Quelques jours à peine après le démarrage officiel de la 5G, le Maroc fait déjà figure de référence mondiale. Avec 7 millions de terminaux activés, plus de 6.000 stations de base opérationnelles et une centaine d'offres commerciales, le pays réalise un démarrage fulgurant inédit dans la région MENA. Mais derrière cette réussite technique, un cadre réglementaire rigoureux encadre chaque étape du déploiement. Analyse complète des obligations, des enjeux et des comparaisons internationales. Le Maroc s'illustre déjà comme un leader mondial du numérique. Quelques jours seulement après le déploiement officiel de la 5G, les premiers résultats sont spectaculaires, battant même certains records internationaux selon des sources proches du dossier. Le Royaume peut donc se targuer ne pas faire une simple entrée symbolique dans l'ère de la cinquième génération de téléphonie mobile. Il réussit, au contraire, une prouesse concrète et techniquement impressionnante. En effet, et en une seule semaine, 7 millions de terminaux 5G ont été activés, soutenus par plus de 6.000 stations de base déjà opérationnelles réparties sur 60 villes, apprend-on de sources informées. Mieux encore, le secteur projette d'atteindre 8.200 stations actives d'ici à la fin de l'année. Un démarrage fulgurant qui le positionne aisément comme un modèle régional et un cas d'étude global. «À ce rythme, et si les prévisions de 8.200 stations à fin décembre se concrétisent, le Royaume établira un standard inédit dans la région MENA et au-delà», commente un expert du secteur. Côté offres, la dynamique est tout aussi remarquable. On recense actuellement une centaine de propositions commerciales actives, avec une forte poussée dans le segment prépayé où les forfaits ont bondi de 120%. Pour illustration, une recharge de 50 dirhams offrait auparavant 5 Go de débit, elle donne aujourd'hui accès à 11 Go, un changement valable aussi bien pour la 4G que la 5G, selon les mêmes sources. Quant aux forfaits post-payés, ils n'ont pas été en reste. Les volumes de débit ont augmenté de 20% et ce, sans incidence sur les tarifs, certains plans intégrant désormais des contenus multimédias enrichis. Il faut dire que ces performances inédites n'arrivent pas par hasard. Même si la 5G a suscité une impatience généralisée avant son lancement, le Maroc s'est donné le temps de construire un cadre réglementaire exigeant et un engagement contractuel rigoureux des opérateurs. Car au cœur de la métamorphose du secteur, les cahiers des charges imposés aux opérateurs télécoms définissent les règles du jeu. Ils constituent le socle contractuel et technique sur lequel repose la mise en place d'une connectivité nouvelle génération. Ces cahiers des charges relatifs à l'octroi des licences 5G aux opérateurs nationaux, tels qu'approuvés le 30 octobre dernier, par le gouvernement, ont été publiés dans le Bulletin officiel n°7453 daté du 3 novembre 2025. Quels enjeux en découlent pour le pays, les entreprises et les citoyens ? Le cadre juridique s'appuie fondamentalement sur la loi n°24.96 relative aux postes et télécommunications, adoptée en 1997 et régulièrement actualisée pour suivre les évolutions technologiques. Cette loi est complétée par un ensemble de décrets d'application encadrant l'utilisation des fréquences, le partage d'infrastructures, les services à valeur ajoutée ou encore les obligations de service universel. Ce corpus juridique est renforcé par la conformité aux standards de l'Union Internationale des Télécommunications (UIT), en particulier les spécifications IMT-2020 qui définissent les critères techniques de la 5G. Comme le stipule l'article 2 du cahier des charges, une «réseau génération cinq est défini comme un réseau public terrestre de communications mobiles utilisant des technologies radioélectriques conformes aux spécifications IMT-2020 de l'UIT». Des obligations d'investissement et de couverture territoriale exigeantes Les trois opérateurs sont soumis à des conditions identiques de lancement et de couverture. Le cahier des charges impose à chaque opérateur de lancer commercialement ses services 5G dans un délai maximal de quatre mois à compter de la date d'entrée en vigueur de l'autorisation. Il est précisé qu'en cas d'incapacité à lancer commercialement le service dans le délai imparti, l'opérateur doit notifier l'ANRT des mesures correctives prévues, conformément à ses engagements réglementaires. L'obligation d'informer l'ANRT sept jours ouvrables avant la date effective de lancement commercial est également imposée. Une gestion stratégique du spectre fréquentiel et de l'interopérabilité Les opérateurs ont reçu des bandes de fréquences distinctes et doivent rendre ces ressources actives dans un délai de deux ans sous peine de retrait de l'autorisation. Ce principe s'applique uniformément aux trois acteurs. En cas de problème, les opérateurs doivent informer l'ANRT et soumettre un plan correctif. Les conditions d'interconnexion sont également encadrées dans les cahiers des charges. Ils stipulent que «les conditions techniques, administratives et financières de l'interconnexion sont déterminées par des conventions librement négociées entre les opérateurs», tout en se conformant aux orientations de l'ANRT en matière de régulation. Un contrôle étroit de la gouvernance et de la conformité économique Chaque opérateur est tenu de transmettre à l'ANRT un rapport d'activité périodique, couvrant les indicateurs de performance, de qualité de service, d'investissements et de gestion des incidents. Toute modification dans la gouvernance, la structure actionnariale ou l'organisation doit être soumise à l'approbation de l'Agence. Par ailleurs, la demande de renouvellement peut être refusée si l'opérateur ne respecte pas les obligations fixées dans le cahier des charges pendant la période de validité initiale ou prolongée de la licence. Soulignons que la dimension de la souveraineté technologique est bien présente dans les cahiers des charges. Ces documents imposent aux opérateurs de s'équiper auprès de fournisseurs autorisés et de garantir la conformité de leur infrastructure avec les exigences de sécurité nationale. Cette disposition vise à éviter l'utilisation d'équipements présentant un risque pour la souveraineté numérique du pays. Une équation complexe entre ambition numérique et réalités économiques Le déploiement de la 5G nécessite des investissements massifs pour chacun des trois opérateurs. En plus de la couverture technique, ces entreprises doivent adapter leurs systèmes de gestion, former leurs équipes et assurer une maintenance continue à très haut niveau. Le texte prévoit la possibilité de renouvellement des autorisations pour une durée de cinq ans, à condition que les obligations initiales aient été intégralement respectées. Mais au-delà des contraintes, les perspectives sont immenses : développement des villes intelligentes, automatisation industrielle, amélioration des services de santé, d'éducation et de logistique. L'ensemble des licences prévoit également des mécanismes de révision périodique. Tous les cinq ans, l'ANRT peut procéder à une évaluation globale de la conformité technique, économique et réglementaire de chaque opérateur. Cette révision conditionne le renouvellement de la licence. Sur un autre volet, la mutualisation des infrastructures représente un axe central des nouvelles obligations. Elle concerne notamment les pylônes, les stations de base, les sites radioélectriques et les fibres optiques. En cas de refus de mutualisation, l'opérateur plaignant peut saisir l'ANRT qui dispose du pouvoir de trancher et, le cas échéant, d'imposer une décision exécutive. Cette disposition vise à optimiser l'aménagement du territoire numérique et réduire les coûts de déploiement dans les zones rurales. En matière de sécurité, les trois cahiers des charges prévoient un contrôle renforcé de la chaîne d'approvisionnement. Il est expressément stipulé que les équipements critiques (cœurs de réseau, plateformes d'authentification, systèmes de supervision) doivent provenir de fournisseurs accrédités par l'ANRT, lesquels peuvent faire l'objet d'une exclusion en cas de menace sur la sécurité nationale ou de non-conformité aux normes ISO/CEI. Concernant les obligations de qualité de service, les indicateurs doivent atteindre des niveaux strictement définis. Il s'agit d'un débit minimum de 100 Mbps en réception et 50 Mbps en émission dans les zones couvertes, avec une latence inférieure à 10 millisecondes. Ces paramètres doivent être vérifiés par des audits indépendants commandités par l'ANRT. Les résultats de ces audits sont rendus publics afin d'assurer la transparence vis-à-vis des usagers. Le spectre attribué à chaque opérateur couvre différentes bandes : la bande C (3,5 GHz) est privilégiée pour sa portée intermédiaire et sa compatibilité avec la majorité des terminaux actuels, tandis que la bande mmWave (26 GHz) est réservée à des usages spécialisés en zones très denses ou industrielles. Les opérateurs doivent démontrer, dans leur rapport de conformité, l'utilisation effective de ces bandes selon les critères de l'UIT. Autre point clé : Les obligations de couverture géographique sont parmi les plus strictes jamais imposées à des opérateurs au Maroc. Chaque titulaire de licence 5G est tenu d'assurer une couverture minimale dans les principales zones économiques et urbaines, incluant les capitales régionales et les zones industrielles critiques, dans un délai de deux ans. Le texte stipule que tout retard devra être justifié auprès de l'ANRT, sous peine de sanctions graduelles allant jusqu'à la suspension temporaire des autorisations. Déploiement 5G – Où se situe le Maroc dans le monde ? Le lancement de la 5G au Maroc est salué comme l'un des plus rapides jamais enregistrés à l'échelle mondiale. Tour d'horizon de quelques pays pionniers... Corée du Sud : Premier pays à lancer la 5G commerciale, le 3 avril 2019. Selon le ministère sud-coréen des technologies de l'information (MSIT), le pays comptait 3,5 millions d'abonnés 5G après six mois et 115.000 stations de base actives fin 2020. Chine : À fin 2020, la Chine avait déjà déployé près de 700.000 stations de base 5G, un an après le lancement commercial à grande échelle. Les opérateurs y bénéficient d'un soutien massif de l'Etat. Etats-Unis : Déploiement progressif à partir de 2019. En 2023, les Etats-Unis comptaient environ 160.000 sites 5G actifs, avec une forte disparité entre les zones urbaines et rurales. Inde : Lancement en octobre 2022. En un an, les opérateurs ont déployé plus de 100.000 sites 5G, selon le Department of Telecommunications. La couverture reste en expansion continue.