La pollution par les colorants industriels représente un péril croissant pour les écosystèmes aquatiques, en raison de leur persistance et de leur toxicité. Un article qui paraîtra en détail dans la revue Next Materials en octobre examine l'utilisation du grignon d'olive brut, résidu des huileries marocaines, comme biosorbant naturel apte à extraire le bleu de méthylène (MB) des effluents. Les chercheurs affirment que «ce matériau agricole, longtemps perçu comme un simple déchet, peut devenir une ressource utile à l'assainissement des eaux». Une matière végétale étudiée dans ses moindres détails Les auteurs décrivent le grignon d'olive comme un coproduit lignocellulosique composé de cellulose, d'hémicellulose, de lignine et de divers groupements chimiques capables de fixer les colorants. Selon eux, «les fonctions hydroxyle et carboxyle détectées à la surface du matériau favorisent les interactions électrostatiques avec les molécules de MB». Afin d'établir cette caractérisation, l'étude a recouru à la spectroscopie infrarouge à transformée de Fourier (FTIR), à la diffraction des rayons X (XRD), aux analyses thermiques (TGA/DTA), aux mesures de surface spécifique BET et à la microscopie électronique à balayage (MEB). Ces techniques révèlent une surface poreuse, structurée et thermiquement stable, offrant des conditions favorables à l'adsorption. Les chercheurs précisent que «l'organisation interne du matériau confère au grignon d'olive une aptitude remarquable à piéger des molécules organiques dissoutes». Des performances d'adsorption élevées et mesurées Les expériences ont porté sur une masse fixe de 0,05 g de grignon, en variant le pH de 4 à 10, la concentration initiale de MB de 10 à 300 mg/L et le temps de contact jusqu'à 180 minutes. L'étude rapporte «un taux maximal d'élimination atteignant 98,6 % dans des conditions optimales». Pour analyser les données, les auteurs ont confronté les résultats aux isothermes classiques de Langmuir et de Freundlich. Le modèle de Langmuir s'est imposé comme le plus pertinent, indiquant une adsorption monomoléculaire et homogène. Les capacités maximales calculées atteignent 232,55 mg/g en ajustement linéaire et 252,08 mg/g en ajustement non linéaire à pH 8. Les auteurs observent que «la forte corrélation des données expérimentales avec le modèle de Langmuir traduit la nature spécifique des interactions entre le grignon et le MB». En comparaison, le modèle de Freundlich, bien qu'indiquant une adsorption sur surface hétérogène, s'est montré moins ajusté aux données. Cette confrontation de modèles illustre, selon les chercheurs, «la nécessité d'un cadre théorique précis pour interpréter la performance des biosorbants naturels». Des mécanismes cinétiques confirmés par la modélisation L'examen cinétique a confronté les résultats aux modèles de pseudo-premier ordre (PFO) et de pseudo-second ordre (PSO). Le modèle PSO s'est avéré le plus conforme, avec des coefficients de corrélation supérieurs et des capacités prédites proches des valeurs expérimentales. Ce constat conduit les chercheurs à affirmer que «la chimisorption est l'étape limitante du processus, impliquant des liaisons fortes entre les molécules de MB et la surface active du grignon». Les calculs ont été affinés grâce à la modélisation non linéaire effectuée avec l'outil Solver d'Excel. L'analyse a mobilisé plusieurs critères d'ajustement, dont le χ2, la RMSE et l'écart-type normalisé. Les auteurs insistent sur le fait que «ces paramètres statistiques confirment la validité des modèles appliqués et la précision des valeurs obtenues». En conclusion, l'étude souligne que «le grignon brut d'olive représente un biosorbant performant, peu coûteux et respectueux de l'environnement pour l'élimination du bleu de méthylène des eaux usées». Elle propose de considérer ce résidu agricole, produit en abondance par les huileries marocaines, comme une ressource stratégique pour la dépollution hydrique. Au-delà du cas du bleu de méthylène, cette recherche illustre la fécondité d'une approche scientifique qui conjugue rigueur théorique et valorisation de matériaux locaux. Elle démontre que des solutions sobres et accessibles peuvent émerger face aux pollutions industrielles, lorsque la science s'attache à réévaluer les ressources considérées comme marginales.