Au Maroc, l'administration a une mauvaise réputation. Non pas à cause de sa légendaire lourdeur, pointée du doigt dans les rapports du FMI et la Banque mondiale, mais également par ses milliers de fonctionnaires fantômes qui touchent mensuellement leurs salaires sans être obligés de travailler. Ce sont les privilégiés du secteur public. Benkirane entend mettre un terme à cette autre forme d'économie de rente. Réussira-t-il là où son prédécesseur, Driss Jettou (2002-2007) avait échoué ? Il n'y a pas que le cinéma américain qui s'intéresse aux fantômes, Benkirane aussi. Mais à une exception près. Le chef du gouvernement ne compte pas les chasser dans les vieilles demeures mais dans la fonction publique et les collectivités locales. Le chef de gouvernement a adressé, le 15 novembre, une circulaire aux ministres les incitant à sévir contre les fonctionnaires absentéistes dont le nombre n'a cessé, au fil des années, d'augmenter, au point qu'il est difficile de donner un chiffre exact des agents fantômes que des estimations évaluent à 15 et 20 000 voire même plus. Benkirane fera-t-il mieux que Driss Jettou en 2005 ? En 2005, Driss Jettou, alors premier ministre, avait publié, le 11 mai 2005, une circulaire, contre la prolifération des fonctionnaires fantômes dans le public, réclamant, notamment, la radiation des mis en causes. Plus de sept ans après cette initiative, force est de constater que la mesure de Jettou a échoué à cause de «la non-adhésion effective et continuelle de certaines administrations dans l'opération de contrôle de la présence des fonctionnaires», comme le reconnaît le chef de gouvernement dans sa lettre. La nouvelle circulaire de Benkirane a été précédée par une autre, ordonnant aux entreprises dans lesquelles l'Etat détient plus de 50% des actions de ne procéder à aucun recrutement de nouveaux salariés sans passer par la voie du concours. Une mesure qui n'a pas fait que des heureux. Les mécontents soulèvent le coût de la logistique pour embaucher un nombre réduit de personnes. Auparavant, elles se contentaient d'annoncer des offres d'emplois sur leurs sites web ou dans quelques journaux. Et ça marche.