L'activation progressive de la 5G est imminente. Avant sa diffusion grand public, la technologie ciblera d'abord les réseaux privés (ports, usines) pour des usages critiques : robotique, maintenance prédictive et Internet des objets. La transition vers des architectures cloud-native est le défi majeur pour construire l'écosystème numérique de demain. À la veille du lancement officiel de la 5G au Maroc, l'effervescence gagne l'ensemble de la filière télécom. Au-delà d'un simple saut de performance, cette transition ouvre un cycle d'investissements à long terme. D'après le cadre stratégique entériné en juillet 2025, à savoir un rapport de l'Agence Nationale de Réglementation des Télécommunications (ANRT) approuvé par le chef du gouvernement, plus de 80 milliards de dirhams seront mobilisés entre 2025 et 2035 pour toute la chaîne de valeur, des infrastructures passives aux data centers, en passant par les antennes, les pylônes, les serveurs et le génie civil. Les équipementiers mondiaux suivent de très près l'évolution du marché marocain. Plusieurs annonces publiques et signaux industriels confirment que les grands acteurs ont engagé des premières vagues de contrats liés à la 5G. L'hypothèse de travail dans le secteur est claire : la « Full 5G » à l'horizon 2030 créera un couloir d'opportunités d'au moins dix ans, le temps de moderniser les réseaux, d'opérer la bascule vers des architectures cloud-native et d'industrialiser de nouveaux services numériques. Premier à s'être positionné, Huawei revendique une avance grâce à des partenariats noués avec des institutions publiques et les trois opérateurs (Maroc Telecom, Orange et Inwi). Le groupe affirme être « 5G Ready » après une série de tests techniques et déploie des programmes de formation destinés aux ingénieurs, développeurs et start-ups afin d'ancrer les compétences localement et de préparer les cas d'usage professionnels. Parallèlement à la fourniture d'infrastructures, cette stratégie vise à faire du Royaume un pôle de référence pour la 5G en Afrique. Lire aussi : 5G au Maroc : Une révolution numérique en marche Nokia suit une trajectoire complémentaire, axée sur l'appui aux politiques publiques et la transformation des réseaux. L'entreprise a signé plusieurs protocoles d'accord, notamment avec le ministère de la Transition numérique et de la Réforme de l'administration, pour contribuer à la stratégie Maroc Digital 2030, accélérer la 5G et densifier la fibre. Elle accompagne déjà la modernisation d'Orange Maroc et a inauguré à Salé un centre d'innovation dédié à la formation, à la recherche et au développement de solutions technologiques au service de l'écosystème local. De son côté, Ericsson se positionne comme un fournisseur clé dans la préparation du passage à la 5G Standalone (SA). Son partenariat stratégique avec des opérateurs au Maroc vise l'activation d'un cœur 5G « Dual Mode » et de solutions cloud-native, conditions indispensables au déploiement du network slicing, à la réduction drastique de la latence et au support de l'Internet des objets critique à grande échelle. Le succès de la 5G reposera d'abord sur une gestion optimale du spectre. Selon l'ANRT, les déploiements s'appuieront principalement sur la bande 700 MHz pour étendre la couverture, notamment le long des axes routiers et ferroviaires, et sur la bande 3,5 GHz pour apporter de la capacité en zones denses. La fréquence 2,1 GHz pourra également être mobilisée selon les scénarios techniques et la disponibilité du parc. Cette combinaison vise à concilier continuité de service et débits élevés. Dans un premier temps, les opérateurs devraient activer la 5G en mode Non-Standalone (NSA), en s'appuyant sur les cœurs existants pour accélérer la mise en service. La bascule vers la 5G SA, plus exigeante mais plus riche en fonctionnalités, interviendra progressivement et ciblera d'abord des réseaux privés dans les ports, aéroports, usines, plateformes logistiques et grands sites industriels, y compris au sein de l'OCP. Les usages professionnels — maintenance prédictive, robotique, vidéo analytique, connectivité critique — serviront de locomotive. À l'échelle nationale, une diffusion large de la 5G SA est envisagée autour de 2030. D'ici là, la compétitivité dépendra autant des investissements matériels que du développement des compétences locales en radio, virtualisation, cloud et sécurité. Santé connectée, villes intelligentes, agriculture de précision et contenus immersifs figurent parmi les marchés aptes à transformer l'essai. La décennie qui s'ouvre s'annonce décisive pour structurer un écosystème 5G créateur de valeur et d'emplois, dans le sillage des orientations fixées par l'ANRT.