Hespress a appris, de sources hautement informées, que des équipes relevant de l'Inspection générale des finances (IGF) ont relevé plusieurs indicateurs laissant présumer l'existence d'irrégularités dans l'attribution de marchés au sein d'institutions et d'entreprises publiques. Ce qui n'était au départ qu'une mission de contrôle routinier des commandes publiques s'est rapidement transformé en un audit approfondi de documents et de pièces relatifs à des « marchés exclusifs ». Cet audit a porté sur 13 établissements publics, leurs dépendances, ainsi que sur des dizaines d'entreprises bénéficiaires. Les investigations se sont concentrées sur des marchés de services, de fourniture, de maintenance et de travaux récurrents. Selon les mêmes sources, l'examen des comptes des départements des achats et des commandes a mis en évidence la répétition quasi systématique des mêmes entreprises dans les listes des adjudicataires. Une récurrence suffisante pour nourrir des soupçons de pratiques monopolistiques et de possibles collusions impliquant des responsables publics. Les investigations ont par ailleurs révélé que certaines de ces « entreprises privilégiées », solidement installées sur de nombreux marchés depuis des années, sont liées à des enfants ou proches de ministres, de hauts fonctionnaires et d'élus influents. Les sources précisent que la plupart des marchés soumis à l'audit ont été attribués par le biais des bons de commande, un mécanisme soumis à un niveau de contrôle financier plus léger. Les inspecteurs ont également pris connaissance de rapports d'audit internes appartenant à deux établissements publics, lesquels contiennent des informations préoccupantes sur l'élaboration de cahiers des charges aux conditions douteuses. Ces documents pointent des pratiques favorisant certaines entreprises au détriment de concurrentes qui avaient déposé des plaintes auprès du ministère de l'Économie et des Finances, de la Commission nationale des marchés publics, de l'Institution du Médiateur ou encore auprès d'autres instances de haut niveau. L'analyse détaillée des pièces financières et des clauses contractuelles a mis au jour des irrégularités supplémentaires, susceptibles de déboucher sur des décisions correctives et des poursuites judiciaires visant des fonctionnaires et responsables publics. Toujours selon les informations recueillies par Hespress, les services d'inspection du ministère de l'Économie et des Finances ont constaté qu'une seule et même entreprise avait obtenu des marchés dans des secteurs d'activité très variés, après inventaire des bénéficiaires de marchés publics à l'échelle nationale. Cette société unique a décroché des contrats dans la maintenance technique, la fourniture de transformateurs électriques, mais aussi dans le nettoyage et le marketing digital. Les sources précisent qu'elle a obtenu six marchés auprès d'un seul établissement public, alors même que des rapports internes signalaient des retards dans l'exécution de précédents contrats ainsi que des défauts de conformité dans les fournitures livrées. Il convient de rappeler que le ministère de l'Économie et des Finances ainsi que la Commission nationale des marchés publics ont reçu, au cours des derniers mois, un nombre important de plaintes évoquant des soupçons de marchés « taillés sur mesure » au profit de certaines entreprises. Beaucoup d'entre elles, de petite taille et nouvellement créées, recouraient massivement à la sous-traitance et à l'intermédiation, ce qui a entraîné la paralysie de nombreux chantiers publics. Les sources de Hespress ajoutent que les inspecteurs des finances ont demandé à plusieurs établissements publics de leur fournir des documents et pièces justificatives pour vérifier la régularité des procédures appliquées lors de l'examen des offres des entreprises lésées par les marchés en cours d'audit. Ils ont notamment exigé les procès-verbaux des marchés et les rapports rédigés par les ordonnateurs lors de la validation des dépenses liées à ces contrats. Les investigations de l'Inspection générale des finances se sont également orientées vers des soupçons de manipulation des spécifications techniques contenues dans certains appels d'offres. Selon les mêmes sources, cette manipulation consistait à insérer dans les cahiers des charges des équipements assortis de références et caractéristiques inexistantes sur le marché, permettant ainsi de résilier facilement le contrat si l'entreprise adjudicataire échouait à fournir le matériel demandé. Cette méthode ouvrirait la voie à une réattribution ultérieure des marchés à des entreprises prédéterminées, grâce à la réactualisation des appels d'offres et de leurs cahiers des charges.