Un non-professionnel de la Santé peut-il investir ou acquérir des établissements d'hospitalisation privés ? La réponse à cette question nécessite la refonte de la loi 10-94 bien que cette dernière ne contienne pas de dispositions expresses relatives au mode de détention du capital. Elle permet aux médecins de mettre en commun leurs moyens dans le seul cadre d'association ou de société civile régie par le code des contrats et obligations. La Problématique de la détention du capital des cliniques privées et établissements assimilés a donc été l'objet d'un atelier national organisé samedi dernier à Rabat par le ministère de la santé rassemblant les membres du conseil national et des conseils régionaux de l'ordre national des médecins, les représentants de l'hospitalisation privée et les syndicats et associations professionnelles des médecins des deux secteurs privé et public. Ce sujet, qui semble purement technique, a une connotation fortement politique. C'est ce qui explique d'ailleurs la présence effective à cet atelier de Yasmina Baddou, ministre de la Santé. Dans son allocution d'ouverture, elle a tenu à rappeler que « ce sujet fait partie des grandes réformes que le secteur de la santé a engagé et qui constitue une priorité pour le gouvernement, à travers l'adoption d'une batterie de mesures aux niveaux institutionnel, organisationnel et financier. Une question qui interpelle le rôle et l'avenir de l'hospitalisation privée et le rôle qu'elle va jouer dans le système de santé en vue de promouvoir le niveau de l'offre de soins et faciliter le droit à son accès de son équitable». Rappelant le contexte national et international et les défis et les enjeux de la mondialisation et du progrès médical et technologique, Mme Baddou a souligné qu' « il est indispensable de trouver de nouveaux modes de financement » des cliniques pour rehausser le niveau de leurs prestations. Cette réforme nécessiterait, d'après Mme Meshak Khadija, Directrice de la réglementation et du contentieux au ministère de la Santé, la refonte de l'ensemble du dispositif juridique régissant l'exercice de la médecine. Le décret d'application de la loi 10-94 prévoit que le capital des cliniques est exclusivement médical et national. Une refonte qui s'insère également dans le cadre de la réorganisation du système de santé et du système de l'offre de soins à travers le projet de loi cadre 34-09 qui institue notamment la carte sanitaire et les schémas régionaux de l'offre de soins approuvés par la chambre des représentants et soumis à l'examen de la chambre des conseillers. Dans une analyse de l'état des lieux, la directrice de la réglementation a précisé que « dans les faits, la plupart des cliniques antérieures à la loi conservent le statut de SARL et qu'aujourd'hui les fondateurs des nouvelles cliniques essaient tant bien que mal de s'accommoder avec les nouvelles dispositions qui interdisent ce statut ». Il est donc nécessaire d'avoir une vision cohérente et qui converge vers des objectifs communs. Moulay Tahar Alaoui, président du conseil national de l'ordre national des médecins a mis l'accent sur l'importance de cette réforme « c'est un dossier qui tient à cœur, non seulement aux médecins du privé mais à tous les médecins du secteur public. Un dossier qui se pose et s'impose, celui du partenariat public-privé qui, à ses yeux est fondamental pour maintenir l'équilibre ». Autre problématique, le progrès médical et les biotechnologies. Les progrès incessants de plus en plus rapides de la connaissance médicale et des biotechnologies en général renchérissent aussi bien les coûts d'investissements que les coûts des soins. Ceux-ci de plus en plus capitalistiques dépassent les possibilités des seuls médecins. C'est ce qui explique la libéralisation du capital des établissements de soins privés dans de très nombreux pays. Les représentants des médecins ont mis l'accent sur leurs inquiétudes qu'ils résument dans la liberté professionnelle des médecins, le refus du salariat médical et le risque de l'envahissement du capital étranger accompagné des médecins étrangers. Les avis étaient très partagés. Le leitmotiv des représentants des médecins porte sur les garanties juridiques pour prévenir ce risque. Yasmina Baddou s'est engagée à prendre toutes les mesures nécessaires de nature à pallier à d'éventuels risques.