeler à Londres ce qu'elle vient, selon elle, de balayer d'un revers de main : un projet sans financement public, à prix compétitif, capable de fournir 8 % des besoins électriques britanniques, de réduire de 9 % les prix de gros dès la première année, et de générer 20 milliards de livres de valeur socio-économique, dont 5 milliards injectés directement dans l'industrie verte locale. Le message implicite est clair : si le gouvernement britannique voulait affirmer sa volonté de relocaliser la production énergétique, il le fait au prix d'un gâchis économique, industriel et climatique. L'entreprise rappelle aussi que le projet avait été reconnu comme « d'intérêt national majeur » en 2023. Ce revirement n'en est que plus difficile à digérer. Un désaveu politique plus qu'économique En insistant sur l'absence de coût pour les finances publiques, le soutien massif d'investisseurs privés et l'intérêt manifeste de prêteurs, Xlinks suggère que les raisons de ce rejet ne sont pas financières. L'entreprise laisse entendre que c'est bien un arbitrage politique, en pleine redéfinition de la stratégie énergétique britannique, qui est venu couper court à un projet pourtant aligné avec les objectifs de transition. La critique est implicite, mais réelle : Londres ferait preuve de myopie stratégique, en renonçant à un projet innovant qui permettait de diversifier les sources d'approvisionnement sans dépendre des aléas du vent ou du soleil britanniques. Pire, Xlinks souligne que sa solution était moins chère que le nucléaire... que le gouvernement soutient par ailleurs sans réserve. Le projet pourrait bien continuer... sans Londres Face au rejet britannique, Xlinks ne tourne pas pour autant le dos au projet. Et c'est là que le communiqué prend une tournure plus offensive. Le groupe britannique loue avec insistance le rôle du Maroc, présenté comme un « leader mondial » des énergies renouvelables, doté d'un cadre clair, visionnaire et tourné vers la coopération internationale. « Nous avons été continuellement impressionnés par la vision et l'environnement que le Maroc a mis en place », écrit Sir Dave Lewis. Ce passage n'est pas anodin : en valorisant son partenaire marocain, Xlinks laisse entendre que le projet pourrait bien continuer... sans Londres. Une manière de dire aux investisseurs et aux autres gouvernements : l'infrastructure est prête, le potentiel est immense, d'autres alliances sont possibles. Une phase de redéploiement s'ouvre « Nous travaillons désormais à libérer le potentiel du projet et à en maximiser la valeur d'une manière différente » .Cette phrase de conclusion ouvre la porte à une recomposition stratégique. Xlinks pourrait chercher à réorienter son interconnexion vers un autre marché européen, ou proposer une version adaptée du projet pour répondre à d'autres besoins énergétiques. Le projet Xlinks est donc loin d'être enterré. Il est simplement à reconfigurer. Et si le Royaume-Uni a choisi de se retirer, d'autres, peut-être, y verront l'opportunité de capter une innovation majeure en matière d'interconnexion verte.