Plus de quatorze ans après la chute du régime de Zine El Abidine Ben Ali, la justice tunisienne semble intensifier sa quête de reddition des comptes. Ce mardi, Halima Ben Ali, fille de l'ancien président tunisien déchu, a été arrêtée à l'aéroport Charles-de-Gaulle à Paris à la demande des autorités tunisiennes. Une arrestation qui résonne comme un coup de tonnerre, à la fois judiciaire et politique, dans les relations franco-tunisiennes. Selon des sources judiciaires françaises et tunisiennes concordantes, Halima Ben Ali a été interpellée alors qu'elle s'apprêtait à embarquer pour un vol à destination de Dubaï. L'arrestation est intervenue dans le cadre d'un mandat émis par Tunis, relayé via Interpol et transmis aux autorités françaises. Placée en garde à vue, elle devra comparaître prochainement devant le parquet général de Paris qui décidera de la suite à donner : placement sous écrou extraditionnel ou libération sous contrôle judiciaire, en attendant une éventuelle audience devant la chambre de l'instruction. Des poursuites pour corruption et détournements Bien que les autorités tunisiennes n'aient pas communiqué de manière officielle sur les chefs d'inculpation précis, des sources proches du dossier évoquent des accusations de détournement de fonds publics, corruption, blanchiment d'argent et enrichissement illicite. Ces accusations s'inscrivent dans le cadre de la vaste série de poursuites entamée depuis la Révolution de 2011 contre les membres du clan Ben Ali-Trabelsi, accusés d'avoir pillé les ressources du pays durant des décennies. LIRE AUSSI : Tunisie: le beau-frère de Ben Ali inculpé et incarcéré en France Halima Ben Ali, connue pour sa discrétion médiatique, avait jusqu'à présent échappé aux projecteurs judiciaires. Son arrestation réactive ainsi un pan entier de la mémoire collective tunisienne, encore profondément marquée par les abus présumés de l'ancien régime. Côté français, la procédure d'extradition s'annonce complexe. La France et la Tunisie sont liées par des accords de coopération judiciaire, mais les garanties des droits fondamentaux devront être examinées avec rigueur par la justice française. La défense de Halima Ben Ali, assurée par l'avocate franco-tunisienne Samia Maktouf, a d'ores et déjà dénoncé une procédure politique déguisée en justice. Elle qualifie cette interpellation d'« acharnement sans fondement juridique » et promet de contester toute extradition au nom des principes de respect du procès équitable et de sécurité personnelle. Un précédent et des suites à suivre Ce n'est pas la première fois qu'un membre du clan Ben Ali est ciblé à l'étranger. Des tentatives d'extradition avaient déjà été initiées, souvent sans succès, contre d'autres membres de la famille, notamment en Italie et au Canada. L'affaire Halima Ben Ali pourrait marquer un tournant si la France donne son feu vert à son extradition. Ce serait alors la première remise effective à la Tunisie d'un membre direct du clan présidentiel depuis la Révolution.