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Mario Vargas Llosa, un amoureux lucide de l'Amérique latine
Publié dans Le Soir Echos le 06 - 08 - 2012


Le fait d'avoir lu des centaines et des centaines de romans en près d'un demi-siècle n'empêche pas que l'une de ces innombrables fictions continue de résonner dans la mémoire plus puissamment et fonde une admiration qui n'a pas varié. Le Péruvien Mario Vargas Llosa n'avait pas encore reçu le Prix Nobel de Littérature quand parut Conversation à « La Cathédrale » (Gallimard) dont la lecture me passionna. Soudain, c'est tout un pays, Le Pérou, dont j'ignorais tout qui m'était révélé avec les pérégrinations de Santiago Zavala et «La Cathédrale » qui est le nom d'un bar fréquenté par le journaliste demeure dans mon souvenir comme un de ces lieux qui vous hantent parce qu'un romancier en a fait l'épicentre d'une fresque remarquable. Il me faudrait avoir accès aux archives du Matin pour que je puisse relire la chronique que je consacrai en 1973 à Conversation à « la Cathédrale ». Mon enthousiasme ne se démentit pas lorsque je lus en 1980 La Tante Julia et le scribouillard un roman dont l'aspect hilarant n'ôte rien à ce mélange de perspicacité et de scepticisme propre à Vargas Llosa. Il s'agit d'un maître-écrivain. Aussi n'ai-je pas hésité à me plonger dans son Dictionnaire amoureux de l'Amérique latine (Plon, 2005) traduit de l'espagnol par Albert Bensoussan, lui-même un écrivain attachant et le traducteur attitré de Vargas Llosa auquel il a consacré un essai. Ce dictionnaire tient de l'autobiographie sentimentale, intellectuelle et politique. Vargas Llosa a été candidat malheureux à la Présidence du Pérou mais on notera que les premières phrases du Dictionnaire amoureux de l'Amérique latine le présentent comme ayant été dans sa jeunesse une sorte de latino-américain ayant la tête ailleurs. Et c'est ailleurs qu'il redevint latino-américain : « c'est à Paris, dans les années soixante que j'ai découvert l'Amérique latine (...) A l'exception de quelques célébrités, comme Pablo Neruda et Jorge Luis Borges, c'est à peine si je connaissais un ou deux auteurs hispano-américains ». La traduction française des auteur latino-américains encouragea la reconnaissance par l'Amérique latine de ses propres écrivains. Voici que Vargas Llosa évoque l'écrivain cubain Alejo Carpentier (que Mohamed Ben Abdesslam, alors responsable des émissions francophones de la RTM m'invita à interviewer en compagnie d'Ignacio Ramonet, le romancier du Partage des eaux et de Concert baroque étant de passage à Rabat) et le Dictionnaire amoureux de l'Amérique latine nous prodigue des souvenirs, des analyses et des descriptions que Vargas Llosa accumula à partir des années soixante pour dire le multiplicité des enjeux, des prestiges et des drames de l'Amérique latine. Il commence par évoquer son compatriote, Ciro Alegria dont il salue le roman Vaste est le monde, puis le Brésilien Jorge Amado auquel il destine une jolie formule : « Et j'en mets ma main au feu, il n'y a pas une personne au monde ayant connu et lu Jorge Amado qui s'aviserait de l'expulser du paradis. » L'entrée Amazonie de ce Dictionnaire... repose sur le souvenir qu'a Vargas Llosa d'une expédition à laquelle il put participer en 1957, à l'invitation d'un anthropologue là où vivent des tribus aguarunas et humbistas : « Passer de Lima à Chicais ou Urkusa, c'était sauter du XXe siècle à l'âge de pierre, entrer en contact avec des compatriotes qui vivaient à demi-nus, dans des conditions extrêmement primitives et, de surcroît, impitoyablement exploités ». A la lecture de ces lignes, le souvenir m'est revenu de ce qu'écrivit Edward W. Saïd dans Réflexions sur l'exil et autres essais (Actes Sud, 2008) : « La fameuse analyse de Mario Vagas Llosa d'un massacre andéen de journalistes péruviens (Inquest in the Andes : A Latin American Writer Explores the Political Lessons of a Peruvian Massacre, New York Times Magazine, 31 juillet 1983) est fondée sur la prédisposition des Indiens andéens à des formes particulièrement terribles de meurtre systématique ; la prose de Vargas Llosa est lestée d'expressions sur les rituels, l'aspect rétrograde et l'immuabilité lugubre propre aux Indiens, qui se fondent toutes sur l'autorité ultime de descriptions anthropologiques ». C'est bien la preuve qu'un grand talent n'empêche pas de donner prise à des polémiques ! Vargas Llosa apparaît dans son Dictionnaire amoureux de l'Amérique latine plus mesuré dans ses analyses qu'il n'en a quelquefois donné le sentiment, mais sa révolte est intacte contre le sort des paysans au Pérou lorsque la crise et le terrorisme les réduisaient « à une économie de subsistance et à un statut d'infra-humanité ». On s'amuse dans ce livre foisonnant, quand le romancier, natif d'Arequipa, rapporte la « névrose passagère qui affecte l'autochtone. Un beau jour, le plus paisible des Aréquipiens cesse de dire bonjour, passe des heures la mine renfrognée, dit et fait les pires extravagances et, pour une simple divergence de vues, prétend assommer son meilleurs ami. » La culture maya et aztèque est évoquée par Vargas Llosa à travers l'œuvre de l'écrivain guatémaltèque Miguel Angel Asturias. La première femme célébrée par Vargas Llosa est l'agent littéraire Carmen Bacells dont il dresse un portrait haut en couleurs. Voici la Bolivie que Vargas Llosa connut dans son enfance. Et les relectures se poursuivent : L'Argentin Jorge Luis Borges dont notre auteur affirme qu'il fut le phénomène le plus important de la littérature moderne de langue espagnole. Vargas Llosa se souvient de l'avoir interviewé en 1963 : « Qu'est-ce que c'est, pour vous, la politique, Borges ? » : « Une des formes de l'ennui ». Le défilé se poursuit avec le peintre Fernando Botero et le cinéaste Luis Bunuel. Il est question de Che Guevara aussi bien que du poète mexicain José Emilio Pacheco, des Incas et de Flora Tristan qui demeura huit mois à Arequipa et deux à Lima en 1834 : « Dans ces Mémoires, elle devait brosser un formidable portrait de cette société féodale et violente... » Le Dictionnaire amoureux de l'Amérique latine de Mario Vargas Llosa constitue une sorte d'hymne à la création littéraire, à la liberté et manifeste un effort constant de lucidité.

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