Devant la commission de l'intérieur, des collectivités territoriales et du logement à la Chambre des représentants, le ministre de l'intérieur Abdelouafi Laftit a exposé le projet de loi n° 55.25 modifiant et complétant la loi n° 57.11 relative aux listes électorales générales, aux opérations référendaires et à l'usage des médias audiovisuels publics durant les campagnes électorales. Par cette réforme, le gouvernement entend doter le système électoral d'une ossature juridique plus limpide et plus rigoureuse, tout en moralisant la vie publique et en adaptant les modalités d'inscription aux exigences de l'ère numérique. L'inscription électronique comme nouveau vecteur de participation civique Le ministre a précisé que le texte a pour vocation première de «développer l'architecture juridique des listes électorales générales en y intégrant des garanties accrues pour les électrices et électeurs, afin d'assurer la rigueur et la transparence du processus de révision et de clôture des listes, condition sine qua non d'un scrutin irréprochable». M. Laftit a indiqué que le projet de loi introduit la reconnaissance de l'inscription électronique sur les listes électorales, «tant pour les citoyens résidant au Maroc que pour ceux établis à l'étranger, tout en maintenant la possibilité du dépôt traditionnel auprès des bureaux administratifs». Cette réforme, inspirée de l'expérience expérimentale conduite en 2015 sous la loi n° 88.14, sera désormais intégrée au dispositif juridique principal afin de garantir sa cohérence et sa pérennité. Concernant l'âge électoral, M. Laftit a déclaré que «la capacité d'inscription est fixée à dix-huit années révolues à la date de clôture des listes électorales», afin de lever toute ambiguïté quant à l'exercice du droit de suffrage. S'agissant des Marocains établis hors du Royaume, le projet de loi élargit les critères de rattachement territorial, leur permettant «de s'inscrire dans la commune ou l'arrondissement correspondant non seulement au lieu de naissance de leur père, mais également à celui de leur mère ou de leurs ascendants, hommes et femmes confondus». Pour leur offrir une traçabilité immédiate de leurs démarches, «les commissions administratives seront tenues de notifier leurs décisions par voie électronique, garantissant la célérité et la transparence des procédures». Moralisation du scrutin et rigueur répressive L'un des piliers de cette réforme réside dans la moralisation du corps électoral. M. Laftit a affirmé que «les personnes condamnées pour des infractions entachant la probité, la loyauté ou la sincérité du scrutin seront désormais privées du droit d'être inscrites sur les listes électorales». Cette disposition englobe les manquements au devoir de réserve, la violation du secret professionnel, l'exploitation d'informations confidentielles obtenues dans l'exercice d'une fonction publique ou encore toute atteinte à la crédibilité du processus électoral. Le ministre a ajouté que «les individus frappés d'une décision judiciaire définitive de destitution d'un mandat électif seront exclus des listes pour deux mandats consécutifs à compter de la date où la sentence devient irrévocable». Le projet de loi confirme en outre «l'impossibilité d'appliquer des peines de substitution pour les infractions prévues par la loi électorale», conférant à la répression des manquements électoraux un caractère exemplaire et dissuasif. Dans le même esprit, le texte autorise les autorités locales, durant la période précédant le scrutin, à opérer les rectifications nécessaires sur les listes électorales arrêtées à titre définitif, notamment «la radiation des défunts, des personnes déchues de leurs droits électoraux et l'inscription de celles rétablies par décision judiciaire». Ces modifications devront être consignées dans un registre public consultable dix jours avant le scrutin. Encadrement du calendrier électoral et sanctions contre la manipulation de l'opinion L'un des aspects les plus techniques du texte concerne la réorganisation du calendrier électoral. Le projet de loi supprime l'obligation actuelle de clôturer les listes électorales quarante jours avant le scrutin et transfère cette compétence au ministre de l'intérieur. Selon M. Laftit, «cette adaptation permettra de disposer d'un corps électoral actualisé avec la précision nécessaire avant l'engagement des opérations de vote». Par ailleurs, le délai imparti aux tribunaux pour statuer sur les recours relatifs aux inscriptions sera ramené de trente à vingt jours, afin de garantir une justice électorale prompte et effective. En matière de fraude, la législation se durcit : «toute personne obtenant son inscription ou celle d'autrui par des moyens fallacieux sera passible d'une peine d'emprisonnement aggravée et d'une privation de droits civiques pour cinq années». Le texte introduit également des sanctions exemplaires à l'encontre des infractions liées aux sondages électoraux. M. Laftit a rappelé que «la diffusion ou la commande d'enquêtes d'opinion durant la période prohibée, notamment au moyen des réseaux sociaux, des plateformes numériques ou des systèmes d'intelligence artificielle, fera l'objet de peines d'emprisonnement et d'amendes alourdies, assorties de la déchéance de la capacité commerciale pour les contrevenants». La période d'interdiction s'étendra du quinzième jour précédant l'ouverture de la campagne électorale jusqu'à la clôture du scrutin. Par cette réforme d'ensemble, l'exécutif entend consolider le lien entre transparence démocratique et probité publique, en érigeant le registre électoral en instrument de légitimité civique et de confiance institutionnelle.